Peine de mort : l’Afrique en contre-courant du reste du monde


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Afrique subsaharienne - peine de mort

Alors que les exécutions augmentent dans de nombreuses régions du monde, l’Afrique subsaharienne adopte une trajectoire inverse. Réformes, débats publics et mobilisation des sociétés civiles placent le continent à contre-courant d’une tendance mondiale inquiétante, faisant émerger un espoir abolitionniste.

Le dernier rapport d’Amnesty International sur la peine de mort, publié le 8 avril 2025, tire la sonnette d’alarme : en 2024, le monde a enregistré 1 518 exécutions, soit une hausse de 32 % par rapport à l’année précédente. Ce chiffre marque un sommet jamais atteint depuis 2015, dû principalement à l’augmentation massive des exécutions en Iran, en Irak et en Arabie saoudite. Pourtant, au milieu de cette marée montante de la peine capitale, une région se distingue par une dynamique opposée : l’Afrique subsaharienne.

L’Afrique subsaharienne : des signaux positifs dans un océan d’exécutions

Alors que des pays comme l’Iran (972+), l’Arabie saoudite (345+) ou encore la Chine (1000+ estimées) continuent d’appliquer massivement la peine de mort, l’Afrique subsaharienne affiche une trajectoire encourageante. En 2024, le nombre d’exécutions recensées dans la région a baissé de 11 %, et les condamnations à mort ont chuté de 10 %. Seule la Somalie a officiellement procédé à des exécutions (34 cas), conservant sa position isolée sur un continent qui semble de plus en plus déterminé à tourner le dos à la peine capitale.

Plusieurs États africains ont entamé des démarches prometteuses. La Zambie et le Zimbabwe ont entrepris des réformes juridiques majeures visant l’abolition de la peine de mort, affirmant ainsi leur volonté de se conformer au droit international. Le Burkina Faso, le Nigeria et la République démocratique du Congo, bien qu’ambivalents, ont entamé des discussions qui pourraient étendre ou encadrer plus strictement l’usage de la peine capitale. Ce contraste flagrant avec les tendances au Moyen-Orient, en Asie et même aux États-Unis souligne un changement profond de paradigme sur le continent africain.

Entre tradition, justice et droits humains

Pourquoi cette évolution en Afrique alors que d’autres régions persistent dans leur recours à la peine capitale ? Selon Anne Denis, responsable de la commission « Abolition de la peine de mort et de la torture » à Amnesty France, plusieurs facteurs sont à l’œuvre. D’une part, la pression croissante des sociétés civiles africaines, souvent très actives sur les questions de justice et de droits humains. D’autre part, une volonté politique dans certains pays de se rapprocher des standards internationaux, voire d’attirer davantage d’investissements et de coopération extérieure.

À l’échelle mondiale, Amnesty recense encore plus de 28 000 personnes sous le coup d’une condamnation à mort à la fin de 2024. Mais les avancées africaines permettent d’espérer. Alors que le recours à la peine de mort pour des délits liés aux stupéfiants explose ailleurs (637 exécutions en 2024, dont 505 rien qu’en Iran), les pays d’Afrique subsaharienne évitent pour la grande majorité ce type de dérives. Le continent semble ainsi porter une vision plus humaine de la justice, misant sur la réforme plutôt que sur la répression ultime.

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