Les autorités nigérianes ont commencé à identifier les parents des 105 enfants retrouvés entassés dans un camion à la mi-janvier, des enfants qu’elles soupçonnent d’être destinés à la mendicité ou au travail domestique alors que leurs parents les avaient confiés à des étrangers, qui avaient promis de les nourrir et de les scolariser.
Les enfants, tous des garçons âgés de quatre à 18 ans, venaient de Kano, un Etat du nord, et avaient été conduits dans une localité proche d’Abuja, la capitale politique du Nigeria, où le camion qui les transportait a été intercepté par la police à un point de contrôle, le 17 janvier. « L’état dans lequel se trouvaient les enfants a fait penser à la police qu’il s’agissait d’un trafic d’enfants destinés à la mendicité et au travail domestique », a expliqué à IRIN Orakwue Arinze, porte-parole de l’Agence nationale contre le trafic d’êtres humains (NAPTIP).
« Les enfants étaient serrés comme des sardines dans un camion censé transporter des marchandises et qui ne pouvait contenir que 15 personnes maximum », a ajouté M. Arinze. Selon la NAPTIP, les enfants, traumatisés, étaient affamés et avaient les pieds enflés.
Les quatre hommes appréhendés par la police ont affirmé qu’ils amenaient les enfants dans une école de Suleja, 400 kilomètres plus au nord, dans l’Etat du Niger, pour leur apprendre le Coran. Selon la NAPTIP, si ces hommes sont reconnus coupables de trafic d’êtres humains, ils pourraient être condamnés à une peine maximale de 14 années de prison.
À l’échelle mondiale, le trafic d’enfants est l’un des crimes organisés les plus prospères ; il fait environ 1,2 million de victimes par an, dont 32 pour cent d’Africains, selon le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF).
D’après la NAPTIP, les enfants étaient tous originaires du village de Kuru, à 80 kilomètres au sud de Kano.« Les parents ne savaient pas qu’ils commettaient un acte répréhensible. Il n’y a pas d’école dans la région », a expliqué Ahmed Mohammed Bello, qui dirige les bureaux de la NAPTIP à Kano, au cours d’un entretien téléphonique accordé à IRIN. « Ils ont décidé d’envoyer leurs enfants à Suleja parce qu’ils avaient entendu dire qu’il avait plu dans la région, ce qui aurait permis aux enfants de travailler le matin dans les champs pour se nourrir, et d’aller l’après-midi à l’école coranique », a-t-il poursuivi.
Difficile de chiffrer le nombre de vixctimes
Selon M. Bello, le manque d’éducation et la pauvreté qui règne dans la région expliquent la décision des parents de faire partir leurs enfants.
Il est difficile de savoir combien d’enfants sont victimes du trafic d’êtres humains au Nigeria, compte tenu du caractère illégal de cette activité. Toutefois, étant donné que 50 à 70 pour cent de la population du Nigeria vit avec moins d’un dollar par jour, le trafic d’êtres humains y serait très répandu.
Selon la NAPTIP, en octobre 2007, la police nigériane a intercepté 57 enfants, que des trafiquants avaient amenés de l’Etat de Cross River (Sud) à Lagos, la capitale économique.
Selon une étude nationale réalisée en 2003 par l’Organisation internationale du travail, chaque année, quelque six millions d’enfants nigérians risquent d’être victimes de différentes formes de trafic d’êtres humains (travail domestique ou forcé, prostitution et pornographie).
« Le fait est que dès que ces enfants sont sortis de leurs communautés, ils sont dépouillés par des gens mal intentionnés, maltraités et battus facilement », a regretté M. Arinze de la NAPTIP. La NAPTIP a été créée en 2003 pour faire respecter la nouvelle loi d’alors interdisant toute forme de trafic d’êtres humains.
Photo: Lea-Lisa Westerhoff/IRIN : Ruth, 13 ans, fait ses devoirs de maison. De cinq à neuf ans, elle a été privée d’école et a dû vendre de l’eau dans un marché au Gabon, victime du trafic d’enfants au Nigeria (Abuja, Nigeria – Novembre 2007)