Mike Ibrahim est en concert, mercredi à Paris, au Canal Opus. L’occasion pour le jeune chanteur de « musique caribéenne acoustique » de revenir sur l’évolution de son label, Mangroove, de donner des nouvelles de son album Ninaroz et de dévoiler quelques projets. Cadeau de Noël avant l’heure pour nos internautes : des places sont à gagner en participant à un concours.
Mike Ibrahim de nouveau sur le devant de la scène. Le jeune artiste d’origine martiniquaise se produira ce mercredi au Canal Opus, histoire de faire (re)découvrir Ninaroz, son premier album. Pour l’occasion, le chanteur de « musique caribéenne acoustique » dresse un bilan des six mois d’existence de son premier opus. Il revient également sur les avancées et les ambitions de son label, Mangroove, et dévoile certains de ses projets. Les internautes d’Afrik peuvent gagner des places pour le concert de Mike Ibrahim en envoyant un e-mail à concours@afrik.com[[<*>Envoyez un e-mail avec vos nom et prénom à l’adresse concours@afrik.com, en
précisant Mike Ibrahim dans le sujet. Les gagnants seront notifiés par e-mail.]]
Afrik.com : Est-ce que le concept Mangroove a trouvé ses marques ?
Mike Ibrahim : Le point d’ancrage et de repère de Mangroove, est le disque Ninaroz. A travers les concerts que nous avons pu faire, et que nous continuons de faire dans le cadre de la promotion de Ninaroz, nous avons de nouveaux Mangroovers. Mangroove n’est pas quelque chose de figé, c’est un concept en mouvement continuel.
Afrik.com : Peut-on chiffrer la communauté des Mangroovers ?
Mike Ibrahim : On ne peut pas vraiment la chiffrer parce que c’est justement un peu comme une mangrove avec des racines multiples : il y a plein de petites ramifications. Mais on peut dire qu’aujourd’hui il y a 300/400 personnes qui sont très proches de Mangroove. Autour de ces 400 personnes, on peut rajouter tous les amis et les futures ramifications qui vont arriver. Tout est vraiment en train de se développer. Le plus important c’est la qualité du public plus que sa quantité.
Afrik.com : Comment définiriez-vous la Mangroove attitude ?
Mike Ibrahim : La Mangroove attitude, c’est l’échange entre les gens, l’ouverture, la compréhension du métissage tel qu’il est depuis quelques années et tel qu’il est en train d’apparaître aux yeux de plusieurs personnes. C’est une attitude moderne, un regard respectueux et une inspiration qui vient des racines.
Afrik.com : Peut-on trouver des produits dérivés de Mangroove si l’on veut afficher sa Mangroove attitude ?
Mike Ibrahim : Il y a le disque, qui est le premier produit et qui est le symbole le plus fort, le plus marquant et qui doit prochainement aboutir à la création d’un certain nombre de produits dérivés, comme des tee-shirts, des cartes postales…
Afrik.com : Comment a évolué Ninaroz, le premier produit Mangroove ?
Mike Ibrahim : J’espère que c’est exponentiel. En tout cas, depuis notre première interview ensemble, il s’est passé énormément de choses autour de ce disque, qui est un peu une carte de visite. Le premier article d’Afrik a été un peu un déclencheur : beaucoup de journalistes sont venus nous voir, globalement il y a une bonne critique du disque, le public suit et en concert il est particulièrement sensible à ce qu’il voit sur scène. Il faut dire que j’ai la chance de jouer avec de grands musiciens : le bassiste Guy Nsangue, le guitariste angolais Simmons Massini, Patsy Gérémy (choriste), Carl Leury (choriste), Frédéric Poli (percussionniste). C’est vrai que c’est une formule très acoustique par rapport à ce qu’on entend sur le disque et c’est le son dont j’ai envie de me rapprocher pour les prochains disques. Le disque se vend notamment pendant les concerts. De nombreux projets naissent dans le sillage de Ninaroz, c’est pour moi un bilan a mi-parcours très positif.
Afrik.com : Ninaroz est le premier produit du label Mangroove. Allez-vous produire d’autres personnes ou vous concentrez-vous sur Mike Ibrahim ?
Mike Ibrahim : Nous avons des projets de développement et des envies sur certains artistes, mais je ne peux pas citer de noms. Maintenant, tout dépend des rencontres. Il faut rencontrer les bonnes personnes, des artistes prêts à suivre la démarche de Mangroove. Parce que Mangroove c’est un état d’esprit. Il y a un côté : « On prend le risque et on est dans le même bateau » parce que nous ne sommes pas une major.
Afrik.com : Arrivez-vous à gérer votre carrière et vos obligations de producteur de Mangroove ?
Mike Ibrahim : Fort heureusement, je ne suis pas seul. Des amis et des collaborateurs m’aident à gérer le label et ma carrière d’artiste. C’est vrai qu’il y a un côté schizophrénique, dans le fait d’avoir une approche à la fois très business des choses et très artistique. Mais je pense qu’un artiste moderne doit avoir les deux approches s’il veut aller loin.
