Le groupe nucléaire français et le gouvernement nigérien ont signé, lundi, une convention octroyant à Areva le droit d’exploiter le gisement d’uranium d’Imouraren, le plus grand, de toute l’Afrique. Un projet qui devrait démarrer en 2012 et permettre au Niger de se placer au deuxième rang mondial des producteurs. Toutes ces bonnes perspectives laissent, tout de même, certains Nigériens sceptiques.
Il s’agirait du plus grand projet industriel minier jamais envisagé au Niger, selon Areva. Le groupe nucléaire français vient de se voir attribuer un permis d’exploitation de la mine d’Imouraren, le plus grand gisement d’uranium de toute l’Afrique. Anne Lauvergeon, la présidente du directoire du groupe nucléaire français a conclu, lundi, avec le gouvernement nigérien une convention dans ce sens.
Selon les termes de cet accord, une société d’exploitation va être créée et sera détenue à 66,65 % par le groupe français et à 33,35% par le Niger. Un peu plus de 1,2 milliard d’euros (800 milliards de francs CFA) seront débloqués pour le lancement de ce projet d’Imouraren.
La nouvelle compagnie devrait démarrer ses activités en 2012, avec une production annuelle estimée, à terme, à 5 000 tonnes pendant plus de 35 ans. Et l’Etat nigérien pourra extraire et commercialiser 33,35% de cette production par le biais de la société du Patrimoine des Mines du Niger (SOPAMIN).
Le Niger, actuellement troisième producteur mondial d’uranium, passera ainsi au deuxième rang de ce classement, indique le communiqué officiel publié par le groupe français. La création de près de 1 400 emplois directs et de 3 375 postes indirects, pour une masse salariale de 20 milliards de francs CFA, sont, en outre, attendues selon le gouvernement nigérien. Voila de quoi satisfaire les citoyens. Mais certains d’entre eux restent perplexes. Car « il y a beaucoup de non-dits dans cet accord », estime Ali Idrissa, le coordinateur national du réseau des organisations pour la transparence et l’analyse budgétaire (ROTAB) au Niger.
Silence sur le projet d’un chemin de fer reliant Imouraren à Cotonou
« Rien n’a été dit sur le projet de chemin de fer devant relier les sites d’extraction au port de Cotonou en passant entre autres, par Agadez et Zender… . », indique M. Idrissa qui est également le représentant de l’Ong Publiez ce que vous Payez dans son pays. Le financement de ce projet constituait l’un des préalables posés par le Niger avant l’octroi d’un permis d’exploitation au groupe français. Selon Moussa Souley, directeur en charge de la communication et du développement durable chez Areva Niger, la convention telle qu’elle est signée n’engage pas clairement le groupe Areva sur un tel projet. « Mais, affirme-t-il, c’est un sujet qui reste une préoccupation pour Areva et qui va revenir sur la table de discussion. Il pourra éventuellement inclure d’autres partenaires étrangers. »
« Il est évident que le Niger à fait plus de concession que le groupe Areva », estime Seidik Abba, journaliste nigérien à Paris. Il se pose des questions sur les raisons qui auraient poussées le gouvernement nigérien à accepter de disposer de 33, 35% du capital de la société d’exploitation au lieu de 40 % comme il le souhaitait initialement. Mamadou Tandja en fin de son second et dernier mandat et qui apparemment voudrait briguer un autre, aura-t-il fait un deal avec Paris pour bénéficier de son soutien ? Seidik Abba ne croit pas trop en cette hypothèse mais ne l’écarte pas complètement. Moussa Souley, lui, affirme que la répartition actuelle du capital pourrait être renégociée ultérieurement.
Quoi qu’il en soit, au Niger, des interrogations demeurent sur les motivations de Mamadou Tandja qui, pourtant a mis fin au contrat d’exclusivité qui régissait l’exploitation de l’uranium au Niger depuis l’indépendance du pays. Et qui a réussi à obtenir une revalorisation de 50% du prix d’achat de l’uranium en janvier 2008, en mettant en concurrence le groupe français à d’autres acteurs du marché notamment des chinois et des canadiens. Son fléchissement inquiète d’autant plus que l’actuel président du Niger n’a pas hésité à expulser, en juillet 2007, le directeur général d’Areva Niger, Dominique Pin, soupçonné de soutenir la rébellion Touareg.
Face au scepticisme de certains Nigériens, l’optimisme domine du côté d’Areva et du gouvernement : « Le projet d’Imouraren permettra au Niger de faire parler de lui et d’accroître ses ressources », estime Moussa Souley, le directeur en charge de la communication et du développement durable chez Areva Niger. Même si en quarante ans d’exploitation de ce minerai au Niger, la population de ce pays reste l’une des plus pauvres au monde.