Contre toute attente, le Cameroun vient de se désister de l’organisation de la 12e édition de la Coupe du monde militaire de football féminin 2020. C’est une lettre du ministre délégué à la Présidence chargé de la Défense, Joseph Beti Assomo, qui a notifié la décision au président du Conseil international du sport militaire (CISM), Hen Blikman, celui-là même qui a reçu toutes les garanties des autorités camerounaises, à l’occasion d’une visite d’inspection dans le pays, il y a juste deux semaines. Ces volte-face dont le pays de Paul Biya est coutumier, s’agissant de l’organisation d’événements internationaux, appellent des questions.
L’événement qui est à sa douzième édition, la première qui doit se tenir en terre africaine, est prévue pour se dérouler du 20 juin au 7 juillet 2020. Le pays de Paul Biya s’était manifesté pour abriter ce rendez-vous sportif. Mais, coup de théâtre, une lettre signée du ministre camerounais en charge de la Défense, Joseph Beti Assomo, et en date du 30 janvier 2020, annonce le désistement du pays quant à l’organisation de cette compétition. Nous vous livrons ici la substance de la lettre :
« J’ai le regret de vous annoncer que le Cameroun se retire de l’organisation de cette compétition – la Coupe du monde militaire de football féminin 2020, ndlr – qui devrait se tenir du 20 juin au 7 juillet 2020 à Yaoundé.
En effet, les contraintes financières que nous imposent l’organisation du Championnat d’Afrique des Nations (CHAN) en avril 2020 et le rapprochement de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) en janvier 2021 au lieu de juin de la même année, ne nous permettent pas, en dépit de notre engagement et de notre enthousiasme, d’organiser sereinement cette compétition internationale.
Nous regrettons sincèrement les désagréments engendrés et restons fermement attachés aux idéaux de paix et de solidarité prônés par le CISM ».
Ce désistement intervient deux semaines après une visite d’inspection conduite par le président du CISM en personne, les 13 et 14 janvier 2020, pour s’enquérir du niveau de préparation du Cameroun. A cette occasion, les autorités camerounaises se montraient encore rassurantes. « Notre pays est très honoré par cette désignation. Une organisation solide, structurée et transversale intégrant plusieurs militaires a été mise sur pied à cet effet », déclarait alors Said Kamsouloum, secrétaire général du ministère de la Défense. A ces propos empreints d’assurance, Hen Blikman ne pouvait s’empêcher de répondre : « C’est la première fois que la compétition se déroule sur le continent africain. Nous savons que le Cameroun mettra tout en œuvre pour garantir le succès de cet évènement ».
Patatras ! Deux semaines seulement plus tard, c’est la volte-face. Il convient de rappeler que le Cameroun a manifesté son intérêt pour l’organisation de cette compétition depuis plusieurs mois, et une première visite d’une équipe du CISM conduite par le colonel nigérian, Abdulraheem Bello, avait déjà eu lieu du 9 au 11 avril 2019.
Un pays récidiviste
On se souvient encore de la CAN 2019 dont l’organisation avait dû être retirée au Cameroun pour être attribuée à l’Egypte, en raison des retards accusés à tous les niveaux du processus, que ce soit au plan des infrastructures sportives ou hôtelières ou encore des voies d’accès ; tout ceci alors que l’organisation de cette compétition continentale avait été notifiée au Cameroun depuis 2014. Pour permettre au pays de Paul Biya de se racheter, l’organisation de la CAN 2021, initialement attribuée à la Côte d’Ivoire, lui a été confiée. Là encore, tout ne marche pas comme sur des roulettes, des doutes persistent quant à la capacité réelle du Cameroun d’organiser la compétition la plus prestigieuse du continent.
C’est ce qui a d’ailleurs motivé la visite du président de la CAF et de son équipe au Cameroun, du 13 au 16 janvier dernier. Coïncidence pour coïncidence, la visite du président du CISM tombait au même moment. Ce spectacle désolant que le Cameroun offre chaque fois suscite moult interrogations. Si pour des événements qui doivent mettre le pays sous les feux de la rampe, on assiste à ces scénarii, qu’en est-il alors des affaires intérieures du pays ? Le Cameroun est-il gouverné ? Le navire camerounais a-t-il toujours un capitaine à bord ?
L’argument du bouleversement du calendrier de la CAN ramenée à janvier-février au lieu de juin-juillet ou encore des contraintes financières, avancé par le ministre camerounais de la Défense pour justifier le désistement du pays quant à l’organisation de la Coupe du monde militaire de football féminin 2020 manque de pertinence, puisque c’est pour permettre au pays de se racheter après l’échec de 2019 que l’organisation de cette nouvelle édition de la CAN lui a été attribuée. Mieux, le Cameroun a librement manifesté sa volonté d’organiser le mondial féminin militaire. La décision n’avait-elle pas été mûrie ? Les autorités camerounaises n’avaient-elles pas mesuré les capacités réelles du pays avant de manifester leur intérêt pour l’événement ? Ne dit-on pas que gouverner, c’est prévoir ?