La cinquième édition du Festival des villes anciennes anime, du 4 au 10 janvier, la ville de Chinguetti, classée par l’Unesco dans le patrimoine culturel de l’humanité. L’objectif de l’événement depuis sa naissance en 2011 : mettre en lumière son patrimoine culturel, préserver son cadre naturel, ainsi que développer des activités économiques et culturelles qui permettent d’améliorer les conditions de vie de la population.
A Chinguetti,
A près de 700 kilomètres de Nouakchott, Chinguetti, bien loin du bruit des moteurs des voitures de la capitale mauritanienne qui grouille de monde, semble au premier coup d’œil sortie de nulle part. Une ville à part. Hors du temps. Authentique. Au cœur du désert mauritanien, ensablée. Tout a été mis en place pour accueillir cette cinquième édition du Festival des villes anciennes qui a ouvert ses portes le 4 janvier pour se poursuivra jusqu’au 10 janvier 2015. Des tentes installées spécialement pour les visiteurs, touristes, et habitants, qui exposent des objets d’artisanat traditionnels pour les vendre, décorent la cité. Elle est particulièrement belle en ce soir du 4 janvier, grouillant de monde. C’est la deuxième fois qu’elle est choisie pour abriter le Festival. La joie de vivre se lit sur les visages de ses habitants parés pour apporter leur pierre a l’édifice au Festival, malgré un froid glacial qui pénètre jusqu’aux os.
En cette première journée, une série de conférences culturelles et artistiques se déroulent un peu partout dans la cité, permettant de découvrir Chinguetti et son artisanat rare et spécifique. Elle se termine par une soirée musicale d’un public d’au moins 800 personnes, venues voir sur scène près d’une cinquantaine d’artistes : chanteurs traditionnels, rappeurs, danseurs, poètes, comédiens… Sur cette même scène, des artistes de différentes communautés en Mauritanie : Maures, Peulhs, Soninke, Wolof montent à tour de rôle, montrant le brassage culturel de la Mauritanie. Les artistes insistent tous pour rappeler l’importance de l’unité du pays, et la paix entre les différentes ethnies du pays.
Chinguetti fait partie des quatre villes anciennes de Mauritanie avec Oualata, Ouadane et Tichitt. Elles ont toutes été classées au patrimoine mondial de l’Unesco. Depuis leur émergence au 11ème et 12ème siècles, ces villes ont été des foyers de rayonnement culturel, spirituel et d’échanges commerciaux dans la sous-région, tout comme la ville malienne mythique de Tombouctou. C’est pour préserver le cadre naturel et le patrimoine de ses villes anciennes que la Mauritanie a lancé le Festival des villes anciennes, en 2011.
L’enjeu est en effet de taille. Ces quatre joyaux de la Mauritanie font face à la désertification, ainsi qu’à l’effondrement du tourisme, source de revenus essentielle pour la population. L’objectif aussi du Festival est de faire découvrir la richesse culturelle de ces cités pour faire revenir les touristes qui les ont désertées depuis les tragiques évènements de 2007. Raison pour laquelle, l’Etat n’a pas lésiné sur les moyens pour l’organisation du Festival.
D’ailleurs, le Président Mohamed Ould Abdel Aziz, le maire de Chinguetti, ainsi que la ministre de la Culture Vatma Vall Mint Soueina ont tenu à être présents à l’ouverture du Festival, qui coïncide comme chaque année avec le Maouloud, la naissance du Prophète, célébré partout dans le monde musulman. Dans son discours d’ouverture, le Président réitère ainsi son appel au dialogue « politique inclusif avec les composantes du pays », convaincu de la « nécessité de la participation de tous a l’œuvre nationale ». Il rappelle également les valeurs de l’islam et l’exemple du Prophète, qui a mis « fin au mythe de la mécréance et de l’athéisme, faisant sortir l’humanité des ténèbres », prônant « la tolérance entre Noirs et Blancs, riches et pauvres, et les valeurs de piété et de dévouement au service de la société ». Selon le chef d’Etat, « c’est cet islam qui est source de notre législation et fondement de notre cohésion sociale et unité nationale que nous veillons tous à renforcer à travers une politique nationale… Et ce n’est pas une poignée de terroristes qui sauraient nous en dissuader ».
De son côté, la ministre de la Culture affirme sa détermination à superviser, chaque année, le Festival, soulignant que la « Mauritanie jouit de la sécurité et stabilité, et avance sur la voie du développement et du progrès ». Pour elle, « la Mauritanie s’est réconciliée avec elle-même immunisée contre les effets négatifs de la mondialisation qui menace les spécificités nationales et culturelles de tous les pays », soulignant que le « Festival permet de faire revivre ces cités anciennes, de lutter contre la désertification, et permet un développement local tout en valorisant le patrimoine matériel et immatériel ». Un discours en phase avec quelques actes concrets pour prêter main forte aux populations. Elles ont en effet bénéficié d’une distribution gratuite de poissons, rares dans la zone et de prêts de micro-crédit d’un montant total de 50 millions d’Ougayas pour entreprendre des projets.
D’autant que la cité dispose d’un potentiel touristique évident avec des bibliothèques composées de livres de savants dans les domaines de l’astronomie, des sciences, de la religion, datant de plusieurs siècles. Elle est aussi dotée d’un hôpital construit avec l’aide de la coopération espagnole ainsi qu’une grande mosquée. En dehors de la richesse culturelle de la cité, les visiteurs de Chinguetti retiendront sans doute l’hospitalité chaleureuse de ses habitants.