En RDC, alors que 22 militaires ont été condamnés à mort, les hauts gradés restent impunis. Cette situation soulève des interrogations sur l’équité de la justice militaire.
Le 8 juillet 2024, la Cour militaire de Butembo, dans le Nord-Kivu, a frappé fort. Vingt-deux militaires ont été condamnés à la peine de mort pour « lâcheté, dissipation des munitions de guerre et pillages ». Ces condamnations portent à une cinquantaine le nombre de peines capitales prononcées en une semaine pour des motifs similaires, suscitant des réactions mitigées au sein de la population et de la société civile.
La colère de la société civile
Malgré ces lourdes peines, la société civile du Nord-Kivu n’est pas satisfaite. John Banyene, président de la société civile locale, dénonce une justice à deux vitesses. Selon lui, les officiers hauts gradés, accusés de détournement de fonds et de manque de soutien aux troupes, devraient également être traduits en justice. « Pourquoi se rabattre uniquement sur les militaires de rang et laisser les commandants qui détournent l’argent destiné à la logistique et à la ration des soldats ? » interroge-t-il avec indignation.
Accusations de détournement et impunité des officiers
Les critiques de Banyene ne s’arrêtent pas là. Il accuse les officiers de profiter de leur position pour échapper aux sanctions, malgré des accusations graves de détournement de fonds alloués aux opérations contre la rébellion du M23. Selon lui, cette impunité crée un sentiment d’injustice et de frustration parmi les troupes, qui se sentent abandonnées par leur hiérarchie.
La réponse de l’armée : une décision exemplaire
Face à ces accusations, l’armée, par la voix du lieutenant Reagean Mbuyi, porte-parole pour le front nord, défend la décision de la cour militaire. Il qualifie le procès d’exemplaire et pédagogique, estimant qu’il encouragera les militaires à affronter l’ennemi avec bravoure. « Cette action de la justice militaire va remobiliser les troupes dans leurs combats contre les rebelles du M23 », affirme-t-il, soulignant l’importance de maintenir la discipline et le courage au sein des forces armées.
Appel à des sanctions équilibrées
La société civile du Nord-Kivu insiste sur la nécessité de sanctions équilibrées et justes. Elle appelle à une prise en charge améliorée des troupes et à des mesures contre les hauts gradés corrompus. Pour Banyene, il est crucial que la justice militaire ne se contente pas de cibler les soldats de rang inférieur, mais qu’elle s’attaque également aux officiers qui abusent de leur pouvoir.
Le défi de la justice militaire en RDC
La situation en RDC reste complexe. Entre les condamnations des militaires de rang et les accusations de corruption au sein de la hiérarchie militaire, la justice militaire doit naviguer entre répression et équité. Le sort des officiers hauts gradés reste en suspens, alimentant le débat sur la transparence et l’impartialité de la justice dans un contexte de conflit intense.
L’appel à des sanctions contre les hauts gradés par la société civile du Nord-Kivu met en lumière les défis persistants de la lutte contre l’impunité et la corruption au sein des forces armées congolaises. La question reste ouverte : les hauts gradés seront-ils un jour tenus responsables de leurs actions, ou continueront-ils à échapper à la justice ?