Omar el-Béchir affiche sa confiance. Le président soudanais estime qu’il ne peut être atteint par le mandat d’arrêt lancé contre lui, mercredi, par la Cour pénale internationale (CPI). Dans cette affaire, il compte sur le soutien de l’Union Africaine (UA) réitéré, vendredi, et de ses partenaires économiques pour le sortir de l’impasse. Mais voilà, la procédure ne s’avère pas si facile à suspendre…
Le mandat d’arrêt lancé par la Cour pénale internationale (CPI) ? Le président soudanais n’en a que faire, dit-il. Il a prévenu, vendredi, qu’il ne changerait pas d’un iota la politique de son gouvernement. Au moins, les choses sont claires. Pourtant, Omar el-Béchir a demandé instamment, le même jour, l’expulsion d’ONG au Darfour, dans la région de l’ouest du Soudan, en proie à la guerre civile. Et ce, sans doute, pour bénéficier d’une plus grande marge de manœuvre pour mener sa campagne militaire et arrêter en toute impunité ses opposants. Pendant que le président fait le grand nettoyage dans son pays, l’Union Africaine (UA) se charge de l’administratif pour éviter, à l’un de ses riches membres, les désagréments d’une procédure.
La menace du Conseil de sécurité
L’UA a demandé, jeudi, au Conseil de sécurité des Nations unies d’interrompre l’action menée par la CPI à l’encontre d’Omar el-Béchir pour une durée de douze mois, renouvelable pendant trois ans (selon l’article 16 du Traité de Rome). Mais, rien n’est encore gagné. De l’avis de William Bourdon, avocat français au barreau de Paris et auteur de l’essai la cour pénale internationale-Le Statut de Rome : « seulement six Etats ont appelé à suspendre la procédure ». La majorité n’est pas atteinte et, dans ces circonstances, on voit mal comment Omar el-Béchir pourrait échapper à la CPI. Même si le président soudanais ne cesse de rappeler, à qui veut l’entendre, que la décision de la justice internationale n’a « aucune valeur » à ses yeux.
Le chef de l’Etat compte sur ses partenaires économiques pour éviter une possible arrestation. Mais ses alliés, auparavant voués à sa cause, prendront-ils le risque d’accueillir, sur leur sol, un chef d’Etat accusé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité ? Rien n’est moins sûr. Si un pays, qu’il fasse partie ou non du Traité de Rome, s’aventurait à servir de « terre d’asile » à Omar el-Béchir, il se verrait attribué par la CPI une note de non-coopération qui serait envoyée au Conseil de sécurité des Nations unies. Cette instance pourrait alors infliger des sanctions aux Etats complices.
L’ingérence de la CPI en question
Pour éviter que le Conseil de sécurité de l’Onu n’intervienne, la CPI exhorte les pays à la coopération. « On compte sur le Soudan pourqu’il nous remette Omar el-Béchir », indique la porte-parole de la CPI, Laurence Blairon, jointe par Afrik.com. Cependant, vendredi, et pour la troisième journée consécutive, des milliers de partisans du président soudanais ont manifesté contre le mandat d’arrêt. Aux cris d’« A bas les USA » !, « A bas la CPI », des manifestants se sont rassemblés à la sortie des mosquées dans plusieurs quartiers de la capitale. Derrière ces slogans, c’est la colère de la population face à l’ingérence de la CPI dans leur politique qui s’exprime. Une position contestée par Laurence Blairon qui rappelle que la Cour n’a pas agi « de son propre chef » et a répondu à la demande « d’autres pays africains et du Conseil de sécurité » qui souhaitaient « faire juger le président soudanais ».
Dans tous les cas, le processus d’arrestation risque de prendre du temps au même titre que le jugement du chef d’Etat. Après avoir été interpellé, Omar el Béchir devra passer devant plusieurs chambres avant d’être jugé par la CPI. Durant le procès, les victimes pourront s’exprimer. « Une première », précise Laurence Blairon.
En attendant, Omar el-Béchir affiche, en apparence, un certain désintérêt concernant son mandat d’arrêt. La CPI, le Conseil de sécurité de l’ONU ne semblent pas l’atteindre. Le président n’entend pas s’arrêter et compte même prolonger sa politique répressive…
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