Pour la première fois, un responsable gouvernemental français a rendu hommage ce dimanche, aux victimes algériennes du 8 mai 1945 lors de la commémoration du 70ème anniversaire du massacre de Sétif.
Le secrétaire d’État français chargé des Anciens combattants, Jean-Marc Todeschini, était ce dimanche en Algérie, pour rendre hommage aux victimes algériennes de Sétif du 8 mai 1945, sous la colonisation française.
70 ans après les massacres qui a fait des milliers de morts, c’est la toute première fois qu’un membre du gouvernement français se rend sur les lieux du drame, considérés comme le véritable premier acte de la guerre d’Algérie.
« Ce dimanche, pour la première fois, à la parole viendra s’ajouter le geste, traduction concrète de l’hommage de la France aux victimes et de la reconnaissance des souffrances infligées » aux Algériens, a déclaré Jean-Marc Todeschini, jugeant que son voyage est un « geste fort », selon des propos rapportés samedi par APS.
Accueilli à l’aéroport de Sétif par son homologue, Tayeb Zitouni, le ministre des moudjahidine, Jean-Marc Todeschini a déposé une gerbe de fleurs devant le Mausolée de la première victime de la répression du 8 mai 1945, Saal Bouzid, tué pour avoir brandi le drapeau algérien.
Le 8 mai 1945
Ce jour-là, la France célébrait la victoire des Alliés sur l’Allemagne nazie. Les Algériens descendent dans les rues, drapeaux algériens à la main, pour célébrer la fin de la deuxième Guerre mondiale et revendiquer la fin du colonialisme. C’est ce que la France avait promis aux Algériens contre leur participation dans les rangs de l’armée française aux cotés des alliés contre les Allemands. Les Algériens ont également revendiqué la libération d’un leader nationaliste, Messali Hadj, arrêté quelques semaines plus tôt.
Les festivités tournent à l’émeute et cette journée devient l’une des pages les plus noires de l’Algérie française. Le mouvement atteint ensuite les villages alentours, notamment Guelma et Kherrata. L’armée intervient et La répression dure jusqu’au mois de juillet.
Cette répression des manifestations, considérée comme déclencheur de la guerre d’indépendance, a fait plusieurs milliers de morts parmi les Algériens – jusqu’à 45 000, selon la mémoire collective algérienne – victimes de la police, de l’armée ou de milices de colons. Une centaine d’Européens, prise à partie par des nationalistes algériens, a également été tuée.
Vers une réconciliation entre la France et l’Algérie !
Cette démarche symbolique et historique marque une nouvelle page dans l’histoire commune et la relation entre l’Algérie et la France.
En février 2005, l’ambassadeur de France en Algérie, Hubert Colin de Verdière, avait reconnu une responsabilité de la France dans le massacre de Sétif en évoquant une « tragédie inexcusable ». Mais aucun membre du gouvernement français ne s’y était jusqu’ici rendu pour commémorer cette page sombre de l’histoire franco-algérienne.
François Hollande a reconnu en décembre 2012 lors de sa visite à Alger, les « souffrances que la colonisation a infligées » aux Algériens et dénoncé un « système (colonial) profondément injuste et brutal », mais le travail de mémoire reste compliqué entre les deux pays.
L’Algérie demande plutôt des excuses pour le passé colonial de la France et qu’elle aille au-delà de sa politique de « petits pas ». Paris de son coté se refuse pour l’heure à faire acte de « repentance » tout en reconnaissant que la relation franco-algérienne doit reposer sur un « socle de vérité ».
Cet hommage a eu lieu trois semaines avant la date-anniversaire des massacres pour des raisons d’agenda selon l’entourage du ministre. Los de cette visite en Algérie, Jean-Marc Todeschini s’est aussi rendu à Mersa-el-Kebir, dans le golfe d’Oran, pour commémorer le 75ème anniversaire de l’attaque de la marine française par les britanniques en juillet 1940, pour éviter que la base, sous contrôle de Vichy, ne tombe aux mains des Allemands. 1927 marins français y ont perdu la vie.