Mohammed VI et le RN : une convergence d’intérêts inattendue ?


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Mohammed VI et Jordan Bardella
Mohammed VI et Jordan Bardella

Une étrange alliance se dessine dans l’ombre des relations franco-marocaines. Alors que le Rassemblement National (RN) multiplie les attaques contre Najat Vallaud-Belkacem, figure franco-marocaine proche du pouvoir de Rabat, le roi Mohammed VI garde un silence déconcertant. Ce mutisme royal, conjugué à des positions surprenantes du RN sur le Sahara occidental, laisse entrevoir une possible convergence d’intérêts entre le monarque chérifien et le parti d’extrême-droite français. Cette situation paradoxale pourrait rebattre les cartes diplomatiques entre Paris et Rabat, avec des implications majeures pour la question du Sahara et l’avenir des relations bilatérales.

Malgré les critiques du RN envers Najat Vallaud-Belkacem, figure politique française d’origine marocaine et proche du pouvoir de Rabat, le royaume chérifien est reste étonnamment silencieux. Ce mutisme pourrait s’expliquer par une stratégie diplomatique plus large, centrée sur la question du Sahara occidental.

En effet, le RN a pris position sur ce sujet d’une manière qui pourrait être vue favorablement par le Maroc. Dans un communiqué officiel, le parti critique, en effet, une décision du Tribunal de l’Union européenne favorable au Front Polisario, la qualifiant de « regrettable ». Le RN y souligne également l’importance stratégique du Maroc pour l’Europe, notamment dans la lutte contre l’immigration clandestine et le terrorisme, et la nécessité d’avoir des bonnes relations avec le Royaume.

L’arrivée du RN à Matignon pourrait déboucher sur une reconnaissance de la marocanité du Sahara

Cette convergence inattendue prend une nouvelle dimension à la lumière des propos d’Emmanuel Dupuy, président de l’Institut Prospective et Sécurité en Europe (IPSE). Dans une interview au médias marocain Medias24 en juin 2024, Dupuy affirme : « L’arrivée du RN à Matignon pourrait déboucher sur une reconnaissance de la marocanité du Sahara« . Il explique que le RN pourrait être plus enclin à reconnaître la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, alignant potentiellement la position de la France avec celle adoptée par les États-Unis sous l’administration Trump. Sans oublier par ailleurs que Trump fait actuellement la course en tête des sondages aux USA et peut légitimement envisager un retour au pouvoir.

Cette situation inédite soulève de nombreuses interrogations sur la stratégie diplomatique du Maroc. L’approche pragmatique de Mohammed VI, qui semble ménager le RN malgré les attaques contre des personnalités franco-marocaines, pourrait être motivée par l’anticipation d’un éventuel changement politique en France. Cependant, cette posture place la diaspora marocaine en France dans une position délicate, prise entre les critiques du RN et le silence troublant de Rabat. Ces développements mettent en lumière la complexité des relations franco-marocaines actuelles, où les considérations géopolitiques semblent prendre le pas sur les affinités traditionnelles.

La priorité absolue de Mohammed VI pour le Sahara

La priorité de Mohammed VI reste la reconnaissance par la France de la « marocanité » du Sahara. Dans cette optique, le roi semble adopter une approche pragmatique, cherchant des soutiens au-delà des clivages politiques traditionnels. Cette orientation politique est aussi critiquée par le monde arabe dans le retrait observé du roi concernant le conflit Israélo-palestinien. Pour l’ensemble des observateurs il apparait clairement que Mohammed VI préfère le Sahara occidental à la Palestine.

Cette situation met en lumière la complexité des relations franco-marocaines et les défis de la diplomatie dans un paysage politique en mutation. Elle illustre également comment des questions d’identité nationale peuvent s’entrelacer avec des enjeux géopolitiques plus larges. Mais pour Najat Vallaud-Belkacem, qui s’est engagé il y a quelques années dans une activité au service du Maroc, et aussi pour d’autres personnalités franco-marocaines, cette situation pourrait créer des tensions, les plaçant au cœur d’un jeu diplomatique complexe entre leur pays d’origine et leur pays d’adoption.

Ainsi, en cas de victoire de Jordan Bardella cette convergence d’intérêts inattendue entre Mohammed VI et le RN pourrait redéfinir les relations franco-marocaines. Elle souligne la nature pragmatique de la diplomatie contemporaine, où les alliances traditionnelles peuvent être remises en question face à des intérêts géopolitiques pressants. L’évolution de cette situation pourrait avoir des répercussions significatives sur la politique française, les relations bilatérales, et la question du Sahara occidental. Et la diaspora marocaine en France serait sacrifiée sur l’autel des intérêts politiques.

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