Tom Sharpe, écrivain anglais qui a vécu en Afrique du Sud de 1951 à 1961, a une plume féroce et corrosive. Dans Outrage public à la pudeur, publié en 1973, c’est au système de l’Apartheid qu’il s’en prend. Avec un goût prononcé pour les personnages surréalistes et les situations insensées.
Piemburg, petite capitale afrikander du Zoulouland, vit au ryhtme tranquille de l’Apartheid. Les Blancs oppressent les Noirs, quoi de plus normal. Et la séparation des « races » est une évidence qui ne saurait être remise en cause. Seulement voilà, de plus en plus d’affaires concernant des « liaisons suspectes entre des officiers de police et des femmes bantoues » sont relayées par la presse. Le lieutenant Verkramp, zélé fonctionnaire de police, va tenter de corriger ces tendances « antisociales », avec l’aide d’une psychiatre néo-nazie et d’un dispositif diabolique.
Pendant ce temps, le commandant Van Heerden, chef de la police, fasciné par l’Empire britannique, parfait sa connaissance des Anglais qu’il avait déjà commencée dans Mêlée ouverte au Zoulouland, le premier tome de Tom Sharpe consacré à la satire de l’Apartheid. Dans Outrage public à la pudeur, l’écrivain anglais laisse son imagination débridée entraîner le lecteur dans une valse surréaliste et endiablée (à tous les sens du terme).
Futé et satirique
Tom Sharpe porte bien son nom. « Sharp » signifie « futé » en anglais et l’auteur est le roi des descriptions de situations insensées qui lui permettent de critiquer le régime d’Apartheid et de mettre en lumière ses incohérences. Né en 1928 en Angleterre, étudiant à Cambridge, enrôlé dans les Marines, il s’installe en 1951 en Afrique du Sud. Il y restera dix ans, tour à tour travailleur social, prof, et directeur d’un studio de photo. C’est d’ailleurs une photographie, pleine de détails, d’une idéologie absurde et dangereuse qu’il nous offre avec Outrage public à la pudeur. Une photographie dérangeante mais aussi pleine d’humour. Car Tom Sharpe, qui a reçu en 1986 le Grand Prix de l’humour noir pour l’ensemble de son œuvre, sait manier la satire comme pas deux.
Entre des attentats perpétrés par de faux communistes mais de vrais agents de police, une chasse à courre où le renard est remplacé par un forçat noir ou encore des autruches explosives, on frise le délire. Et, parfois, ça fait du bien.
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