A huit jours de l’élection présidentielle américaine, Barack Obama et Mitt Romney sont au coude à coude dans les sondages. La campagne a été suspendue ce lundi 29 octobre à cause de l’Ouragan Sandy qui frappe le Nord-Est des Etats-Unis. A Paris, les partisans des deux camps, démocrate et républicain, relèvent les points forts de leur champion et espèrent sa victoire le 6 novembre prochain, le jour du scrutin. Amy K. Greene, spécialiste de la politique américaine et auteure du livre L’Amérique après Obama, dépeint une campagne centrée sur la forme plutôt que sur le fond.
Selon un sondage exclusif CSA/Direct Matin, réalisé par Internet les 23 et 24 octobre 2012, les Français plébiscitent Barack Obama. Le président démocrate sortant est crédité de 67% de suffrages contre 28% pour son concurrent républicain, Mitt Romney. Malheureusement pour lui, cette Obamania ne bénéficiera pas à l’occupant actuel de la Maison-Blanche, les Français ne votant bien entendu pas à cette élection.
Les pronostics se font désirer
Aux Etats-Unis, les deux candidats à la magistrature suprême sont au coude à coude dans les sondages. Et les observateurs ne s’aventurent pas à des pronostics approximatifs. « Pour la première fois depuis un certain temps, l’élection présidentielle américaine est indécise. Tout se jouera par rapport aux états clés, la mobilisation des électeurs et à la participation au vote le jour J », analyse pour Afrik.com, Amy K. Greene, spécialiste de la politique américaine et auteure du livre L’Amérique après Obama.
Même prudence du côté des partisans parisiens de Mitt Romney et de Barack Obama. A la question, « quel est votre pronostic ? », Flint John, un Américain féru de politique et fan de Barack Obama, rétorque « Aucune idée. Personne ne peut le dire, ça va être extrêmement serré. J’espère que ce sera lui (le président sortant, ndlr). Mais, je ne mettrais pas de l’argent la-dessus ». L’incertitude est aussi présente dans le camp républicain. « Le résultat sera simple. Si les électeurs se disent que Obama est sympa, il parle bien, c’est sûr il gagnera. Par contre, s’ils se concentrent sur le programme, Romney l’emportera. Il (le candidat républicain, ndlr) n’est absolument pas un politicien. En 2004, il s’est porté candidat car il pensait que c’était nécessaire », nous confie Pierre Toullec, président du Comité Mitt Romney France.
Plus de forme que de fond
Barack Obama a, tout au long de la campagne électorale, essayé de défendre son bilan tandis que Mitt Romney a cherché à s’assurer une étoffe de présidentiable ; le candidat républicain a longtemps était moqué pour son inexpérience notamment en matière de politique étrangère. D’où l’étendue des électeurs indécis. D’autres raisons expliquent cette difficulté pour les Américains de faire leur choix.
Cette année, « la campagne présidentielle a plus porté sur les questions de division entre les groupes de population. Les thèmes transversaux ont été délaissés. Par rapport à 2008, les publicités ont été nettement plus agressives et négatives », indique Amy K. Greene, auteur du livre L’Amérique après Obama. Jusqu’à septembre-octobre, Barack Obama et Mitt Romney ont plus mis en exergue les détails […] « C’est tellement serré qu’ils essayent de marquer leur différence par rapport à l’autre en vendant une vision de la société américaine et non en se basant sur les chiffres précis ou détails importants de leur programme », ajoute la spécialiste de la politique américaine. « Par exemple, c’est une élection qui porte sur l’économie, mais ils se sont concentrés sur une conception globale », conclut-elle.
Sur le manque d’importance accordée aux programmes, les partisans démocrates et républicains se renvoient, tour à tour, la balle. « Les thèmes n’ont pas été suffisamment abordés, par exemple la politique étrangère, la question de la dette, ou encore le rôle des Etats-Unis dans la globalisation. Il aurait fallu plus approfondir ces questions. Je regrette le rôle de l’argent dans cette présidentielle. Ce qui est malsain pour une démocratie, même si ce n’est pas le propre des Etats-Unis », déplore Flint John.
Les reproches fusent également du côté du Comité Mitt Romney France. « Mitt Romney mène une campagne structurée, avec un message fort, programme clair. En somme, qui déconstruit les programmes phares de Barack Obama », signale Pierre Toullec, le président du groupe de soutien. Et de railler les belles paroles du président démocrate sortant « Obama n’était pas prêt à débattre, il a gagné (les débats 2 et 3) du point de vue rhétorique. Or Romney s’est concentré sur les solutions ».
Une attaque remise en cause par Flint John : « Romney manque d’expérience sur les thèmes concernant la politique étrangère. Ce qui est primordial pour un président des Etats-Unis. Et, sa politique économique est destinée à bénéficier aux couches les plus riches de la société, ainsi qu’à agrandir la disparité entre les plus riches et les plus démunis. C’est dangereux pour le pays ! »
Les trois débats n’ont rien changé
Mitt Romney a gagné le premier débat télévisé qui l’a opposé à Barack Obama. Même si le président-candidat est sorti vainqueur des deux autres confrontations, Amy K. Green pense que l’effet dans les enquêtes d’opinion de ces trois duels est à relativiser.
Ce qui est intéressant à constater, c’est le consensus sur les résultats de ces débats. « Mitt Romney a gagné le premier débat, et Barack Obama s’est imposé lors des deux autres confrontations. Mais ces face-à-face n’ont pas changé la précarité dans les sondages », constate l’auteure du livre L’Amérique après Obama. « Romney a rattrapé son retard sur le plan national, mais c’est extrêmement serré. Personne n’a réussi à créer une dynamique de fond », poursuit la spécialiste de la politique américaine. Et de conclure : « C’était plus une confrontation sur le style que sur le fond. Romney a réussi à changer d’image, passant de l’oligarque au centre. Et Obama, qui était absent du premier débat, a ensuite créé une image pour séduire les électeurs démocrates et républicains indécis ».
La campagne électorale américaine a été suspendue ce lundi 29 octobre à cause des pluies torrentielles, provoquées par l’Ouragan Sandy, qui s’abattent sur les côtes Nord-Est des Etats-Unis. Cet imprévu ne devrait pas empêcher le scrutin de se dérouler le 6 novembre. Que Barack Obama ou Mitt Romney devienne le nouveau président des Etats-Unis, deux idéologies (celle du repli-conservateur des Babyboomers de l’après Seconde Guerre mondiale opposée à celle progressiste des jeunes de 8 à 30 ans) s’affronteront, selon Amy K. Greene, les années qui viennent pour imposer leur vision de la société américaine.
Le lire d’Amy K. Green est disponible en cliquant ici