Mauritanie-Affaire Raja : Le fils du président échappe à la justice


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Les Mauritaniens choqués par le comportement du fils du président, Beder Ould Mohamed Ould Abdel Aziz. Libre aujourd’hui, le jeune homme tire à bout portant sur une jeune fille, Raja Mint Weiss Ould Esyadi, le 22 janvier. Celle-ci se trouve actuellement entre la vie et la mort. L’affaire qui fait la Une de la presse locale a d’ores et déjà été classée sans suite par le procureur de la République. Des avocats dénoncent l’impartialité de la justice mauritanienne qui n’a pas mené l’enquête jusqu’au bout.

L’affaire Raja est loin d’être une affaire enterrée en Mauritanie. Largement relayée par les médias, l’incompréhension domine dans le pays. Pourquoi Bedr Ould Mohamed Ould Abdel Aziz, le fils du président mauritanien Mohammed Ould Abdel Aziz, après avoir tiré sur la jeune Raja Mint Weiss Ould Esyadi avec un pistolet automatique, n’a fait l’objet d’aucune condamnation ? La réponse paraît évidente, mais elle fait débat dans le pays alors que la victime, transportée en soin intensifs au Maroc, est toujours entre la vie et la mort.

Tout a commencé le 22 janvier 2012 dans un des quartiers résidentiels de la ville de Nouakchott, capitale de la Mauritanie. Ce jour-là, Bedr Ould Mohamed Abdel Aziz , invite un de ses amis, Zeine El Abidine Ould Chafi, à faire le tour de la ville en voiture. Un ressortissant marocain du nom de Rachid El Khatib se joint à eux. Soudain, le portable de Zeine El Abidine Ould Chafi sonne. C’est sa copine, Raja Mint Weiss Ould Esyadi qui lui dit : « Je ne suis pas loin de chez toi… Je t’attends ». Les trois vont à sa rencontre. Une fois en sa compagnie, le fils du président brandit un pistolet vers elle et lui lance : « Si je tirais sur toi ! » Et à Raja de répondre : « Je suis une guerrière de sang. Je n’ai pas peur des balles… ». Mais avant même que la jeune femme ne finisse sa phrase le fils du chef d’Etat appuie sur la gâchette. Touchée en plein thorax, Raja s’écroule au sol.

Une affaire classée sans suite

Les trois jeunes hommes transportent la jeune femme à l’Hôpital. Une fois sur place, ils racontent toute l’histoire aux médecins. Un commissaire se rend alors à l’hôpital et après avoir écouté leur version des faits, il ordonne à ses hommes de conduire les deux amis de Bedr Mohamed Ould Abdel Aziz au commissariat pour les mettre en garde à vue. Ce qui n’a pas été le cas du fils du président qui a bénéficié d’un traitement de faveur. L’affaire ayant été relayée par la presse, ce n’est que 24 heures plus tard que ce dernier a été conduit à son tour au commissariat. Résultat : les deux amis ont fait 100 heures de garde à vue, alors que Bedr Mohamed Ould Abdel Aziz en a fait que 72 heures et dans de bien meilleures conditions.

Le 26 janvier, les trois jeunes hommes sont convoqués par le Procureur de la République qui décide de classer l’affaire sans suite après que Bedr Mohamed Ould Abdel Aziz ait payé une amende symbolique de 50.000 UM, soit 130 euros. Etant considéré comme un simple témoin, Zein Ould Abidine Ould Chafi, qui a rapporté les faits tels qu’ils se sont passés, a été remis en liberté. Quant à Rachid El Khatib, il a été reconduit à la frontière.

« Comment la justice peut expliquer que l’auteur d’un tel crime reste libre ? »

De multiples acteurs de la justice mauritanienne, tels que l’avocat Brahim Ould Ebety, peine à comprendre la décision du procureur de la République alors que la victime est toujours entre la vie et la mort. « Comment la justice peut expliquer que l’auteur d’un tel crime reste libre après le classement de son dossier sans suite ? » s’interroge l’avocat qui dénonce de multiples zones d’ombres dans cette affaire. Une enquête bâclée. Selon lui, les deux témoins ont subi des pressions pour dédouaner le fils du dirigeant mauritanien. Mais « ils ont refusé toute compromission et n’ont cédé ni au chantage, ni aux intimidations, ni aux menaces pour décharger le fils du Président Bedr Ould Mohamed Ould Abdel Aziz des faits qu’il reconnaît lui-même », a-t-il expliqué. D’après Brahim Ould Ebety « une délégation officielle comprenant l’un des conseillers du Président de la République et l’un des conseillers du Premier ministre, accompagnés du secrétaire général du ministère de la santé s’est rendue à l’hôpital pour prendre les choses en mains, empêchant tout contact avec Raja avant de l’évacuer vers le Maroc ».

Pour Brahim Ould Ebety, cette affaire montre que la justice mauritanienne a mis en place un « système de protection et de privilèges accordés au fils du président ». « Pourquoi le fils du Président de la République est porteur d’une arme à feux chargée de munitions qu’il utilise dans ses sorties mondaines ? » L’avocat affirme qu’ « à ce jour aucune information n’a été fournie sur la détention de l’arme à feux utilisée par le fils du Président de la république et non plus sur le type de munitions utilisées, alors qu’il s’agit de question d’importance capitale s’agissant de la sécurité des citoyens mauritaniens et de tout ressortissant étranger résident dans notre pays ».

Alors que le fils du Président mauritanien, libre comme l’air, batifole de nouveau, la victime, elle, est entre la vie et la mort.

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