La communauté congolaise banyamulenge a commémoré ce mercredi les 10 ans du massacre de Gatumba au cours duquel 160 banyamulenge congolais, réfugiés dans un camp au Burundi, furent tués. L’impunité reste totale aujourd’hui malgré les promesses.
La communauté congolaise banyamulenge a commémoré ce mercredi les 10 ans du massacre de Gatumba. Le 13 août 2004, des membres des Forces nationales de libération (FNL), un mouvement de burundais hutus, attaquent un camp où se sont réfugiés des banyamulenge congolais, des tutsis originaires du Sud-Kivu ayant fuit les combats en RDC, faisant 160 morts et une centaine de blessés.
Un massacre ethnique
Le caractère ethnique de ce crime n’est pas à prouver. « Les attaquants les ont pris pour cible en fonction de leur appartenance ethnique en tirant sur eux ou en les brûlant vifs, et épargnant les réfugiés d’autres ethnies ainsi que les Burundais vivant dans une autre partie du camp », rapporte l’ONG Human Rights Watch.
Aucun responsable n’a encore été jugé. « Nous sommes abandonnés, même si nous continuons à demander justice », a indiqué à RFI un sénateur congolais issu de la communauté banyamulenge, Maître Moïse Nyarugabo. Il était présent ce mercredi sur les lieux du drame, réclamant inlassablement justice pour les disparus. « Aucune convocation, aucun interrogatoire, aucune arrestation. Ces criminels se promènent toujours sans être inquiétés », a expliqué l’avocat congolais.
« Le massacre de Gatumba était une attaque directe et délibérée contre des civils non armés », a affirmé le directeur de la division Afrique à Human Rights Watch, Daniel Bekele. « Les meurtres ont été bien documentés, et pourtant dix ans plus tard personne n’a encore été traduit en justice », a-t-il précisé.
Les responsables sont connus
Le président de l’association de rescapés de Gatumba et survivant du massacre, Olivier Mandévou, a beau pointé les « les rapports produits par la MONUC, l’ONUB et la Commission des droits de l’Homme au sein des Nations unies », qui mettent tous en avant le rôle joué par les membres des Forces nationales de libération (FNL) et de leur leader, Agathon Rwasa, rien n’y fait. Les FNL eux-mêmes avaient revendiqué la responsabilité de l’attaque au lendemain du massacre quand leur porte-parole à l’époque, le Pasteur Habimana, l’avait justifié à la radio en déclarant que des combattants étaient réfugiés dans ce camp où circulait beaucoup d’armes. Il s’était rétracté quelques années plus tard.
La justice burundaise n’a pas réagi à l’occasion de ce triste anniversaire tandis qu’Agathon Rwasa continue à clamer que ces accusations sont un « coup orchestré par le pouvoir burundais pour l’écarter des élections générales de 2015 ». L’espoir d’un jugement avait néanmoins resurgit il y a un an quand le procureur général du Burundi, Valentin Bagorikunda, avait indiqué qu’un dossier judiciaire avait été ouvert contre Agathon Rwasa et le Pasteur Habimana.
Une commission vérité et réconciliation a aussi été ouverte il y a trois mois pour enquêter sur les violations graves des droits humains et du droit international humanitaire commises entre 1962 et 2008 au Burundi. Au cours de cette période, des dizaines de milliers de personnes ont été tuées au cours de crime à caractère ethnique. Le massacre de Gatumba est l’un des plus retentissant de la période récente. Des tensions entre Banyamulenge et d’autres groupes ethniques perdurent encore aujourd’hui et conduisent à des affrontements réguliers en République démocratique du Congo (RDC).