Depuis hier, et ceci pour 48 heures, les chefs des armées de la CEDEAO sont en conclave à Accra. Au menu, toujours la question de l’intervention militaire au Niger autour du bras de fer entre putschistes nigériens et CEDEAO. Face à tout cela, quelle est la position de Mohamed Bazoum lui-même ?
L’intervention militaire au Niger qu’agite la CEDEAO, depuis le coup d’État du 26 juillet, ne fait pas l’unanimité en Afrique. C’est le moins qu’on puisse dire. Au-delà des populations dont l’opposition à une telle opération ne souffre d’aucun doute, la plus grande organisation à l’échelle continentale, l’Union Africaine, n’est pas non plus en phase avec la CEDEAO. Même au sein de cette dernière, l’unanimité ne s’observe pas. Par exemple, le Cap-Vert a boycotté la rencontre des chefs d’état-major en cours à Accra pour se désolidariser de la décision d’intervenir militairement. Mais dans tout ce tintamarre, on n’entend pas le Président Bazoum. Lui qui est retenu prisonnier dans le sous-sol de la résidence présidentielle depuis bientôt un mois. Et qui refuse de démissionner.
À quoi continue de s’accrocher Mohamed Bazoum ?
Mohamed Bazoum continue de s’accrocher. Mais, à quoi, pourrait-on légitimement se demander ? Le Président déchu pense-t-il que la CEDEAO est effectivement en mesure de restaurer son pouvoir par la force comme elle veut le faire croire ? Une intervention militaire de la CEDEAO déstabiliserait, à coup sûr, une sous-région déjà mise à mal par des années de djihadisme. Cela a été déjà dit et redit. Seuls les chefs d’État d’Afrique de l’Ouest semblent ne pas voir cette vérité de La Palice. La CEDEAO, elle-même, survivrait-elle à une telle action ?
Au-delà de ces questions plus générales, qu’en est-il de Mohamed Bazoum lui-même, encore aux mains de ses tombeurs ? Qu’en est-il de sa sécurité personnelle en cas d’attaque de la CEDEAO ? On a déjà entendu dire, dans le camp des militaires, qu’ils n’hésiteront pas à le tuer. Difficile, en effet, d’imaginer comment la CEDEAO compte extraire le Président déchu des mains de ses détenteurs.
Le prix à payer par les civils dans l’opération militaire
D’un autre point de vue, en imaginant même que l’intervention réussisse et que Mohamed Bazoum est réhabilité comme président de la République – ce qui est bien évidemment très improbable –, comment compte-t-il diriger le pays, puisqu’il aura perdu toute légitimité et distillera même auprès de ses compatriotes l’image d’un Président fantoche installé par des forces étrangères ? Mieux, qui assurera désormais sa sécurité, puisque les militaires censés le faire sont en désaccord avec lui ? La CEDEAO maintiendra-t-elle un contingent sur place pour s’en occuper ? Et pendant combien de temps ?
Enfin, quel prix paieront les populations civiles nigériennes dans cette opération militaire ? On sait qu’il n’y a pas d’intervention militaire sans dégâts collatéraux. Et nous mettons au défi les chefs militaires de la CEDEAO qui veulent conduire l’intervention de nous prouver comment ils procéderont pour ne pas faire de victimes innocentes au sein des populations civiles. Surtout qu’il, est fait d’opérations de recrutements de membres de la société civile pour appuyer l’armée en cas d’assaut militaire.
Mohamed Bazoum devrait démissionner, tout simplement
Au regard de tous ces questionnements, la meilleure attitude à laquelle on devrait s’attendre de la part de Mohamed Bazoum serait de démissionner, tout simplement. Et de tenter de dissuader ses anciens collègues chefs d’État dans leur élan. Il y va de sa propre sécurité, de celle de ses compatriotes. Et bien sûr de celle de toutes les populations ouest-africaines.