Orano suspend sa production d’uranium à Arlit, Niger, suite à la fermeture des frontières par la junte au pouvoir.
Le géant français de l’uranium, Orano, se voit contraint de suspendre sa production sur son site d’Arlit au Niger à partir du 31 octobre 2024. Cette décision, annoncée après des mois de tensions avec les nouvelles autorités nigériennes, marque une nouvelle étape dans la réorientation des relations économiques entre le Niger et la France, alors que la junte au pouvoir cherche à affirmer sa souveraineté sur les ressources naturelles du pays.
La fermeture des frontières : un obstacle insurmontable
Depuis le coup d’État de juillet 2023, le Niger a fermé ses frontières avec le Bénin, principal point de transit pour les exportations d’uranium vers l’international. Ce blocage a paralysé Orano, qui n’a pas pu exporter ses stocks de 1 050 tonnes de concentré d’uranium, d’une valeur estimée à 300 millions d’euros. Malgré plusieurs tentatives pour débloquer la situation, notamment des propositions d’exportation aérienne, aucune solution n’a pu être trouvée. Les autorités nigérianes restent fermes, refusant de rouvrir les frontières ou d’accepter les propositions d’Orano.
Cette suspension s’inscrit dans le cadre d’une politique plus large de réappropriation des ressources naturelles par le gouvernement de transition nigérien. Après avoir expulsé les militaires français et le personnel diplomatique, la junte a multiplié les partenariats avec des puissances comme la Russie et l’Iran, tout en créant une nouvelle société d’État pour la gestion de l’uranium. La décision de suspendre les activités d’Orano, bien qu’économiquement difficile pour le Niger, symbolise une volonté forte de reprendre le contrôle des richesses nationales.
Les conséquences sociales et environnementales
La mise à l’arrêt du site d’Arlit ne se fait pas sans conséquences pour la population locale. Les 780 employés d’Orano et leurs sous-traitants, majoritairement nigériens, sont directement touchés par cette décision. Bien que la société ait annoncé qu’elle continuerait à les rémunérer jusqu’à la fin de l’année, l’incertitude demeure quant à leur avenir. Par ailleurs, des organisations locales de la société civile, comme la CRESCA et le ROTAB, ont exprimé leurs inquiétudes concernant la gestion des déchets radioactifs et la dépollution des nappes phréatiques, demandant des garanties solides pour éviter un désastre environnemental.
Un revers stratégique pour la France
Pour Orano, la suspension de la production au Niger représente un coup dur. En plus des pertes financières directes, entraînées à 133 millions d’euros pour le premier semestre 2024, cette décision compromet l’approvisionnement en uranium de la France, historiquement dépendante des ressources nigériennes. Bien que le groupe tente de minimiser l’impact en misant sur ses autres sources d’approvisionnement au Canada et au Kazakhstan, ce revirement stratégique du Niger pourrait affecter à long terme les relations franco-nigériennes.