Il était de notoriété publique que Patrick Karam, délégué interministériel à l’égalité des chances des Français d’Outre-mer, et Christian Estrosi, secrétaire d’Etat à l’Outre-mer, ne s’entendaient pas. Ce dernier reprochant au premier de lui faire de l’ombre par son « activisme » incessant. Désormais, la mise à l’écart de Patrick Karam paraît imminente. Une décision qui provoque déjà des remous dans le monde antillais.
La rumeur court depuis la semaine dernière. Le guadeloupéen Patrick Karam, délégué interministériel à l’égalité des chances des Français d’Outre-mer auprès du Premier ministre, aurait été poussé à remettre sa démission. A l’origine des événements, les tensions existant entre lui et le secrétaire d’Etat à l’Outre-mer, Christian Estrosi. Ce dernier, qui le trouverait trop impulsif, semble estimer qu’il empiète sur ses prérogatives et serait agacé par son « activisme ». Patrick Karam aurait remis sa lettre de démission après un entretien organisé mercredi dernier à sa demande et qualifié de «vif» avec le secrétaire général de l’Élysée, Claude Guéant, qui aurait exigé de lui qu’il travaille désormais sous le contrôle strict de Christian Estrosi.
Interrogé par l’AFP, lundi, Patrick Karam n’a pas confirmé les faits. Il a néanmoins précisé que si de trop nombreux obstacles entravaient son action, il quitterait son poste : « si je devais démissionner, c’est que j’aurais acquis la certitude que les engagements du président de la République envers les ultramarins ne seraient pas tenus par les autorités ministérielles concernées. » Puis il a ajouté que « fidèle aux ultramarins et aux engagements présidentiels, [il] refuserait d’être l’alibi d’une inaction avouée et n’accepterait pas d’assumer une politique contraire aux intérêts de l’outre-mer. »
Patrick Karam, ancien président du Collectif Dom et porte-parole des comités de soutien de l’Outre-mer à la candidature de Nicolas Sarkozy, s’était vu confier, en juillet dernier, par le nouveau chef de l’Etat, un poste de délégué interministériel taillé sur mesure. Sa mission : défendre les intérêts des Français originaires de l’Outre-mer vivant dans l’Hexagone, et en particulier lutter contre les discriminations dont ils sont l’objet.
Les premiers soutiens de Patrick Karam
Parmi les défenseurs de Patrick Karam, son ami Victorin Lurel, député et président socialiste du Conseil Régional de la Guadeloupe. Piégé le jeudi 13 décembre par l’humoriste Gérald Dahan qui s’était fait passer pour Nicolas Sarkozy au téléphone, le parlementaire a révélé malgré lui au grand public les difficultés que traversait le délégué ministériel et plaidé sa cause auprès de l’usurpateur : « vous avez probablement sur votre bureau sa lettre de démission. Est-ce que vous pourriez le recevoir? Ce serait une faveur que vous me feriez, vu le mal qu’il s’est donné pour travailler pour vous, pour la France, pour travailler pour les outremers. » Victorin Lurel, qui a déploré hier, dans un communiqué de presse, « l’exploitation politicienne du canular de Gérald Dahan » qui lui avait également soumis une fausse « mission d’ouverture », a confirmé qu’il considérait bien Patrick Karam comme un « ami ».
Dans l’Hexagone, le délégué interministériel à l’égalité des chances des Français d’Outre-mer a également reçu le soutien du CM98, association influente dans la communauté antillaise. Dans un communiqué, son président, Serge Romana, s’est dit inquiet de l’éventuel limogeage de Patrick Karam et a déclaré que « cette décision, si elle était confirmée, signifierait que le temps du paternalisme colonial est de retour. » L’association avait approuvé la nomination de Patrick Karam au poste de délégué interministériel du fait de son engagement en faveur des ressortissants d’Outre–mer vivant en France hexagonale sur certains points tels que : le combat pour que le 23 mai soit inscrit au calendrier de la République en tant que date de commémoration des victimes de l’esclavage, conformément aux engagements pris par Nicolas Sarkozy pendant sa campagne ; et la baisse des prix exorbitants des billets d’avion en direction de l’Outre-mer.
Alors que le départ de Patrick Karam n’a pas été annoncé officiellement, des noms de successeurs potentiels circulent déjà. Notamment, selon le quotidien Le Figaro, celui du martiniquais Claude Zabulon, préfet délégué auprès du préfet de l’Essonne.