L’Adversité, un allié. C’est ainsi que Moustapha Thiam définit ce terme. Natif de Niombato, un village dans le Sine Saloum au Sénégal, Moustapha s’est donné les moyens de réussir en croyant à ses rêves. Aujourd’hui il souhaite montrer à la jeunesse africaine que tout est possible si on s’en donne les moyens. Son ouvrage l’Adversité, Mon Alliée, sorti le 6 février 2021, retrace sa vie jalonnée d’épreuves et d’enseignements. Afrik.com est allée à la rencontre de ce jeune Sénégalais brillant qui souhaite conscientiser la jeunesse africaine.
Parcourir 7 km pour aller à l’école n’est pas une chose qui va arrêter Moustapha Thiam. Déterminé à réussir dès son plus jeune âge, Moustapha s’est toujours fixé des objectifs et a tout fait pour les atteindre. Même un serpent n’a pas eu raison de lui. Après avoir passé une partie de ses études au Sénégal, Moustapha s’envole pour la France afin d’y finir son parcours scolaire. Titulaire d’un Master grande école et d’une thèse MBA en ressources humaines à Paris, Moustapha a travaillé pour les plus grands groupes comme Manpower, Randstad, Business & Decision ou encore Neurone IT. A la tête de son entreprise Exigence IT qui est un cabinet de conseil en recrutement, Moustapha s’est lancé dans l’écriture de son ouvrage qu’il considère être un cadeau à la jeunesse africaine.
AFRIK.COM : Issu d’un village du Sine Saloum au Sénégal, pourquoi avez-vous toujours voulu venir en France ?
Moustapha Thiam : « Avion ! Avion ! Je veux partir avec toi ! ». Venir en France était un rêve d’enfance car j’étais dans un petit village de 150 âmes où il n’y avait pas beaucoup de possibilités. Les conditions de vie étaient vraiment très difficiles. J’ai vu tout mon entourage et les gens du village traverser beaucoup de difficultés notamment pour faire des études, cela m’a beaucoup marqué. C’est à ce moment-là que l’adversité a fait partie de ma vie. Je considère qu’il y a deux types d’adversité : celle que l’on a subie que je qualifie par le fait d’être dans un petit village sans eau ni électricité sans oublier les 7 km pour aller à l’école et celle qui est provoquée. Lorsque l’adversité est subie, elle relève de la résilience. La seule raison qui m’a poussé à sortir de mon village, ce sont les études, une quête de savoir. Lorsque l’adversité est provoquée : elle relève alors du challenge, de la motivation personnelle. J’ai subi l’adversité mais je l’ai aussi provoquée. Tout ce que tu dois combattre doit devenir ton alliée.
Quel est l’impact des paroles de vos parents, particulièrement celle de votre père sur votre parcours ?
En termes de motivation, je pense qu’il y en a deux. La motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque. J’ai eu la chance d’avoir un mentor, un ami, un confident, une personne qui m’a forgé, depuis ma naissance, qui m’a légué beaucoup de valeurs en terme de savoir-faire, savoir vivre et savoir être. Chaque fois, je remercie le bon Dieu d’avoir eu de tels parents qui s’assument malgré les conditions, qui se donnent à fond, qui sacrifient leurs vies pour la réussite de leurs enfants. J’ai beaucoup de frères et sœurs. Malgré cela, mon père a fait un choix sur moi en me disant que je dois faire de longues études. Cela m’a donné des responsabilités et une prise de conscience. Mon père m’a dit : « Moustapha j’ai investi sur toi ». Je le vois comme une dette vis-à-vis de ma famille. C’est pourquoi je dis dans mon ouvrage que réussir n’est pas une question d’obligation, mais c’est un impératif. Je suis le fils du peuple, d’un villageois et qui mieux que moi peut comprendre le peuple.
Durant mon enfance, sur le chemin de l’école, un serpent m’a mordu. J’ai alors remis en cause mes études. C’était sans compter sur l’avis de mon père qui m’a dit que c’est une décision égoïste car tu ne le fait pas pour toi mais pour ta communauté, pour ton impact dans le futur concernant ta vie professionnelle. « La réussite n’aura pas de sens si tu n’arrives pas à impacter sur la vie des autres », me disait sans cesse mon père. Pour mon père, toujours, tu peux réussir. Papa m’a rendu plus fort à travers tout ce parcours. C’est quelqu’un qui aime donner et partager.
Vous avez sorti, le 6 février dernier, votre livre, que va-t-il apporter à la jeunesse africaine ?
En écrivant ce livre, mon but c’était de transmettre du savoir. Mais aussi de partager mon savoir-faire, mon vécu et surtout mon expérience. En partageant mon expérience, mon but est de conscientiser la jeunesse africaine et de lui faire comprendre qu’aujourd’hui la réussite n’appartient à personne. Chaque personne a ce devoir de réussir, la possibilité de réussir tout ce qu’il veut entreprendre. Le chemin a été très long pour moi, mais c’est grâce à l’abnégation, au travail, à l’adversité que j’ai réussi à franchir toutes ces étapes. L’avenir de notre continent repose sur la jeunesse, elle doit prendre ses responsabilités en s’engageant dans la vie politique et publique. L’Afrique, c’est l’espoir du monde. Malheureusement, aujourd’hui, la jeunesse manque d’éducation orientée côté numérique et industries ainsi que des guides. J’ai écrit le livre pour dire à tous ces jeunes, il est temps. L’heure n’est plus à la parole, mais à l’action. C’est par le travail que l’on va développer notre continent. J’ai indexé les gouvernements du continent à s’attacher à l’esprit entrepreneuriale des jeunes. Tous ces grand héros tels que Nelson Mandela, Cheikh Anta Diop, Léopold Sédar Senghor, Kwame Nkrumah, Thomas Sankara ont joué leur partition, ont risqué leur vie pour nous. L’Afrique a tout pour réussir et prendre son envol.
