Les récentes incursions, en territoire malien, de quelques unités de l’armée mauritanienne engagée dans une opération militaire contre les Salafistes d’Al Qaïda au Maghreb Islamique ont mis le zoom des caméras sur les forces armées, dévoilant ainsi des réalités tout au moins révoltantes par leur gravité.
En effet, des séquences d’images largement relayées par les médias audiovisuels internationaux, ces derniers jours, ont permis de révéler, à l’opinion nationale et internationale les preuves d’autant plus scandaleuses que regrettables de la persistance, désormais, irréfutable de ségrégation raciale qui gangrène le corps de cette armée, après avoir rongé tous les niveaux de la vie publique de l’Etat.
Certes, la discrimination sur la base de naissance, dans les différents corps d’armées mauritaniennes, n’a jamais cependant, cessé de faire l’objet de très fortes et fermes dénonciations et condamnations, de la part de quelques défenseurs des droits de l’homme. Mais, les campagnes de dénégation et de scepticisme tambour battant menées par les laudateurs du pouvoir mus par une volonté farouche de pérenniser le système en vilipendant les honnêtes hommes ont hélas fort contribué à entretenir la confusion et la présomption de doute sur cette triste réalité.
Aujourd’hui, ces images, puisées dans les archives de quelques respectables chaînes, à l’instar d’Aljazeera et France 24, contribuent, chemin faisant, à faire tomber le masque et mettre l’ensemble des mauritaniens devant l’une de leurs plus amères réalités qu’incarne l’image d’une armée que divise les préjugés de la race et les préséances de naissance ; une armée sevrée de valeurs républicaines ; une armée dont les troupes sont quasiment noires et le commandement presque, ou, exclusivement blanc. Ainsi l’attestent les séquences diffusées et qui émanent fort heureusement de sources indépendantes. Défrayant la chronique, ces éléments corroborent les allégations et les accusations de quelques militants de droits de l’homme, naguère, montrés à la vindicte publique.
Pour une armée nationale représentative du peuple mauritanien
L’armée nationale dont le devoir se résume dans l’honorable mission de défendre l’intégrité territoriale, sécuriser les citoyens et leurs biens et garantir la cohésion nationale, se doit d’être à l’antipode de l’image que des forces réactionnaires et aigries s’évertuent vaille que vaille à lui donner en tenant à confiner des catégories de patriotes libres dans la subordination sur le critère de l’ethnie, la couleur de la peau ou la naissance pour en faire des chairs à canons. Car ces velléités fatales ayant prouvé leur ignominie et anachronisme sans commune mesure, de 1975 à 1978, lors de la guerre du Sahara doivent être bannies.
Il incombe alors à tout mauritanien soucieux des intérêts suprêmes de ce pays, lesquels passent par la défense de l’unité, la stabilité et le raffermissement de la cohésion nationale, de dénoncer et condamner avec la dernière énergie ce phénomène dont la persistance est de nature à mettre en péril l’unité et la cohésion nationale. Car c’est absurde de vouloir faire de l’inégalité et l’injustice, deux éléments naturellement préjudiciables aussi bien à l’Homme qu’à ses institutions, un principe fondateur d’une véritable armée nationale. Ceci est d’autant plus vrai que le spectre de la fin des années quatre vingt et début des années quatre-vingt-dix est toujours suspendu sur les casques comme une épée de Damoclès. Sans compter, par ailleurs, tirer les leçons embarrassantes, certes, des deux kamikazes, exclusivement haratines, pour autant riche d’enseignement bien que le pouvoir s’évertuent, dans une ultime tentative, de l’occulter.
Enfin, il y a lieu de rappeler qu’à chaque fois qu’un Etat s’est engagé et endurci dans l’entêtement, usant de politique de l’autruche et d’antivaleur, il s’en est retrouvé esseulé et abandonné sous l’effet de l’usure. Le moment est venu, contrit, de reconnaître tous nos maux, corriger les tares, libérer les énergies et, au-delà du racisme d’Etat et de l’exclusion rampant et plombant, rebondir encore plus loin et de plus belle.
Par Brahim Ould Bilal Ould Abeid et Ethmane Ould Bidiel