Afrik.com : Avoir un label, cela a-t-il à voir avec l’ego ? Si une major veut vous racheter, êtes-vous prêt à vendre ?
Mike Ibrahim : Je pense que les majors sont intelligentes, malgré tout ce qu’on dit, et que si elles achètent un label, c’est qu’elles y attachent un intérêt ou qu’il est extrêmement dangereux. Si un label est extrêmement dangereux, c’est qu’il est rentable donc il n’a pas besoin de se vendre. Si j’ai une proposition, je l’étudierai sérieusement.
Afrik.com : Vous chantez avec votre vrai nom. Avez-vous déjà pensé à utiliser un pseudo ?
Mike Ibrahim : Même si j’ai beaucoup de recul sur le rapport à l’image et à la représentation, j’essaye de faire les choses avec vérité. Je ne vais pas me cacher derrière un pseudo ou une identité. Sauf si je fais des trucs un peu extravagants, comme être sur scène déguisé comme un clown, comme fait le chanteur M. Il a toute une iconographie et une image de lui un peu double. Mais il a lui-même dit qu’il voulait maintenant faire des disques sous le nom de Mathieu Chedid parce qu’il a envie de réunifier les deux aspects de sa personnalité. Moi, je ne suis pas sujet à la schizophrénie. Je me sens complètement en phase et en harmonie avec le Mike qui fait des concerts, des disques et qui a une vie privée et intérieure.
Afrik.com : Travaillez-vous votre voix ?
Mike Ibrahim : Je travaille seul tous les jours mes instruments que sont ma guitare et ma voix. J’ai pris des cours de chant il y a quelques années. J’essaie de travailler les nuances et de trouver comment obtenir plus rapidement et plus efficacement des résultats. Il y a toute une tradition de chanteurs qui gueulent, par exemple la Star Academy (émission de télé-réalité française de chant, ndlr). Ce n’est pas du tout mon école vocale. J’essaye de faire des choses plus nuancés, plus douces, plus subtiles. Je ne dis pas que ces gens ne chantent pas bien. C’est juste que ce n’est pas ma tasse de thé. Tous les grands musiciens diront que pour être bon, c’est 95% de travail et 5% de talent.
Afrik.com : Vous semblez accorder beaucoup d’importance au live. Le travail en studio vous ennuie-t-il ?
Mike Ibrahim : Non, car c’est là qu’on pose les choses. Le studio d’enregistrement est un point de départ et une vision idéale de ce que l’on voudrait faire passer à travers un morceau, mais c’est forcément plus lisse qu’une version live. Je pense avant tout que la musique c’est un partage et qu’il n’y a rien de tel que d’avoir un musicien en face de soi, avec toutes les interactions que ça comprend.
Afrik.com : Pensez-vous qu’un album ait une durée de vie ? Pensez-vous déjà à concevoir un second album ?
Mike Ibrahim : Oui, on pense tout le temps a de nouveaux morceaux, à de nouvelles compositions. J’ai des idées qui vont très loin, je suis assez ambitieux dans mes démarches.
Pour ce qui est de la durée de vie d’un album, je pense qu’un album a plusieurs vies. Il y a la période de sortie, mais après, quand le second sort, les gens s’intéressent forcément au premier qui est sorti. C’est cyclique. Passé la première phase d’intérêt, je pense qu’il y a un retour chez les gens qui continuent à aimer ma musique, même après la sortie du second album. Il est très difficile de définir la durée de vie d’un disque. Maintenant, dans l’industrie du disque, si on regarde les choses plus froidement, je pense qu’il y a beaucoup de choses à prendre en compte.
Afrik.com : Pensez-vous à faire un album live ou sortir un DVD pour qu’on puisse vous voir sur scène ?
Mike Ibrahim : Ça fait partie des choses qu’on pense faire car pas mal de choses ont déjà été filmées, mais pour l’instant il n’y a rien de sûr.
Afrik.com : Y a-t-il des changements autour de vous depuis votre notoriété ?
Mike Ibrahim : Nous passons à la télé sur des chaînes comme Trace TV ou MTV donc, oui, le regard des gens change et cette expérience nous fait nous changer nous-mêmes. J’ai une faculté de recul importante, donc quand les gens viennent me parler je le vis mais je suis en même temps spectateur. Il y a un côté terre à terre qui me permet de ne pas être sujet à l’ivresse des hauteurs. Quand je me vois à la télé ou quand je revois des interviews, je n’ai pas l’impression que c’est moi. C’est comme un film, une mise en scène et une forme de représentation en même temps. Ma personnalité d’artiste et ce que je suis réellement sont deux personnes différentes.
Afrik.com : Etre admiré est-ce dangereux pour les groupes ?
