La première édition du salon du livre africain à Paris, Livres d’Afrique, s’est déroulée le 30 avril dernier à l’Unesco. Les visiteurs et les exposants sont tous unanimes : la manifestation a été une réussite. De quoi donner envie aux organisateurs de l’événement – étudiants et jeunes cadres africains – de renouveler l’expérience. D’autant plus que la cuvée de jeunes talents, récompensée par le « Concours jeunes auteurs d’Afrique » est des plus prometteuses.
Le pari était simple pour les organisateurs – des étudiants issus de l’Institut d’études politiques de Paris et de jeunes cadres africains – de Livres d’Afrique, la première édition du salon du livre africain à Paris. Il s’agissait de faire de l’Unesco, cadre de la manifestation qui s’est déroulée le 30 avril dernier, l’équivalent d’une Fnac (grande enseigne culturelle française), le temps d’une journée, entièrement consacrée au livre africain. Les visiteurs n’ont pas boudé l’événement et se sont déplacés nombreux et en renonçant à ce magnifique soleil de ce début d’avril.
Pour Elisabeth, le soleil se trouvait à l’intérieur de l’Unesco. « Ce salon m’a fait très plaisir, je m’intéresse à littérature africaine depuis très longtemps ». Pour les sœurs Sassy-Akué, le salon était « bien organisé ». Quant à André, il a constaté que la manifestation était « une belle première qu’il faudrait pérenniser afin que Livres d’Afrique soit un voyage sur le continent et à travers l’Outremer ». Pour lui, le nom du salon devrait également être traduit dans les langues africaines.
Une première édition qui rime avec satisfaction
Même satisfaction du côté des écrivains, parmi lesquels on a pu voir, entre autres,Véronique Tadjo, Bolya, Sylvia Serbin ou encore un nouveau venu dans ce cercle très fermé des hommes de lettres, Arnold Senou. « C’était magnifique, bien organisé, les gens sont venus nombreux, parce qu’ils avaient été bien informés. L’organisation a donc bien communiqué sur l’événement.», affirme Dolcia Ntim, écrivain. Même son de cloche chez son collègue Gaston Kelman à propos de cette première édition du salon du livre africain. « J’en suis très satisfait, dira-t-il. C’est une initiative vraiment extraordinaire. Je pense que c’est un bon début ». Pour Gervais Loembé, auteur, venu expressément de Lyon, cette manifestation a été l’occasion de rencontrer d’autres écrivains. « C’est une excellente idée. Les échanges ont été certes vifs (plusieurs débats sur les enjeux de la littérature africaine ont été organisés en marge du salon, ndlr) sur certains sujets mais l’ambiance a été des plus sereines. En tant que responsable d’une ONG, je m’emploierai de mon côté à promouvoir cette initiative.» Le ravissement est aussi partagé par leurs éditeurs.
« Je suis ravi, le salon était extrêmement bien organisé. Certes, prenant, mais l’organisation était parfaite. Le public a été très bien ciblé. Les visiteurs étaient très intéressés, motivés et ont posé beaucoup de questions. Ils nous ont d’ailleurs acheté pas mal d’ouvrages, note Patrick Mérand, le directeur des Editions Sepia. Makisosila Mawete des Editions Pyramide/Papyrus Presse a exprimé, quant à lui, « une énorme satisfaction » et a noté « la bonne ambiance » qui a régné au cours du salon. « Cette manifestation devrait avoir lieu deux fois par an. Car on véhicule tellement de bêtises sur l’Afrique que ce type de manifestation est l’occasion d’apporter une image positive du continent. Les visiteurs ont montré un grand intérêt pour le métier d’éditeur, la littérature africaine dont ils ont pu découvrir la richesse grâce à ce salon.
Edem : un nouveau venu dans la littérature africaine
Enfin, pour Alex Fuilu, instigateur de l’association Afrobulles, qui promeut la bande dessinée africaine et éditeur de la revue éponyme, ce salon a été une véritable opportunité de promouvoir ce genre littéraire. « Cela fait près de trois ans que je participe à ce type de manifestation pour vulgariser la BD africaine, car beaucoup se demandent s’il y a des auteurs africains spécialisés dans ce genre. Il y a une réelle demande de la part de ceux qui aiment le continent, qui aimerait découvrir l’Afrique sous un autre angle ». Et M. Fuili, qui a animé un atelier à l’attention des enfants, de constater : « par la BD, les enfants découvrent une autre vie, celle d’enfants qui comme eux s’amusent, jouent au ballon. Les enfants ont d’ailleurs beaucoup de choses à raconter en images, une capacité qu’ignore beaucoup de parents. »
Le salon du livre africain, c’était aussi le « Concours jeunes auteurs d’Afrique », pour lequel le premier prix a été remporté par Edem pour son récit intitulé Port-Melo. Ce livre est « une histoire d’exil », explique le jeune auteur togolais qui s’est dit « très ému et très surpris » en recevant son prix doté d’un chèque de 3 000 euros. L’exil donc, un sujet pour lequel Edem dispose d’une certaine expertise puisque sa thèse de doctorat porte sur le thème de l’écriture africaine de l’exil. Port-Melo, c’est l’histoire d’une côte africaine dont la vie est rythmée par l’apparition de cadavres. L’un des personnages clé du récit entreprend de comptabiliser ces épaves défigurées. Une entreprise qui lui vaudra de se mettre à dos le pouvoir en place. Le récit a été qualifié par Alain Mabankou, écrivain et président du jury du concours de « texte magistral, d’une maturité extraordinaire ». Il sera bientôt publié chez une prestigieuse maison d’édition française. Pour lui, « la relève est là ». « D’autant plus que le livre primé a les qualités d’un roman déjà abouti. Cela montre la maîtrise de ces jeunes-là qui sont de véritables lecteurs, car beaucoup d’autres n’ont pas de culture littéraire et veulent devenir écrivains sans lire ». Le deuxième (2 000 euros) et le troisième prix (1 000 euros) ont été attribués respectivement au recueil de poèmes, Grain de paix, grain d’amour et à la nouvelle intitulée Le Joueur de Ludo.