Mohammed VI et son pantalon à fleurs vers une succession en douceur sur le trône marocain


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Mohammed VI au magasin Le Printemps oNv 2024
Mohammed VI au magasin Le Printemps oNv 2024

L’image d’un roi revêt parfois une importance aussi grande que ses actes politiques. Mohammed VI, souverain du Maroc, illustre parfaitement cette réalité. Alors que des interrogations persistent sur son état de santé, une photo publiée le 17 novembre 2024 le montrant vêtu d’un pantalon à motifs floraux dans le magasin Printemps, à Paris, a déclenché une vague de réactions contrastées. Si les médias officiels marocains ont d’abord salué cette apparition comme un signe de rétablissement, ils ont finalement changé leur fusil d’épaule en dénonçant l’authenticité du cliché en raison des choix vestimentaires du monarque.

Un roi en convalescence ?

Depuis plusieurs mois, les apparitions publiques de Mohammed VI se font rares, alimentant les spéculations sur sa santé. Lors de la visite d’État d’Emmanuel Macron au Maroc fin octobre, le souverain était apparu affaibli, se déplaçant avec une canne. Ce contexte rend d’autant plus significative la photo prise au Printemps : le roi y apparaît debout, sans assistance, entouré de sa garde rapprochée. Un contraste frappant qui a rassuré une partie de la population marocaine. Ali Ketani, grand supporter du roi qui partage « SM le Roi Mohammed VI en vacance à Paris, détendu, en forme, stylé et rayonnant. Une allure jeune et pleine d’assurance, loin des rumeurs malveillantes sur son état de santé. Cette photo risque même de donner des insomnies à ses détracteurs« . Ainsi, certains médias proches des autorités ont relayé cette image comme une preuve de sa bonne forme. Cependant, cette même image a alimenté des polémiques d’un autre ordre.

Quand les fleurs font débat

Car ce qui a autant marqué que l’apparition du roi, c’est sa tenue. Arborant un pantalon à motifs floraux de la marque Kapital, Mohammed VI a aussi suscité des critiques sur les réseaux sociaux d’internautes qui ont jugé ce choix vestimentaire incompatible avec son statut de « Commandeur des croyants ». Certains posts ironiques ont tourné en boucle, qualifiant même cette apparition de « la blague de l’année ».

La polémique a pris une tournure différente lorsque des accusations de photomontage ont émergé. Des comptes pro-marocains ont avancé, sans preuves, que l’image avait été trafiquée pour nuire à l’image du Maroc. D’autres ont même diffusé des versions manipulées censées montrer l’absence du roi sur la photo. Pourtant, une enquête menée par France 24 – Les Observateurs a confirmé l’authenticité de l’image : Mohammed VI était bien présent au Printemps, comme en ont témoigné plusieurs employés et l’image n’a pas été trafiquée, contrairement à celle diffusée par les médias marocains qui dénonçaient un photomontage (plusieurs messages qui avait supprimé l’image de Mohammed VI de la photo pour faire croire que ce n’était pas lui ont finalement été retirées après l’enquête de France 24 révélant leur photomontage).

La communication marocaine sous la loupe

Cette controverse illustre une stratégie de communication oscillant entre contrôle strict et maladresses apparentes. La photo aurait fuité pour rassurer la population sur la santé du roi, mais les critiques sur sa tenue vestimentaire ont visiblement pris le dessus. La suppression de certains articles initialement enthousiastes, comme celui de H24info, et les accusations de manipulation montrent une certaine hésitation dans la gestion de l’image royale.

En parallèle, des observateurs comme le journaliste Ignacio Cembrero rappellent que Mohammed VI, souvent en vacances à Paris, adopte régulièrement des tenues décontractées. Ses apparitions dans des boutiques de luxe telles que Dior ou au Printemps ne sont pas rares, mais elles soulignent un fossé entre son style de vie privé et le rôle traditionnellement attendu d’un souverain.

Une monarchie en transition ?

Pendant que la polémique enfle, le prince héritier Moulay El Hassan monte en puissance sur la scène publique. Sur les instructions du roi Mohammed VI, le jeune prince a accueilli, le 21 novembre 2024, le président chinois Xi Jinping à l’aéroport Mohammed V de Casablanca, marquant ainsi sa première intervention diplomatique majeure. Cette apparition renforce les spéculations sur une accélération de la transmission des responsabilités royales.

Déjà en juillet 2024, les contrastes étaient saisissants au sein de la famille royale. Tandis que Lalla Salma, ex-épouse du roi, et ses enfants, Moulay El Hassan et Lalla Khadija, multipliaient les apparitions publiques médiatisées, le roi adoptait un profil bas. Ces choix, interprétés comme une mise en avant calculée de l’héritier du trône, laissaient entrevoir une préparation progressive de la transition monarchique.

Une stratégie de long terme

La visibilité accrue de Moulay El Hassan, associée au retrait progressif du roi Mohammed VI, témoigne d’une réorganisation en cours au sommet de l’État marocain. L’objectif semble être de préparer l’opinion publique à l’idée d’un futur règne du prince héritier, tout en préservant l’autorité symbolique du souverain en exercice. Les choix vestimentaires et les apparitions du roi, bien que parfois controversés, font partie de cette dynamique où l’image personnelle se mêle aux enjeux de gouvernance.

Alors que le Maroc se projette dans l’avenir avec un héritier de plus en plus visible sur la scène internationale, ces récents événements posent une question centrale : la monarchie marocaine est-elle prête pour un passage de relais imminent ?

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