Nicolas Sarkozy a achevé, mercredi, sa visite de trois jours au Royaume chérifien de Mohammed VI. L’occasion de revenir sur cette rencontre jalonnée de signatures de fructueux contrats, et où les sujets gênants pour l’une comme pour l’autre partie ont été soigneusement évités.
Au cours de sa visite au Maroc
, le chef d’Etat français, Nicolas Sarkozy, et son homologue marocain, Mohamed VI, ont signé une dizaine d’accords de coopération dans plusieurs domaines, notamment sur un protocole pour la fourniture et la construction d’un train à grande vitesse (TGV) entre Casablanca et Tanger. TGV qui devrait être mis en service en 2013.
Selon les premières estimations, le coût total de cet accord s’élève à 1,8 milliard d’euros. Dans cette affaire, le PDG d’Alstom, Patrik Kron, l’un des 70 patrons qui accompagnaient M. Sarkozy lors de son déplacement, n’a pas été lésé. Le groupe Alstom fournira au Maroc 20 locomotives pour un coût de 74 millions d’euros.
Un second accord important, d’un montant de 200 millions d’euros, a été signé. Il porte sur le domaine de l’électricité, avec une participation à l’équipement d’une future centrale. Par ailleurs, un protocole d’accord a été paraphé entre la société française spécialisée dans la production d’énergie nucléaire Areva et l’Office chérifien des phosphates (OCP) pour l’extraction de l’uranium de l’acide phosphatique marocain.
Durant ces trois jours, la France aura signé pour 3 milliards d’euros de contrats.
Un bilan qui ne fait que confirmer la place de la coopération économique comme le trait d’union entre la France et le Maroc. A ce propos, la ministre française de l’Economie Christine Lagarde a souligné l’importance des relations économiques entre les deux pays. « Le fait que nous soyons venus si nombreux autour du président de la République qui a choisi de faire du Maroc sa première grande visite d’Etat prouve bien l’importance que nous accordons, d’abord et avant tout, à l’amitié franco-marocaine, mais aussi à la profondeur des liens économiques qui unissent le Maroc et la France, les hommes et les femmes d’affaires des deux pays », a déclaré la ministre, citée par l’agence de presse marocaine MAP. La France est le premier partenaire commercial du royaume.
La visite de M. Sarkozy au Maroc a également été marquée par le discours qu’il a prononcé mardi au palais Marshan à Tanger, dans lequel il a appelé à un sommet des chefs d’Etat des pays riverains de la Méditerranée pour juin 2008 en France sur son projet d’Union méditerranéenne, précisant qu’il s’agira de jeter les bases d’une « union politique, économique et culturelle fondée sur le principe d’égalité stricte entre les nations » de l’espace méditerranéen.
Un petit bémol, cependant, vient ternir ce partenariat économique. La France n’a pas réussi à placer ses avions de combat français Rafale. Le Maroc a préféré acheter des chasseurs bombardiers américains F16.
Quand la presse s’en mêle, le client est roi
Durant ces trois jours, la presse marocaine a écumé les gros titres sur Nicolas Sarkozy. Le Matin du Sahara, habitué à relater les moindre faits et gestes du roi Mohammed VI, s’est mis à « l’heure Sarko » pour suivre le président français. Il titre le 24 octobre « Chaleureux échange de toasts au dîner officiel offert par le souverain en l’honneur du Président français », une manière d’anticiper ce que pourraient dire les journalistes de la presse indépendante sur les véritables enjeux de cette visite.
Toute la presse marocaine revient longuement sur les contrats signés. L’Economiste fait les louanges du TGV et du nucléaire civil dans un article intitulé « Le Maroc passe à la vitesse supérieure ». Pour le premier quotidien économique marocain, cette visite d’Etat aura été un véritable « jackpot pour les industriels français ».
La presse du royaume évoque à peine les cinq mandats d’arrêts internationaux, signés lundi par la juge française Ramël contre de hauts responsables suspectés d’êtres impliqués dans la disparition de Medhi Ben Barka. Sur cette affaire, le gouvernement français n’est pas plus loquace. La ministre de la justice, Rachida Dati, qui accompagnait Nicolas Sarkozy au Maroc, n’a d’ailleurs fait aucun commentaire.
Soutien au plan marocain pour le Sahara occidental
Les déclarations de Nicolas Sarkozy sur le Sahara Occidental ont, par contre, fait les choux gras de la presse algérienne. Le président français, qui a estimé que le plan marocain pour ce territoire était « sérieux et crédible », a pris ainsi le risque de froisser l’Algérie qui soutient Le Front Polisario (appelé aussi le Front de libération du peuple sahraoui). Ce dernier rejette le plan d’autonomie proposé par le Maroc pour l’ancienne colonie espagnole annexée par Rabat en 1975.
Les propos du président français remettent en cause la position de l’ONU, qui a appelé en avril dernier le Maroc, « puissance occupante », et le Polisario à négocier l’avenir du territoire en vue de parvenir à l’autodétermination des Sahraouis.
Selon le Quotidien d’Oran, le gouvernement de la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD) a estimé qu’au moment ou le Conseil de sécurité de l’ONU cherchait à aider les deux parties à aller de l’avant, les déclarations du président français étaient « graves » et qu’elles constituaient « un encouragement à l’intransigeance et un alignement sur la position de l’occupant marocain ».
Au cours de leur rencontre, Nicolas Sarkozy et Mohamed VI ont évité d’aborder les sujets délicats de la liberté de la presse au Maroc et de la loi sur l’immigration en France, bizness oblige.
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