Le village de Drodro en R.D.C vit depuis jeudi 3 avril au rythme du massacre de centaines de ses habitants. Alors que la presse internationale fait état de près de 1 000 morts, les observateurs de l’ONU, qui n’ont pas encore terminés leurs investigations, démentent avoir annoncé un tel bilan. Patricia Tome, directrice de l’information de la Mission des Nations Unies pour le Congo (MONUC) fait le point de la situation. Interview.
966 morts en trois heures selon RFI, 1 000 morts selon la BBC autant d’annonces infondées sur le massacre de Drodro, (République Démocratique du Congo) dans la presse internationale. Une semaine après la tuerie, la vérité sur ce massacre reste à établir. La MONUC ( Mission des Nations Unies pour le Congo), à pied d’oeuvre parle provisoirement de 300 morts. Sa commission d’enquête apportera un éclairage définitif sur ce massacre.
Afrik.com : Au lendemain des massacres de jeudi dernier à Drodro, différents chiffres contradictoires faisant état de la situation ont été relayés par la presse internationale. Qu’en est-il exactement du rapport de la MONUC ?
Patricia Tome : Nous avons lu comme vous dans la presse internationale que la MONUC a annoncé 1 000 morts, ou 966 en trois heures, mais rien de tout ça n’a été confirmé par nos enquêteurs. Les massacres n’ont pas eu lieu qu’à Drodro, mais dans 14 autres petites localités autour. Je me demande bien comment en aussi peu de temps, nos inspecteurs auraient pu établir le bilan de ces massacres. Les chiffres avancés dans la presse internationale, ne sont que des allégations. La MONUC s’est rendu dans trois localités. Après 4 heures sur le terrain, les premiers rapports font état de 250 morts. Nos experts, en conjonction avec le Haut Commissariat des Droits de l’Homme de Genève, retourneront sur les lieux pour déterminer avec précision les circonstances de ce massacre. Cette commission pluridisciplinaire rendra son rapport dans trois semaines.
Afrik.com : Qui est à l’origine de ce nouveau massacre ?
Patricia Tome : Il est encore très tôt pour établir avec certitude l’identité de ces assaillants. Mais vous savez, Drodro fait partie de la province d’Ituri, zone stratégique convoitée pour son sous-sol. Et les conflits qui y ont lieu sont à la fois inter ethniques et sous régionaux.
Afrik.com : L’Ouganda et le Rwanda seraient-ils impliqués ?
Patricia Tome : Les responsabilités ne sont pas encore établies, mais ces deux pays frontaliers, ont bien à un moment ou à un autre été présents dans les conflits dans cette partie du pays. En effet, pour le contrôle de la province, de part et d’autre de Bunia, ( nord est, frontière ougandaise) les Hemmas et les Lendus s’affrontent régulièrement. De même, au niveau de la sous région, l’Ouganda et le Rwanda au travers des milices de l’Union Patriotique du Congo ( UPC ), dont il se servent ont bien une part de responsabilité, qu’il reste à établir. Dans ce conflit, je tiens à préciser qu’il n’y a pas d’un côté des victimes et de l’autre des bourreaux. La tâche est d’autant plus difficile que la MONUC ne dispose pas de forces sur le terrain. Nous avons juste des observateurs pour accompagner le processus de paix.
Afrik.com : Ce nouveau massacre ne compromet-il pas la paix en R.D.C ?
Patricia Tome : Il est évident que ces massacres ne sont pas faits pour réjouir. Ils interviennent au lendemain de la signature des accords de paix signés en Afrique du Sud entre le président Kabila et les rebelles. Il est à espérer que les chefs de guerre se plient au processus de paix. Les forces armées étrangères présentes dans la région devront elles aussi se plier aux accords.