Au Niger, une controverse majeure agite le paysage médiatique. Les autorités ont placé Seyni Amadou, rédacteur en chef de la chaîne privée Canal 3 Niger, en garde à vue depuis le samedi 18 janvier 2025. Cette décision fait suite à la diffusion d’un baromètre qui évaluait les performances des ministres. C’est une pratique pourtant courante pour le média.
Dans un contexte où la liberté de la presse est de plus en plus fragilisée, cette affaire suscite à la fois indignation et interrogations.
Une suspension qui ressemble à une sanction
Pour commencer, le ministre de la Communication, Mohamed Raliou, a suspendu la chaîne Canal 3 Niger pour un mois. Parallèlement, il a retiré la carte professionnelle de Seyni Amadou pour une durée de trois mois. En appliquant ces sanctions immédiatement, les autorités se sont appuyées sur la loi de 2012 relative à la régulation des médias. Cependant, elles n’ont pas clairement expliqué les motifs de cette décision. Un choix qui laisse place aux spéculations sur une volonté de réduire au silence une presse critique.
En effet, le « baromètre des ministres », publié le 16 janvier 2025, a classé les membres du gouvernement en fonction de leurs performances. Ce classement a placé Ali Mahamane Lamine Zene, ministre de l’Économie, en tête. Bien que cette initiative journalistique soit répandue dans de nombreux pays, elle semble néanmoins avoir dérangé les autorités. Certes, aucun lien direct n’a été officiellement confirmé, mais le malaise au sommet de l’État reste perceptible.
Réactions et indignation dans les milieux médiatiques
Sans surprise, la suspension de Canal 3 et la sanction infligée à son rédacteur en chef ont provoqué une vive réaction des défenseurs de la liberté de la presse. Par exemple, Ali Idrissa Nani, président du Réseau des Radios et Télévisions du Niger, a fermement dénoncé cette mesure. Il la considère comme un « abus de pouvoir« . Il souligne également que seul le Conseil Supérieur de la Communication (CSC) possède l’autorité nécessaire pour fermer un média. Or, le gouvernement a mis cette institution en veilleuse depuis le début de la transition militaire.
De son côté, Sadibou Marong, représentant de Reporters Sans Frontières, a condamné ces actions comme une attaque frontale contre la liberté d’expression. Selon lui, aucun média ne devrait subir des sanctions pour avoir critiqué des personnalités publiques car celles-ci doivent des comptes au peuple.
Une liberté de la presse en danger
Cette affaire illustre les tensions croissantes qui entourent les médias au Niger. Les autorités, sous prétexte de régulation, se dotent de pouvoirs démesurés pour restreindre la liberté d’expression. En contraignant Canal 3 à suspendre ses activités, elles alimentent un climat de censure. Pendant ce temps, de nombreuses voix s’élèvent pour réclamer un retour à la légalité et une meilleure protection des droits fondamentaux.