Mike Ibrahim : Oui, l’ego est forcément lissé dans le sens du poil. Il faut avoir un peu de recul. Pour moi, c’est d’abord ma musique qui attire les gens, et après il y a autre chose. On me parle souvent de mon physique. Pour moi, c’est un tout. Quand les gens « m’admirent » sur scène, je sais bien que je ne suis pas l’unique responsable de tout ça, il y a mes musiciens qui créent, tous les gens qui ont travaillé sur le disque.
Afrik.com : Quelle est votre plus belle émotion, votre plus beau souvenir sur scène depuis le début de Ninaroz ?
Mike Ibrahim : Il y a une émotion à chaque fois. J’ai d’excellents musiciens qui me procurent des émotions très fortes à chaque fois. Le Bataclan c’était fort, mais après ce sont des choses très furtives. Ma mère est venue de Martinique une fois pour un concert, donc c’était une émotion particulière. Lors d’un de mes premiers concerts à l’Opus, où j’ai eu une belle ovation, les gens m’ont retenu à la fin pour que je ne parte pas… C’est un souvenir assez net. C’est la première fois que j’ai senti que j’avais un public. Lorsque des gens adhèrent à la musique, il y a un effet de communion. C’est exceptionnel à vivre.
Afrik.com : Quel est le plus beau compliment qu’on vous ait déjà fait ?
Mike Ibrahim : Après mes concerts, je reçois régulièrement des mails où les gens me disent que ma musique les appelle, les attire. J’ai reçu un compliment de Richard Bona (chanteur camerounais), qui a aimé mes compositions. Quand je reçois des compliments de musiciens que je respecte, ça me motive, ça me donne envie de m’améliorer. Au-delà de ça, ce sont des gens qui humainement sont des êtres formidables, profonds, gais, qui ont une vraie énergie. Les musiciens qui jouent avec moi me font un compliment par le fait qu’ils m’accompagnent. J’ai beaucoup de respect pour eux.
Afrik.com : Avez-vous un fan club ?
Mike Ibrahim : Non, c’est plus une communauté, un regroupement d’énergies positives. Des admirateurs et admiratrices. On voit certaines têtes qui reviennent souvent.
Afrik.com : Vos parents suivent-ils votre carrière ?
Mike Ibrahim : Ils sont fiers de moi et ils sont venus me voir en concert. Il y a un bon enthousiasme et bon état d’esprit autour de ce que je fais. Ce n’est pas nouveau, c’est un peu l’état d’esprit de la famille de soutenir les projets, de se faire confiance.
Afrik.com : Vous vous êtes souvent produit sur Paris, mais pas encore aux Antilles…
Mike Ibrahim : C’est en cours de préparation pour le début de l’année. Des promoteurs attendent ma venue, mais le crash de l’avion a gelé les festivités en Martinique. Alors nous avons préféré faire une pause et ne pas faire un forcing qui aurait été mal venu.
Afrik.com : Même s’il n’y a pas eu de concert aux Antilles, le disque a-t-il déjà percé là-bas ?
Mike Ibrahim : Le disque est distribué. Il a commencé à tourner en radio. Pour le moment, c’est le single Ninaroz qui passe, mais il devrait y en avoir un autre prochainement. Les journalistes qui m’ont interviewé par téléphone ou qui ont assisté au concert au Bataclan sont enthousiastes : ils veulent avoir le disque entre les mains et attendent que je me produise.
Afrik.com : A part les Antilles, y a t-il d’autres projets de concerts ?
Mike Ibrahim : On risque de nous voir sur les routes de France et de Navarre dès cet été et nous envisageons une tournée africaine en avril en Afrique du Sud, au Zimbabwe, au Kenya et peut-être Madagascar.
Afrik.com : Est-ce que les Antilles vous manquent ?
Mike Ibrahim : La dernière fois que j’y suis allé, c’était il y a un ou deux ans. Je porte les Antilles dans mon cœur. Ce qui manque, c’est un cadre de vie, mais ensuite tout est une question de timing. Ce n’est pas une obsession pour moi de retourner aux Antilles, le monde est vaste et il faut le découvrir, le parcourir.
Afrik.com : Mike Ibrahim est-il un cœur à prendre ?
Mike Ibrahim : Non, je ne suis pas un cœur à prendre mais par contre un cœur ouvert. Je pense qu’un cœur doit être partagé, ce doit être un espace de rencontre et d’échange. Chacun doit garder son cœur et son intégrité. Je ne crois pas du tout à l’amour où l’un phagocyte l’autre. Je ne voudrai pas prendre le cœur de quelqu’un ou que quelqu’un prenne le mien. Evidement, c’est une expression mais, quand on s’attache un peu plus au mot, on sent qu’il y a un sens caché. La notion d’appartenir, de posséder l’autre ne correspond pas du tout à mon fonctionnement.
Mike Ibrahim au Canal Opus mercredi 3O novembre à 21h. Billets en préventes dans les Fnac et sur Fnac.com