En quoi votre parcours va impacter sur la vie et surtout l’avenir des jeunes en Afrique ?
A la lecture de mon histoire , je veux que chacun retienne qu’il est le seul maître de son destin. Et ce, peu importe d’où il vient, peu importe les conditions de vie, la pauvreté. On n’a pas le droit de pleurnicher. Il faut se battre pour construire un avenir avec courage, espoir et surtout amour. Ce livre va permettre à cette jeunesse d’avoir une vision, un chemin clair parce que ce livre retrace le chemin d’un villageois parti de rien et qui s’est battu pour réussir. C’est une réussite collective. Ce n’est pas juste un livre qui retrace mon histoire, mais c’est un ouvrage de développement personnel. Je veux que ce livre soit enseigné dans toutes les écoles en Afrique. C’est ce qui va permettre aux jeunes de prendre conscience que la réussite est possible. C’est important d’étudier pour comprendre.
Comme je le dis dans mon livre, «… il faut que la jeunesse soit consciente qu’elle est l’unique bâtisseur de l’avenir de ce continent, qu’elle est l’avenir de l’Afrique, que le pari du développement économique du continent repose sur ses frêles mais solides épaules. Qu’elle appréhende enfin le développement, non pas selon la logique du « Ce que l’Etat doit faire pour moi, mais plutôt ce que je dois apporter à l’Etat ».
L’entrepreneuriat est-elle la seule solution aux maux de la jeunesse africaine ?
Oui, car il va permettre à l’Afrique de prendre son envol. Entreprendre c’est prendre des risques, investir et s’investir. Si vous n’avez pas de travail…
il faut en créer. L’entrepreneuriat c’est répondre à une problématique, trouver des solutions. Dans un continent où il y a des problèmes, tout le monde doit entreprendre. Il n’y a pas d’âge pour entreprendre ou être millionnaire. L’entreprenariat, pour moi, est le remède au chômage des jeunes. On n’investit pas sur les jeunes, il faut des formations qui collent aux réalités du marché. Il faut digitaliser le système éducatif. 40% de la population active en Afrique est composé de jeunes, le taux de chômage de cette population est le double de celui des adultes. Il faut que les gouvernements jouent leurs rôles. Le chômage touche de plein fouet la jeunesse africaine. Je pense que l’entrepreneuriat est la seule solution miracle. Si vous ne pouvez pas trouver de l’emploi, alors il faut en créer.
Vous êtes le président fondateur du Mouvement Solidaire pour le développement de l’Afrique (MSDA), par quels moyens passent le développement du continent ?
Le MSDA a démarré au Sénégal. Désormais, on est présent dans plus de 25 pays en Afrique. On accompagne les jeunes sur des thématiques liées à l’emploi et l’entrepreneuriat. Notre credo est entreprendre solidairement, agir localement. Dans chaque pays, on a un coordinateur qui pilote chaque cellule. Il est temps d’agir.
Pour moi, le développement de l’Afrique passe par la jeunesse, sinon l’Afrique sera toujours dépendante. Cela passe par une bonne éducation des enfants dans de bonnes conditions. On pourra ainsi parier sur un avenir sûr pour le continent. La jeunesse a besoin d’être formée, éduquée, d’avoir des responsabilités. On a besoin de jeunes qui créent et innovent. Tout le monde doit accéder à l’éducation. L’école doit être obligatoire pour tous les enfants en Afrique. Il faut, avant tout, une indépendance intellectuelle avant de parler d’indépendance financière. Le développement est une prise de conscience. Quel que soit ton statut social, tu as un rôle à jouer.
Vous avez créé votre propre entreprise Exigences IT, écrit votre ouvrage. Quels sont vos projets à venir ?
Exigences IT est un cabinet de conseil en recrutement dédié à l’accompagnement de l’efficience IT ( Information Technology) Digitale, nous recrutons des cadres et dirigeants en France et en Afrique. Je pense que l’expertise métier appropriée au succès des grands comptes et des ETI ( Entreprises de Tailles Intermédiaires) doit également être accompagnée de conseils et d’assistance spécifiques. A travers Exigences IT, je valorise le capital humain de mes équipes au service du bien-être des candidats et de la performance de nos entreprises clientes.
Je souhaite désormais que Exigences IT soit implanté un peu partout en Afrique. Je veux accompagner la jeunesse africaine dans son insertion professionnelle. Sur le plan digital, nous avons deux applications : une application pour la santé et une autre application pour l’éducation. C’est un système éducatif, digitalisé que l’on compte mettre en place afin que l’Afrique prenne son envol.