Momo avait 14 ans lorsqu’il est devenu le plus jeune bachelier de France. L’Ivoirien a quitté sa terre natale, après bien des péripéties, spécialement pour passer son diplôme dans l’Hexagone. Il raconte, avec humour, lucidité et maturité, sa grande aventure dans un livre : Moi, Momo, 14 ans, ivoirien… et plus jeune bachelier de France.
« J’examine mes notes. 16 en math, 16 en physique et 8 en bio. 8 en histoire, 8 en philo ainsi qu’en anglais et en allemand. 11 en français, à l’écrit comme à l’oral. » En voyant ses notes du bac, Mohamed Diaby a été envahi d’une joie contenue. « J’ai mon bac, mais pour moi, la mention était aussi importante », explique-t-il dans son livre Moi, Momo, 14 ans, ivoirien… et plus jeune bachelier de France, écrit en collaboration avec Damien Albessard. Un peu déçu, mais il est tout de même entré dans l’histoire de l’Hexagone ! Et pour cela, il a dû cravacher et faire des sacrifices.
Le premier a été de quitter sa famille et sa Côte d’Ivoire natale. Momo a poussé son premier cri le 7 mai 1990. Mariamou et Bakary, ses parents, n’avaient jusqu’alors eu que des filles : Adjara, Tina, Amy, Dousse, Saly, Kadi. Ils auront après Mohamed un autre garçon, Bouba. Mais Amy et Tina décéderont, respectivement à 16 et 21 ans, d’une forme grave de drépanocytose, une maladie génétique du sang très répandue en Afrique. Le petit Dioula, une ethnie du pays, mène une enfance assez calme dans le quartier abidjanais de Yopougon.
Il saute trois classes au primaire
Très tôt, ses facultés pointent. Il manifeste un intérêt particulier pour la langue française, que Richard, le mari français de sa sœur Adjara, se fait un plaisir de lui apprendre. Et à quatre ans, il parle un peu français. Son père, prenant compte de son potentiel, décide de le scolariser. Déjà, Mohamed a troqué le jeu saute-mouton, contre celui de saute-classe. Il passe en CP1, sans passer par la case maternelle. Il saute ensuite le CP2 et le CM1 avant de décrocher son diplôme de certificat d’études. Il entre ensuite au lycée moderne privé Sépi de Yopougon, qui assure les classes de la 6e à la terminale, et … saute la cinquième.
C’est lorsqu’il suit les cours du lycée que son père décide de l’envoyer en France, pays où il a étudié et où il s’est marié. « Cette idée me plaît. Je vais avoir la chance de découvrir un pays que je ne connais pas. Pour le moment, cette perspective atténue un peu mes appréhensions. Ma soif de nouveauté l’emporte sur la crainte d’être séparé de ma famille », confie Mohamed. Mais, des appréhensions, il en aura de nombreuses avant de s’envoler vers la France. Les démarches à remplir sont longues, décourageantes, infinies, sans compter la recherche d’un lycée. Une tâche à laquelle se sont attelés Richard et Adjara.
La France ressemble un peu à la Côte d’Ivoire
Pour justifier leur refus, tel établissement explique être plein, tel autre indique que Momo est trop précoce ou que les inscriptions sont bouclées. Au lycée Stanislas, la secrétaire du proviseur a expliqué à Richard que « les élèves africains étaient surnotés dans leur pays d’origine et qu’une fois en France, ils étaient fatalement moins bons. Richard, qui avait enseigné là-bas, essaya de la convaincre du contraire. En vain », relate Momo. Adjara finalement trouve l’établissement privé Massillon, dans le 4e arrondissement de Paris. Les formalités du dossier et du visa sont remplies in extremis. Reste plus qu’à se dire au revoir et à décoller pour la France.
L’acclimatation n’est pas facile, mais Momo prend vite ses marques. D’autant plus qu’il trouve quelques similitudes entre le quartier parisien de Barbès-Rochechouart et celui d’Abobo. En vacances près d’Aix-en-Provence, il trouve que « les marchés français ressemblent un peu aux marchés ivoiriens. Les gens crient, tout le monde se bouscule. Les stands sont colorés et variés, on y trouve toute sorte de denrées : du poisson, de la viande, des légumes… Le choix est vaste et, bien que les prix soient beaucoup plus intéressants que dans les supermarchés, j’entends des personnes qui marchandent. Ce doit être un principe sur les marchés, ainsi les gens ont sans doute l’impression de se retrouver un peu en Afrique… J’aime ce genre d’ambiances ».
Révisions stratégiques
Au lycée, où il raconte son histoire, il se lie d’amitié avec Pierre, Afchine et Mathias. Avec les deux premiers, il apprendra même quelques mouvements de hip-hop. Il met les bouchées doubles pour rattraper son retard. Il passera non seulement les épreuves de terminale, mais aussi le français. Comme en Côte d’Ivoire, Momo a la bosse des maths, une matière qu’il affectionne particulièrement. Côté langues, ce n’est pas vraiment ça. L’allemand n’est pas sa tasse de thé et l’anglais non plus. Lorsqu’il tente de s’exprimer dans la langue de Shakespeare, son accent déclenche un fou rire général.
L’adepte des sandwichs grecs, de Georges Brassens, de Jacques Brel et de Baudelaire se prépare avec assiduité à l’examen. La pression est énorme : il ne faut pas que les efforts consentis par sa famille n’aient servis à rien. Il met donc toutes les chances de son côté et prépare une tactique pour l’histoire-géographie, qui se révèlera à moitié fructueuse. Tête en l’air et stressé, Momo oublie deux jours de suite sa carte lors du passage des épreuves dans son lycée, mais pourra tout de même composer. Sa tactique pour l’histoire-géographie a-t-elle payée ? Momo est tombé sur deux sujets d’histoire qu’il ne maîtrisait pas, mais a pu se rattraper en géographie, où il connaissait bien la carte proposée. La suite, on la connaît.
Commander :
Moi, Momo, ivoirien… et plus jeune bachelier de France chez Jean-Claude Gawsewitch Editeur