Pierre Messmer : itinéraire d’un gaulliste en Afrique


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Pierre Messmer est décédé, mercredi, à l’Hôpital du Val de Grâce, à Paris. Il était âgé de 91 ans. Résistant, artisan de la décolonisation, Premier ministre, académicien… Retour sur la carrière d’un homme dont la politique et les décisions ont marqué l’histoire de l’Afrique du siècle dernier.

Pierre Messmer est mort, mercredi, à l’âge de 91 ans. Sa carrière professionnelle, qu’elle soit militaire ou politique, a été d’une grande densité. Pour beaucoup, il restera un modèle d’intégrité, fidèle à la France et au Général de Gaulle qu’il a toujours souhaité servir et dont il a été le ministre des Armées. Il a atteint le sommet de sa carrière politique sous la présidence de Georges Pompidou, dont il fut le Premier ministre entre 1972 et 1974.

C’est au 12ème régiment de tirailleurs sénégalais, de 1937 à 1939, que Pierre Messmer a fait son service militaire. Hasard ou signe du destin ? Difficile à dire. Il n’en demeure pas moins que son histoire sera étroitement liée à l’Afrique. En 1938, il est diplômé de l’école d’administration des colonies. Pourquoi avoir choisi cette voie ? Parce qu’il a toujours eu une attirance pour les pays étrangers et une réelle amitié pour les Africains qu’il considérait, disait-il, « comme des frères ».

Une carrière africaine

Aux côtés de la « France libre » durant la Seconde Guerre Mondiale, il gagne Londres en 1940, sans attendre l’appel du Général de Gaulle. Il rejoint, sur sa propre initiative, la légion étrangère et participe aux opérations de Dakar et Libreville en 1941, puis aux campagnes d’Erythrée et de Syrie, suivies en 1942 de celles de Libye et de Tunisie un an plus tard. Le jeune Français commence alors à se familiariser avec le continent africain.

En 1944, Pierre Mesmer est fait compagnon de la Libération. Il reçoit également la croix de guerre et la médaille de la Résistance. La fin de la guerre marque son départ pour l’Indochine, en 1945. Après avoir participé à la guerre, il s’éloigne de l’armée et occupe différents postes administratifs. Mais la politique indochinoise du gouvernement français ne l’anthousiasme guère.

Il part ensuite pour la Mauritanie où il officie en tant qu’administrateur du cercle de l’Adrar mauritanien, de 1950 à 1952, et gouverneur général, les deux années suivantes. Puis il occupe le même poste en Côte d’Ivoire, avant de gagner le Cameroun où il devient Haut Commissaire de la République de 1956 à 1958. Une fonction qu’il exerce, par la suite en Afrique Equatoriale et en Afrique Occidentale française de 1958 à 1959.

Vers une Afrique indépendante

Pierre Messmer a tenu un rôle important dans la marche vers l’indépendance des colonies françaises d’Afrique. Bien qu’il n’ait pas été l’auteur de la stratégie de la décolonisation conçue à Paris par le général De Gaulle, il en a dirigé la délicate exécution. Habile et fin négociateur, il a personnellement veillé à faire enterrer la vieille loi-cadre qu’il avait lui-même contribuée à préparer au sein du cabinet du ministre de l’Outre-mer, Gaston Defferre [[Cette loi dite Loi-cadre Defferre, adoptée le 23 juin 1956, créait dans les territoires d’outre-mer des Conseils de gouvernement élus au suffrage universel, ce qui permettait au pouvoir exécutif local d’être plus autonome vis-à-vis de la métropole. Toutefois, le mode de scrutin reste défavorable aux habitants de souche.]].

L’étape de décolonisation achevée en décembre 1959, Pierre Messmer va quitter Dakar pour gagner le paquebot et retourner en France. En 1960, le général De Gaulle le nommera ministre des Armées. L’une de ses principales missions sera de tenir en main les troupes françaises d’Algérie au moment où le pays était en plein bouillonnement révolutionnaire. Fidèle soutien du Général de Gaulle, il mettra au service de ce dernier son expérience et l’appuiera dans ses décisions, dont celle, fondamentale, de mettre fin à la crise en reconnaissant aux Algériens le droit à l’autodétermination et à l’indépendance.

De sa « carrière africaine », l’on retiendra son engagement envers le continent, son désir de coopération avec les pays colonisés qu’il souhaitait dégager des rapports de domination, comme il le raconte dans son livre Les blancs s’en vont – Récits de décolonisation , paru en 1998 (Albin Michel). Etonnant personnage que celui de Pierre Mesmer ! D’administrateur colonial il est passé du « côté » des colonisés, organisant le départ des Français du continent. Un changement qui s’explique, sans doute, par une longue et forte expérience sur le terrain, aux cotés des habitants qui revendiquaient de plus en plus haut leur désir d’émancipation. « [J’ai ] aimé les Africains comme des frères et l’Afrique comme une seconde patrie », se plaisait-il à dire.

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