« L’Apprentissage » : N comme Neige. Un livre délicieux sur Internet, sous forme d’abécédaire, pour dire en 100 mots comment la France adopte ses enfants de migrants. « Lettres persanes » d’aujourd’hui qui seraient écrites par une enfant de migrants, petit manifeste sur la double identité culturelle des Français d’origine étrangère, l’initiative de la journaliste/auteur Nadia Khouri-Dagher a séduit Afrik.com qui a décidé de vous offrir deux mots par semaine. A savourer, en attendant la parution du livre….
De A comme Accent à Z comme Zut, en passant par H comme Hammam ou N comme nostalgie, 100 mots pour un livre : L’apprentissage ou « comment la France adopte ses enfants de migrants ». Une oeuvre que la journaliste/auteur Nadia Khouri-Dagher a choisi de publier d’abord sur Internet. Un abécédaire savoureux qu’Afrik a décidé de distiller en ligne, pour un grand rendez-vous hebdomadaire. Une autre manière d’appréhender la littérature… |
N
Neige
Retour abécédaire
Pour l’équipe de La Burle, randonneurs en Ardèche
Randonnée itinérante en montagne ardéchoise en hiver, 6 heures de marche par jour en raquettes dans la neige, – 5 à –10° en moyenne, et jusqu’à – 25° quand le vent souffle sur ces hauts plateaux dénudés. Moi, Méditerranéenne, passionnée de mer bleue de soleil et de plage, je viens de passer une semaine de vacances épatantes.
Je m’en étonne moi-même: j’aime aujourd’hui ces paysages de montagnes enneigées, les sapins vert et blanc, et le froid vif qui rougit le visage et donne de la force à tout le corps. Si je vivais ailleurs, je crois que j’aurais besoin de la neige, du froid intense, de temps en temps, comme un Parisien a besoin d’aller voir la mer une fois par an.
Moi qui n’ai eu longtemps qu’une passion exclusive pour le bleu de la mer, unique paysage cher à mon cœur, avec les ans passés en France j’ai appris à aimer, et pas seulement à apprécier, d’autres paysages qui ne sont pas ceux de mes origines, comme ce paysage de montagne en hiver.
La couleur bleue que j’aime tant, ce bleu à la fois pâle et intense, presque turquoise, que je ne trouvais jadis que dans les cieux et les eaux de Méditerranée, je l’ai retrouvé aujourd’hui, en fin d’après midi, dans le ciel très pur au-dessus des montagnes, enhardi par le rose du soleil déclinant, beauté absolue dont je n’ai détaché le regard qu’avec la nuit venue.
La neige, et tous les rituels de l’ambiance montagnarde – liqueurs de châtaigne ou d’abricot qu’on déguste à une halte, saucissons parfumés qu’on dévore à midi, chocolat chaud qui réchauffe au retour de balade, vins puissants qui animent les soirées: ces rites aussi, et cette atmosphère, m’appartiennent désormais.
Adopter les hivers d’Europe, pour un émigrant venu du Sud, c’est la preuve ultime que l’on s’est adapté à l’Europe. Qu’on l’a adoptée.