On se souviendra de son nom. L’athlète sud-africain Oscar Pistorius amputé des deux pieds au niveau des tibias a marqué les esprits durant ces jeux de Londres en étant le premier sprinteur amputé à courir avec les valides. Celui qui estime ne pas être handicapé, ne rate jamais une occasion pour aller au bout de lui-même.
Un grand gaillard aux muscles saillants se tient là, debout sur la piste. Malgré ses deux pieds amputés au niveau des tibias et les prothèses en carbone qu’il porte, il ne mesure pas moins d’1m80. Il est ovationné de toute part car ce samedi soir, aux jeux paralympiques de Londres, Oscar Pistorius réalise un véritable exploit. L’athlète sud africain vient de remporter le 400m, loin devant ses concurrents. Le sprinter de 25 ans explose même le record du monde en courant en 46.68 secondes devant les Américains Blake Leeper (50.14) et David Prince (50.61). « Ces jeux Olympiques et Paralympiques ont vraiment eu un succès phénoménal et je pense que le monde voit enfin que le sport paralympique, c’est vraiment du haut niveau. Je voulais juste finir les Jeux en offrant aux spectateurs quelque chose qu’ils apprécient et qu’ils puissent emmener chez eux. » Pari réussi.
En conservant sa couronne sur 400m, Oscar Pistorius montre une fois de plus que c’est lui le patron. Une grande consolation suite à sa défaite au 100m et 200m face au Brésilien Alan Oliveira. Une défaite que le Sud-Africain ne digère pas. Il crée même la surprise en accusant ses adversaires sur 200m de porter des lames trop longues qui les avantagent, relançant ainsi le débat sur les supposés avantages que procurent les prothèses en carbone. Il s’excuse pour ses propos et le comité olympique renonce à le sanctionner.
Le premier athlète amputé à courir avec les valides
Malgré ce faux pas, Oscar Pistorius restera dans les annales pour avoir été le premier athlète amputé à avoir couru avec les valides aux jeux olympiques, même s’il a fallu plusieurs batailles en justice pour qu’il puisse réaliser cet objectif. Ses détracteurs arguant que ses prothèses carbones en forme de félin, d’où son surnom de « blade runner », lui donnent un avantage trop important par rapport à ses concurrents. Mais le sprinter ne se laisse pas faire facilement. « Je n’ai rien à prouver à personne. Je n’ai pas voulu courir avec les valides pour dépasser tout le monde mais pour aller au bout de moi-même. Je l’ai fait pour mon développement personnel. Mon seul objectif était de donner le meilleur de moi-même. »
Etre handicapé, Oscar Pistorius affirme ne pas savoir ce que c’est. Né sans péroné, il a du être amputé des deux pieds au niveau des tibias dès l’âge de 11 mois. « J’ai grandi en pensant que je n’étais pas handicapé. J’ai juste grandit en pensant que j’avais des prothèses ». C’est d’ailleurs d’un air amusé qu’il raconte cette anecdote : « Ma mère avait l’habitude de dire à mon frère Call et moi : « Call, mets tes chaussures et Oscar tu mets tes prothèses » ».
« J’ai grandi en faisant des courses de moto »
Il ne bénéficie pas d’un traitement de faveur, malgré son handicap, même s’il ne manque de rien grâce à un père propriétaire d’une mine. Il ne s’inscrit pas dans des établissements spécialisés et fait tout ce que ses camarades valides font. Etre amputé n’a en effet jamais représenté un obstacle pour le jeune homme, qui s’est très tôt adonné aux sports extrêmes, notamment grâce à son grand-frère très sportif, aux capacités physiques impressionnantes. « Il m’a poussé à devenir très physique, comme lui ». Passionné de courses à moto, Oscar Pistorius a « toujours été un sportif », dit-il. « J’adore la moto, j’ai grandi en faisant des courses de moto tout terrain ».
Le rugby. L’autre grande activité du jeune homme. Mais une sévère blessure au genou le contraint à tout arrêter. On lui conseille alors de faire de l’athlétisme, sport qu’il n’aimait pas du tout d’ailleurs. Il atterrit tout de même dans l’univers des sprinters de haut niveau grâce à un ami de son père, ingénieur en aéronautique, qui l’encourage et lui confectionne des prothèses adaptées. Très vite, il enchaîne les victoires. Il remporte le 100m à l’âge de 18 ans, lors de l’une de ses premières compétitions scolaires. Aux jeux paralympiques d’Athènes, il décroche la médaille d’or au 200m et le bronze au 100m.
Pistorius, icône de la mode
Bien qu’amputé, Oscar Pistorius ne craint pas le regard des autres. Néanmoins, le colosse au sourire facile est marqué par des souffrances. Le divorce de ses parents intervient dans sa vie très rapidement, alors qu’il n’a que sept ans. Sa mère le prend en charge avec sa petite sœur : « Ça ne changeait rien pour moi, mon père n’était jamais là, trop occupé dans les affaires ». Celle qui l’a mise au monde décède quelques années plus tard suite à un mauvais diagnostic. Il n’a pas non plus oublié les plaisanteries de mauvais goût de ses camarades au collège. « Parfois ils cachaient mes prothèses pendant la nuit et venaient me réveiller : Oscar debout ! ». En racontant ses déboires, il en rit aujourd’hui. Il n’est, en effet, pas du genre à s’apitoyer sur son sort.
Au contraire, toutes ces difficultés, l’ont façonné. L’homme a de multiples facettes. Il a réinvesti son argent. Efficacement. « Mon frère a su placer mon argent avec intelligence dans une compagnie d’organisation évènementielle », confie-t-il. En dehors des affaires, il gère aussi une fondation à but non lucratif qui fabrique des jambes artificielles. Son objectif, les rendre moins chères pour les victimes des mines anti-personnelles.
Oscar Pistorius n’est pas seulement sportif. Il est aussi artiste musicien et peintre. Encore plus étonnant, il est l’égérie de la prestigieuse marque de parfum, Thierry Mugler. « C’était vraiment une belle expérience, je me suis bien amusé en faisant les photos. Mais l’athlétisme reste ma première préoccupation, car c’est très important pour moi ». Belle revanche, pour celui qui ne s’est pas laissé marcher sur les pieds.
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