Au Nigeria, l’incarcération de mineurs accusés de « trahison » pour leur participation à des manifestations soulève des inquiétudes quant au respect des droits de l’enfant.
Depuis août, ces enfants sont retenus en détention, et les images récemment diffusées de leur comparaison devant la justice montrent des signes apparents de mauvais traitements. Cette affaire est devenue un sujet brûlant, opposant les autorités fédérales à des personnalités et des organisations civiles. Le gouverneur de Kano, Abba Yusuf, s’est exprimé publiquement en faveur de la libération de ces jeunes, tandis que la ministre des Affaires féminines, Imaan Suleiman Ibrahim, a visité ces détenus pour apaiser la situation. Pourtant, la question demeure : pourquoi le Nigeria continue-t-il à emprisonner ces mineurs, en violation des conventions internationales sur les droits des enfants ?
Le contexte : Une répression controversée
Le mouvement Endbadgovernance est né du mécontentement général face à la gouvernance et à la gestion des affaires publiques au Nigeria. Les manifestations, principalement pacifiques, ont rassemblé de nombreux jeunes, dont certains sont mineurs. Cependant, le gouvernement nigérian a rapidement interprété ces actions comme une menace pour la stabilité du pays, conduisant à des arrestations massives et à l’inculpation de plusieurs manifestants, y compris des mineurs, pour des faits de « trahison ». Depuis leur incarcération, des voix s’élèvent pour dénoncer cette répression jugée excessive et inappropriée pour des enfants.
La situation a pris une nouvelle tournure lorsqu’une vidéo montrant ces mineurs au tribunal a fait le tour des réseaux sociaux. Les images, dans lesquelles les enfants apparaissant avec des signes visibles de mauvais traitement, ont choqué l’opinion publique et amplifié la mobilisation en faveur de leur libération. Le gouvernement fédéral, sous la pression de cette tempête médiatique, a réagi en voyant des émissaires, dont la ministre des Affaires féminines, pour évaluer la situation et calmer les esprits.
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Le gouverneur de Kano appelle à la libération des enfants
Le gouverneur de l’État de Kano, Abba Yusuf, a pris position en faveur de ces mineurs, demandant publiquement leur libération et leur rapatriement dans leur État d’origine. Ce soutien inattendu du gouverneur à mis le gouvernement fédéral dans une position délicate, d’autant que la Constitution nigériane limite le pouvoir des gouverneurs d’État en matière de décisions judiciaires fédérales. Par ce geste, Yusuf défie l’autorité fédérale, marquant ainsi son désaccord avec la manière dont l’affaire est gérée au niveau national.
En réaction aux critiques, le ministre de la Justice, Lateef Fagbemi, aurait demandé le transfert du dossier des mineurs à son ministère, présentant ainsi une volonté apparente de réévaluer les chefs d’accusation. Cette initiative témoigne de la pression croissante exercée sur le gouvernement de Bola Ahmed Tinubu pour trouver un enjeu à cette crise qui attache l’image du pays. La visite du ministre Imaan Suleiman Ibrahim auprès des enfants détenus, largement médiatisée, est également perçue comme une tentative de rassurer l’opinion publique.
Les organisations de la société civile en alerte
Malgré les gestes d’apaisement, de nombreuses organisations de défense des droits de l’enfant et des droits humains continuent de dénoncer la détention prolongée et les conditions de traitement des mineurs. Elles rappellent que le Nigeria est signataire de plusieurs traités internationaux protégeant les droits des enfants, et s’interrogent sur la légitimité de ces arrestations. Pour elles, l’incarcération de ces jeunes est une violation directe de ces engagements internationaux et une attaque contre les droits fondamentaux des enfants.