Le ministre mauricien du Travail, des Relations industrielles et de l’Emploi, Showkutally Soodhun, a visiblement été mal compris. Il y a quelques jours, l’agence de presse Pana, rapportait qu’il avait « demandé aux industriels de ne plus recruter des ouvriers étrangers » dans l’île. Le ministre parle plutôt d’un remplacement des travailleurs immigrés par des Mauriciens, en vue de lutter efficacement contre le chômage, qui frapperait 23 000 habitants du pays.
Le ministre mauricien du Travail n’est pas xénophobe. Il y a une semaine, l’agence panafricaine de presse, la Pana, rapportait que Showkutally Soodhun avait « demandé aux industriels de ne plus recruter des ouvriers étrangers ». L’intéressé précise aujourd’hui ses propos en expliquant qu’il « aimerait remplacer les travailleurs étrangers par des Mauriciens ». Et d’avancer ses raisons, suite à un sondage qui montre que le nombre de travailleurs étrangers dans le pays (22 000) équivaut à celui des autochtones au chômage (23 000).
Avant, c’était plus dur
Le ministre entend vraiment rectifier les propos qu’on lui prête. Il ne se dit pas « anti-étranger » mais se définit comme quelqu’un qui ne veut pas « laisser mourir son peuple ». Son combat prend plus de sens quand on sait qu’il a été lui-même ouvrier, dans les années 70. En ce temps, la vie « était plus dure », raconte-t-il. Pour 2,50 roupies par jour (0,7 euros), dans des secteurs qui étaient tous manuels et qui n’offraient ni sécurité sociale, ni protection, « on avait vraiment du mal à s’en sortir ». Aujourd’hui, le « système robotique » et moderne et ses 150 euros par mois est plus « agréable ». C’est cette aisance dans l’usine d’aujourd’hui qui le pousse à vouloir mettre les siens au travail car il ne comprend pas qu’avec tout ça, « le Mauricien ne travaille pas ».
Les Mauriciens refusent la polyvalence
Un problème de taille reste l’aversion des insulaires pour la polyvalence. Cette pratique consiste à faire occuper à un employé, successivement dans la journée, différents postes dans une usine ou entreprise. Pratique que n’apprécient guère les Mauriciens. Pour résoudre cette équation, le ministre a prévu, prochainement, une rencontre avec les investisseurs locaux et internationaux. Rencontre qui le mènera à les « convaincre » de la nécessité de créer des écoles de formation, sensées enseigner aux siens la polyvalence.
Showkutally Soodhun devra aussi s’atteler à une autre tâche s’il veut remplir les entreprises de Mauriciens : revoir le problème des heures supplémentaires. Les natifs de l’île n’en sont pas friands. Les raisons évoquées pour s’y dérober : les mariages, les anniversaires et autres baptêmes pour lesquels leur présence est indispensable. Des comportements qui sont autant de manques à gagner pour l’entrepreneur, qui ne rencontre d’ailleurs pas ce genre d’inconvénients avec les étrangers.
Quand Maurice avait besoin de ses étrangers
C’est surtout dans le secteur du textile que la main-d’œuvre étrangère est très présente, avec les Chinois, les Indiens et les Bengalis. Le gouvernement avait fait appel à eux dans les années 1986-1987 pour respecter des commandes dans ce secteur. La durée maximale de leur contrat de travail a toujours été de trois ans. Ainsi, après une, deux ou trois années passées sur l’île, les travailleurs immigrés avaient l’obligation de retourner chez eux. Showkutally Soodhun rappelle d’ailleurs qu’il est « très reconnaissant envers les étrangers » qui ont contribué à développer le pays.
Reste qu’il exprime aujourd’hui tout haut une pratique déjà employée dans le pays. Le « remplacement » des étrangers par des Mauriciens a toujours discrètement eu lieu sur l’île. Et l’application des propos du ministre du Travail augure sans doute d’un prochain durcissement du séjour de la main-d’œuvre étrangère pour mettre les Mauriciens au travail.