Miriam Makeba : Mama Africa, souveraine et toujours rebelle


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Miriam Makeba : Mama Africa, souveraine et toujours rebelle

La voix légendaire de l’Afrique, c’est elle. Miriam Makeba, admirée et respectée sur les cinq continents, a vu son destin de chanteuse se confondre avec l’Histoire cruelle de son pays.

Miriam Makeba est probablement la femme et la chanteuse africaine la plus célèbre de la planète. Elle est retournée vivre, il y a cinq ans, à Pretoria, à quelques pas de là où elle vécut enfant. Il y a quelques mois, elle était venue rendre visite à son public parisien, pour un concert chic à l’Olympia, histoire de montrer qu’elle est encore debout, à soixante-huit ans. Une légende vivante qui trimbale tout à la fois une incroyable juvénilité et la lassitude de ses ravages intérieurs.

Née en 1932 dans la capitale sud-africaine, Zenzi de son vrai prénom, diminutif d’Uzenzile qui signifie, « Tu ne dois t’en prendre qu’à toi-même », commence son destin tristement exemplaire en prison : elle n’a que quelques jours lorsque sa mère est inculpée durant six mois pour avoir fabriqué de la bière afin de subvenir aux besoins de sa famille. Son père meurt lorsqu’elle a cinq ans. En 1947, les nationalistes afrikaners gagnent les élections et plongent le peuple noir dans l’arbitraire et la violence que peut receler un régime dictatorial et raciste tel que l’apartheid.

À 20 ans, Zenzi Makeba, bonne d’enfants puis laveuse de taxis, vit seule avec sa petite fille Bongi et sa mère. C’est là qu’elle commence à chanter, presque par hasard, avec les Cuban Brothers, puis les Manhattan Brothers, en 1952, qui lui donnent son nom de scène, Miriam. Si elle est déjà une vedette, elle se sert de son nouveau gagne-pain pour dénoncer le régime.

De l’exil au pardon

Lorsqu’à 27 ans, elle quitte en toute légalité l’Afrique pour les besoins de sa carrière, elle ne sait pas qu’elle sera de fait bannie de son pays. Elle arrive aux Etats-Unis, parrainée par Harry Belafonte qui lui donne sa chance un soir de 1959. En quelques semaines, Miriam Makeba devient une star. Elle côtoie Marlon Brando et Duke Ellington, chante au Madison Square avec Marilyn Monroe pour l’anniversaire du président Kennedy. « J’étais très honorée, mais le lendemain, j’épluchais mes légumes dans ma cuisine » confie-t-elle au journal français Libération. En 1960, sa mère meurt. Miriam Makeba apprend sans aucune explication qu’elle est interdite de séjour et ne peut donc assister aux obsèques de sa mère.

Un exil de plus de trente ans commence. Elle ne cessera de prononcer des discours anti-apartheid et d’appeler au boycott de l’Afrique du Sud devant les Nations Unies. Elle chante en zoulou, en zhoxa, en tswana. Ses mélodies chantent la tolérance, la paix et le devoir de mémoire. Elle vit partout, libre et traquée, aux Etats-Unis, en Guinée, en Europe. Elle est devenue le symbole de la lutte anti-apartheid, avant même Nelson Mandela. Dans ses chansons, pas l’ombre d’une amertume, aucune pointe de cynisme, mais une dignité à toute épreuve.

Aujourd’hui, Miriam Makeba reste sidérée de voir certaines régions d’Afrique s’entretuer, elle qui rêve depuis toujours d’une grande Afrique unie. Pour son pays, elle exhorte ses frères noirs au pardon. « Il faut nous laisser grandir. L’Afrique du Sud n’a que sept ans d’existence. Les Noirs et les Blancs doivent apprendre à se connaître, à vivre ensemble. »

Celle qui a toujours défendu bec et ongles son statut de chanteuse plutôt que celui de femme politique continue son combat sous une forme nouvelle. Elle s’occupe de l’insertion des jeunes filles des townships en difficulté, en favorisant l’ouverture de maisons d’accueil.

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