Des nouveaux cas du virus pathogène H5N1 de la grippe aviaire ont été détectés ce week-end en Egypte. Deux semaines après sa découverte pour la première fois en au Nigeria, l’Egypte devient ainsi officiellement le deuxième pays touché par l’épidémie en Afrique. Le risque de propagation du virus sur toute la région semble réel et inquiète les autorités africaines et les agences des Nations Unies.
Par Vitraulle Mboungou
L’Afrique est en alerte rouge depuis la découverte des nouveaux cas du virus pathogène de la grippe aviaire en Egypte, deuxième pays sur le continent à être officiellement touché en quelques semaines. Les services vétérinaires égyptiens ont annoncé le 17 février dernier, la contamination par le virus H5N1 d’une vingtaine de volailles originaires de provinces de Kena et de Beni Suef au sud du Caire, et de Dakahlia dans le delta du Nil. Le gouvernement a immédiatement pris les mesures nécessaires pour éviter toute propagation du virus dans le pays selon le ministère de la Santé qui serait sur le point de déclarer l’état d’urgence. Il a ainsi interdit la vente et l’abattage de volailles dans les marchés, une pratique très courante dans le pays.
L’arrivée de la grippe aviaire a provoqué un véritable vent de panique dans le pays, notamment en ville. Beaucoup de citadins ont effectivement l’habitude d’élever des poulets ou des pigeons dans leur maison ou sur leur toit pour leur consommation personnelle ou pour avoir une source de revenu supplémentaire. Un responsable du Comité national suprême pour l’éradication de la grippe aviaire a ainsi déclaré à la presse, que « les animaux infectés proviennent de fermes privées et non industrielles », en particulier les élevages domestiques. Le gouvernement aurait donc mis en place une campagne de sensibilisation pour inciter les Egyptiens à mettre fin à cette pratique.
Le Nigeria tout comme l’Egypte, et même plus encore, doit faire face à la propagation de l’épidémie de la grippe aviaire. Plus d’une semaine après avoir annoncé la présence du virus mortel du H5N1 dans le nord du pays ( dans les Etats de Kano, de Kaduna et du Plateau , le ministre nigérian de l’Information, Frank Nweke, vient de confirmer la découverte de quatre nouveaux foyers de contamination, à Bauchi, Zamfara, Katsina (dans le Nord) et dans le territoire de la capitale fédérale Abuja, portant ainsi à sept le nombre de foyers d’infection. Depuis l’annonce de ces premières contaminations le 8 février dernier, des dizaines de milliers de volailles ont été abattues, incinérées et enterrées pour tenter de circonscrire la maladie. Ces nouveaux cas de grippe aviaire interviennent alors que les autorités nigérianes et les responsables des organisations internationales font le point sur l’avancée de la maladie et l’efficacité des mesures de lutte mises en place.
Surveiller l’extension de la maladie pour mieux la contrôler
Selon le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), il est extrêmement important de surveiller l’extension de cette maladie pour pouvoir mettre en place tous les moyens nécessaires afin de l’endiguer dès qu’elle apparaît. Le cas du Nigeria doit servir de leçon, car selon les experts des agences des Nations Unies, si le foyer initial n’avait pas été contrôlé aussi tardivement (plus d’une dizaine de jours) par rapport à la suspicion, le virus ne se serait pas propagé aussi rapidement aux autres exploitations. Depuis la découverte de nouveaux foyers en Egypte, les autorités africaines et les organisations internationales craignent une extension rapide sur l’ensemble du continent. Une extension qui créerait un vaste foyer extrêmement difficile à éliminer.
Les agences régionales des Nations Unies et des bailleurs de fonds se sont donc dernièrement réunies à Dakar pour discuter de l’impact régional de la crise de la grippe aviaire en Afrique. L’Unicef, la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation) et le Pam (Programme alimentaire mondial) ont présenté leurs plans d’actions respectifs pour lutter contre l’épidémie. Elles ont proposé de multiplier les sites de prélèvements d’oiseaux sauvages, d’intensifier les formations et d’organiser les activités de recherche permettant de mieux comprendre comment la maladie est introduite, comment elle se diffuse, comment elle se pérennise et enfin quel est son impact socio-économique. Concrètement, les pays doivent selon elles, renforcer leur surveillance épidémiologique et leurs moyens de contrôle. Ils doivent aussi améliorer la qualité des services médicaux et vétérinaires pour permettre la mise en place rapide de contrôles efficaces.
Nigeria : une situation alarmante ?
« La situation au Nigeria est loin d’être sous contrôle et les risques de propagation à l’ensemble du continent sont réels », indique le rapport fourni par l’équipe technique de l’Organisation mondiale de la Santé animale (Oie) et de la FAO sur la situation de l’épidémie de grippe aviaire dans ce pays. Selon l’équipe des deux agences présentes depuis deux semaines, les mesures de protection, de confinement des volailles, de non circulation des volailles, etc…ne sont pas respectées, ce qui fait craindre le pire quant à l’évolution de cette maladie au Nigeria et plus généralement en Afrique. Ces agences reconnaissent cependant que le Nigeria dispose de personnels techniques suffisants pour mettre en place les mesures nécessaires et lancer une campagne de vaccination si cela devenait nécessaire. Elle a également rencontré le Président Obsanjo pour évoquer avec lui, outre ces mesures de prévention et de protection, la mise en place de mesures financières en compensation de la perte de volailles par les Nigérians. En effet, faute de compensation, beaucoup seraient tenté de ne pas signaler des cas de volailles touchées, par peur de se retrouver complètement démunis.
Les appréhensions de ces agences et des autorités africaines sont d’autant plus fortes que le Nigeria est l’un des pays situés sur la voie Mer Noire-Méditérannée, que suivent certains oiseaux migrateurs mis en cause. « Les services de santé humaine et de santé animale doivent être constamment en alerte, échanger leurs informations et signaler rapidement tout signe de maladie chez l’oiseau ou chez l’homme qui évoque la grippe aviaire H5N1 », a indiqué le directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le Dr Lee Jong-Wook. Le président du groupe de la Banque africaine de développement (Bad), Donald Kaberuka, a quant à lui, affirmé que « la Banque travaillait avec les autres agences de développement pour apporter l’appui nécessaire aux efforts régionaux tendant à endiguer la maladie».