A l’occasion de la première édition de Nollywoodweek organisée à Paris, dans la capitale française, jeudi 30 mai, pour la promotion du cinéma nigérian, voire africain en Europe, Afrik.com est allé à la rencontre d’un personnage atypique. Danseur, acteur, producteur de film et auteur, Qudus Onikeku, directeur artistique de Nollywood à Paris, est à l’image du self-made man nigérian. Un long parcours artistique, difficile, jalonné d’embûches, qui a finalement porté ses fruits. Portrait d’un homme qui ne manque pas d’humour.
« Je suis un homme curieux. Je déteste l’injustice et je prône l’équité ». Une description personnelle d’un homme qui affirme n’être parti de rien. Mais de rien, il devient, au fil des ans grâce à son amour incommensurable pour l’art, un homme digne de respect.
« Curieux et distrait » sont les premiers mots qui sortent de la bouche de ceux qui voudraient décrire Qudus Onikeku. L’art n’est pas un intrus dans sa vie. Qudus déclare avoir embrassé sa passion tout jeune, à l’âge de 13 ans. « Je n’ai pas choisi l’art, mais c’est l’art qui m’a appelé. J’ai entendu la voix de l’art qui m’appelait quand j’avais 13 ans. Je ne pouvais pas résister ».
Il commence sa carrière d’abord comme danseur, avant de s’incruster dans le monde du théâtre à l’âge de 16 ans. Ses premiers balbutiements dans le 7ème art démarrent au début des années 2000. A cette époque, Qudus était encore un jeune écolier. Une étape difficile de sa vie, qui a failli lui coûter le rejet de ses parents. Mais le jeune homme tient bon. « Mes parents ne prenaient pas les choses au sérieux quand j’ai commencé à faire du théâtre. Ils pensaient que c’étaient juste des moments de folie et que ça allait très vite s’arrêter ». Et d’ajouter d’un ton sarcastique, doublé d’un large sourire ricaneur. « Lorsque j’ai commencé à apporter de l’argent à la maison grâce au théâtre, là ils ont senti que les choses devenaient de plus en plus sérieuses ».
Soudain, Qudus s’arrêta de parler. Le regard rivé sur un jeune couple qui entretenait une petite conversation juste en face de lui. Comme dans ses vieilles habitudes de curieux, ne voulant que rien ne lui échappe, il poursuivit : « Mais bon c’est comme ça. Dans la vie, il faut avoir des rêves ».
Des rêves, Qudus n’en a jamais manqués. Peut-être là, le fruit de sa réussite artistique. Danseur, auteur, acteur, producteur … le jeune Yoruba aura connu tous les goûts d’un univers artistique qui est aujourd’hui devenu sa deuxième famille.
Une deuxième famille qui ne l’a jamais empêché de s’attacher aux valeurs spirituelles qui lui ont été transmises par ses parents.
« La spiritualité est très importante pour moi. Elle est même plus importante que la religion. Et j’avoue que l’art m’a plus rapproché de cette spiritualité, contrairement à d’autres artistes. Je suis né avec cette spiritualité. Mes parents m’ont éduqué dans ce monde-là. Elle est extrêmement importante pour moi ».
Une spiritualité qui l’a certainement éloigné de la vie matérialiste dont rêvent bon nombre d’artistes contemporains. Quand on lui demande s’il est riche, il rétorque d’un ton assez narquois, le regard jeté sur deux de ses amis à qui la question faisait rigoler: « je préfère les valeurs à l’argent. L’argent est certes important. Mais il ne règle pas tout. Je préfère l’abondance de valeurs (humaines, sociales) à la richesse. Quand tu as des amis sur qui tu peux compter dans les moments les plus difficiles, cela vaut mieux que la richesse elle-même. Il y a des gens qui sont riches, mais qui ne sont pas heureux ».
Quand on lui demande les conseils qu’il prodiguerait à des milliers de jeunes africains rêvant de devenir artiste, Qudus cogite un bon moment avant de lancer : « Qu’ils y croient. Ils doivent y croire, que les gens aiment ce qu’ils font ou pas. Les gens auront toujours quelque chose à dire. Mais c’est la confiance et la détermination qui font la différence ».
Du haut de ses 1,65 mètres (environ), il se leva brusquement de sa chaise pour faire un clin d’œil à un de ses compatriotes producteurs nigérians venu assister à l’ouverture de la cérémonie. Quelques mots échangés en langue Yoruba, puis le jeune homme s’installe à nouveau. Un autre moment de délire pour ses deux amis d’à-côté qui le prennent toujours pour un grand farceur, même quand il n’est pas sur scène. Qudus regarde sa montre comme pour nous dire qu’il en avait assez des questions. Peut-être ne savait-il pas que l’interview était déjà terminée.