Nord-Kivu : que faut-il attendre du nouveau gouverneur militaire ?


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Evariste Kakule Somo, nouveau gouverneur militaire du Nord-Kivu
Evariste Kakule Somo, nouveau gouverneur militaire du Nord-Kivu

Le général-major Évariste Kakule Somo a officiellement pris ses fonctions en tant que gouverneur militaire du Nord-Kivu ce vendredi 31 janvier 2025. La cérémonie d’installation s’est tenue dans la ville de Beni, où il a établi temporairement son quartier général. A quoi faut-il véritablement s’attendre avec le successeur de Peter Cirimwami ?

Évariste Kakule Somo succède à son frère d’armes, le général-major Peter Cirimwami, décédé, selon les autorités militaires, des suites de ses blessures après une attaque perpétrée par les rebelles du M23 près de Goma. Le général-major Évariste Kakule Somo  devient ainsi le troisième gouverneur militaire à diriger la province sous l’état de siège. Vendredi, il est officiellement entré en fonction et a temporairement pris ses quartiers à Beni avant de rejoindre plus tard, espère-t-il, le chef-lieu de la province, Goma, actuellement entre les mains des rebelles du M23 et de leurs soutiens, les soldats rwandais.

Un appel à la mobilisation pour reconquérir les territoires occupés

Le nouveau gouverneur du Nord-Kivu prend son rôle très au sérieux. Cela se comprend bien au regard du drame qui se joue dans la province. Sa détermination est perceptible dans le discours qu’il a prononcé à son entrée en fonction. Evariste Kakule Somo , qui s’est voulu rassurant, a exhorté les forces armées, les volontaires pour la défense de la patrie (VDP), les Wazalendo, à ne pas céder au désespoir. Il les a encouragés à faire de la situation actuelle un levier pour reconquérir les zones occupées par le M23, soutenu par l’armée rwandaise. « Mon bureau se trouve à Goma, je vais m’y installer dès que possible. J’invite les officiers, les soldats ainsi que les patriotes Wazalendo à ne pas céder au désespoir, mais à utiliser la situation actuelle comme base arrière pour reconquérir les espaces occupés », a-t-il déclaré.

Le gouverneur a également appelé à la solidarité nationale et à l’implication des provinces voisines ainsi que du gouvernement central pour appuyer les efforts de pacification du Nord-Kivu. « Une partie de notre chère province est occupée par le Rwanda. Cette situation renforce notre résistance et notre détermination de reconquérir et restaurer l’autorité de l’État dans ces zones soumises aujourd’hui à un régime barbare, de terreur et de non-Etat », a déclaré le général.

Pour lui, l’heure de la riposte a sonné : « Nous avons une mission de bouter l’ennemi dehors […] J’accepte de relever ce défi ensemble avec ma population, avec la détermination des vaillants combattants des FARDC et des Wazalendo. La flamme de la résistance congolaise ne doit plus jamais s’éteindre et ne s’éteindra jamais. Nous avons donc choisi de nous battre pour notre dignité, pour notre souveraineté et la riposte sera à la taille de la provocation qui n’a que trop duré », a-t-il martelé.

Après les beaux discours, le temps de l’action

Le discours d’entrée en fonction du général-major Evariste Kakule Somo est taillé sur mesure pour la circonstance. Car l’heure est grave, et il fallait remobiliser les troupes. Surtout avec les dernières vagues de redditions des FARDC. Mais, une chose que le général doit savoir mieux que tout le monde, c’est qu’entre les discours et la réalité de la guerre sur le terrain, il y a un fossé. Il faudra sans doute beaucoup plus que les mots pour faire bouger les lignes sur le terrain. Non seulement, il faudra doter les soldats de l’arsenal adéquat, mais il faudra également déployer sur le terrain la stratégie la plus efficace face à un ennemi apparemment déterminé à occuper le plus d’espace possible sur le territoire congolais.

Les défis qui attendent le nouveau gouverneur sont immenses. Le général-major Evariste Kakule Somo prend les rênes de la province dans un contexte sécuritaire extrêmement préoccupant. Sur les six territoires du Nord-Kivu, cinq sont affectés par les actions du M23, rendant la situation d’autant plus complexe. La population locale attend des actions concrètes en faveur de la reconquête des zones sous contrôle des rebelles.

Outre la menace du M23, la province est également confrontée à l’activisme des ADF dans les territoires de Beni et de Lubero. Ce groupe armé, affilié à l’État islamique, continue de semer la terreur dans la région. La population appelle donc le gouverneur à prendre des mesures fermes pour endiguer ces violences. Les habitants de Beni et des autres localités du Nord-Kivu espèrent que le nouveau gouverneur ne se contentera pas d’une approche administrative mais qu’il adoptera une stratégie militaire efficace.

Les populations gardent l’espoir

La véritable attente des populations du Nord-Kivu, c’est la reconquête des localités passées sous le contrôle des rebelles. Elles attendent du général-major Evariste Somo Kakule qu’il fasse mieux que ces deux prédécesseurs militaires qui n’ont pas pu empêcher l’avancée du M23 dans la province.

Le général-major Evariste Kakule Somo entame donc son mandat avec des attentes élevées et la lourde responsabilité de restaurer la paix et l’autorité de l’État dans une province ravagée par les conflits. Sa capacité à mobiliser les forces armées et à coordonner les efforts de pacification sera déterminante pour l’avenir du Nord-Kivu.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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