Chose promise, chose due. Le Niger a été suspendu mercredi par la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) à la suite du maintien des élections législatives dans le pays. Mardi, six millions d’électeurs se sont ainsi rendus aux urnes pour élire les députés. En dépit des critiques, Mamadou Tandja, le président nigérien s’accroche au pouvoir et ne compte pas céder sa place.
« Le peuple nigérien a montré son refus catégorique de soutenir Mamadou Tandja. C’est une abstention totale et massive », a lancé mercredi à Afrik.com Issifou Sidibé, membre de l’opposition. Selon les estimations du secrétaire générale de la Confédération démocratique des travailleurs du Niger, le taux de participation lors des élections législatives de mardi se situerait en dessous de 5%. Un boycott « plus important que lors du référendum du 4 août dernier ». Les résultats officiels sont attendus pour la fin de la semaine.
La Cédéao sanctionne le Niger
Au vu du maintien de ce vote très controversé, la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a décidé de ne pas reconnaître les élections et de suspendre le Niger de ses instances. Une décision qui pourrait à long terme avoir des effets néfastes pour le pays. « Elle jette le discrédit sur le Niger, l’un des pays fondateurs de l’organisation et qui a dirigé pendant deux mandats consécutifs la Cédéao. Et plus grave encore, elle risque d’asphyxier l’économie nigérienne », explique Issifou Sidibé. En tant que membre de la Cédéao, le Niger bénéficie d’avantages économiques comme le dédouanement. Il entretient d’autre part des relations commerciales importantes avec les pays du bloc régional et, notamment, avec le Nigeria qui lui fournit de l’électricité.
« A long terme, les produits provenant des ports de Cotonou au Bénin, ou de Lomé au Togo, ne pourront plus être acheminés vers le Niger », précise Ali Idrissa, le directeur adjoint de la chaîne privée Dounia TV. Cette sanction de la Cédéao « coûte cher » à la population nigérienne. Les conditions de vie déjà difficiles pourraient se détériorer dans un pays qui a le plus faible indice de développement humain au monde, selon le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). « Les Nigériens sont pris en otage. Déjà, cette décision de l’organisation leur interdit de voyager librement. C’est un problème car beaucoup de personnes travaillent et vivent au Nigeria, le pays voisin », confie le journaliste.
Le président nigérien sur la sellette
Malgré cet état de fait, Mamadou Tandja est resté inflexible et a maintenu le scrutin. Une attitude que le président en exercice de la Cédéao, le Nigérian Umaru Yar’Adua « regrette ». « La tenue de ces élections s’est faite au mépris total des chefs d’Etat et de gouvernement de la Cédéao et témoigne de la volonté manifeste des autorités nigériennes de poursuivre dans la voie de l’illégalité constitutionnelle qui prévaut actuellement », développe-t-il dans un communiqué publié mardi soir. De son côté, le gouvernement nigérien se veut rassurant. « Pour nous c’est un malentendu provisoire entre le Niger et cette organisation que nous respectons beaucoup. (…) Nous pensons que très bientôt cette organisation comprendra le bien-fondé de notre démarche », a indiqué sur RFI, mercredi, Moctar Kassoum, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement.
Pourtant, la position des autorités nigériennes est loin de faire l’unanimité. Après la Cédéao et l’Union européenne qui prévoit de suspendre la coopération communautaire, c’est au tour de Washington d’agiter le drapeau rouge. Les Etats-Unis ont exhorté le bloc régional à imposer des sanctions contre le Niger. L’étau semble se resserrer sur Mamadou Tandja qui pourrait voir son rêve de briguer un troisième mandat s’envoler.