De nombreux pays africains ont dénoncé l’offensive aérienne perpétrée par Israël et qui a touché, dans la nuit de samedi à dimanche, le village de Cana, dans le Sud du Liban. Cette attaque, qui a fait une cinquantaine de victimes, pour la plupart des enfants, est la plus meurtrière depuis le début de l’offensive lancée par Tsahal contre le Hezbollah dans le Sud Liban.
Par Louise Simondet
Stupeur et indignation… Le monde s’est réveillé dimanche avec la vision du carnage de Cana, dans le Sud Liban. Le continent africain, et en particulier les pays musulmans, ont été particulièrement choqués par cette boucherie qui a fait plus d’une cinquantaine de victimes. Des civils, dont principalement des enfants, sont décédés suite aux bombardements intenses de l’armée israélienne sur le village de Cana, situé à l’est de la ville côtière de Tyr. Dans la nuit de samedi à dimanche, l’aviation de Tsahal a ciblé, entre autres, un immeuble de trois étages où la population s’était réfugiée quelques heures plus tôt. Cette attaque est la plus meurtrière depuis le début des hostilités dans le Sud du Liban, déclenchées par l’enlèvement de deux soldats israéliens et la mort de huit autres dans une attaque transfrontalière, perpétrée par le Hezbollah, il y a une vingtaine de jours. Israël avait décidé dimanche de suspendre son offensive aérienne, laissant un répit de 48 heures pour permettre à la population libanaise de cette région d’évacuer.
Mais la trêve fut de courte durée puisque l’aviation israélienne aurait lancé lundi après-midi des attaques dans le secteur du village de Taybeth, toujours dans le sud du Liban, rapporte LCI. Le gouvernement israélien a exclu tout cessez-le-feu et n’entend pas relâcher la pression sur le groupe terroriste chiite. Tel-Aviv a averti qu’elle se réservait le droit de continuer d’attaquer d’éventuels commandos du Hezbollah. L’autorité israélienne a tout de même exprimé des « regrets » face au bombardement de Cana, mais a rejeté la faute sur la mouvance terroriste en affirmant que le village était le refuge de combattants chiites qui se servaient de la population pour se fondre dans la masse. Face à ces massacres, le Liban, choqué, accuse Israël de « crimes contre l’humanité » et de « crimes de guerre », rapporte l’AFP. Quant au Hezbollah, il a promis des représailles. La tragédie de Cana a provoqué la réprobation de la communauté internationale et déclenché des manifestations aux quatre coins du monde. De nombreux pays d’Afrique ont fait part de leur soutien au Liban et condamné vigoureusement ce raid aérien.
Réactions unanimes en Afrique
Un deuil national a été observé lundi au Liban en mémoire des victimes de Cana. La Tunisie, quant à elle, a décrété un deuil de trois jours. La chaîne publique tunisienne, Canal 7, a interrompu ses programmes pour diffuser en boucle des versets du Coran, alors qu’au même moment, les drapeaux étaient mis en berne sur les bâtiments officiels, rapporte l’AP. Les manifestations culturelles et artistiques ont été annulées durant la période de deuil. La Tunisie s’était dit dimanche « profondément choquée et consternée », par l’attaque aérienne meurtrière. Que ce soit en Tunisie, à l’île Maurice, en Algérie ou en Afrique du Sud, le credo est le même. Ces attaques sont vivement condamnées et les gouvernements africains demandent pour la plupart un cessez-le-feu immédiat.
Ainsi, l’île Maurice dénonce, dans un communiqué, « les attaques israéliennes contre le Liban » et l’usage que fait Israël de sa force militaire pour frapper de « manière indiscriminée » le Liban et la Palestine. A coté, la Libye affirme « son soutien le plus total » au Liban face à « l’agression barbare du régime sioniste » dont le pays est l’objet depuis près de trois semaines. Le président sud-africain, Thabo Mbeki, a exprimé dans une lettre officielle « son intense indignation » et a souligné que l’Afrique du Sud soutiendrait tous les efforts des Nations Unies pour aboutir à un cessez-le-feu, précisant : « Un élément essentiel est que nous devont arrêter les hostilités maintenant ». Le gouvernement sénégalais dénonce « l’usage disproportionné de la force et les tueries de civils innocents de la part de l’Etat d’Israël », exprime sa solidarité et appelle à « la cessation immédiate des dérives et surenchères de tout bord ».
Ahmed Abul Gheit, ministre égyptien des Affaires étrangères, a exprimé « la colère » de l’Egypte face au bombardement de Cana. Il a déclaré que le Caire considérait le gouvernement israélien comme « entièrement responsable de l’incident de Cana et a appelé à un cessez-le-feu immédiat ». L’Egypte est l’un des seuls pays arabes, avec la Jordanie, à avoir signé des traités de paix et à entretenir des relations diplomatiques avec Israël. Le ministère marocain des Affaires étrangères et de la Coopération a indiqué : « Le Royaume du Maroc condamne fermement l’agression odieuse perpétrée par Israël contre le village de Cana, au Liban frère ». Pour l’Algérie, ce massacre est « le témoignage accusateur de la faillite morale et politique de ceux qui font une guerre injuste au peuple libanais depuis plus de deux semaines ».
Force d’interposition et aide humanitaire
Depuis le début de l’offensive israélienne, le nombre de morts libanais a dépassé les 600 et plus de 750 000 personnes ont été déplacées, rapporte le gouvernement libanais à l’agence de presse Xinhua. Une situation alarmante qui fait craindre un désastre humanitaire. Face à cette réalité, les pays africains ont sommé la communauté internationale d’intervenir. Ils souhaitent majoritairement envoyer au plus vite de l’aide à la population pour contrer cette crise. Le ministère tunisien de la Santé publique a annoncé « la mise en place d’une collecte de don du sang dans les principales villes du pays », rapporte l’AP. En parallèle, il appelle la communauté internationale à « déployer une force de maintien de la paix dans la région sous l’égide de l’ONU ».
Le président sud-africain Thabo Mbeki a indiqué que « son pays fournirait une aide humanitaire au Liban, dès qu’il aurait déterminé quels étaient les besoins ». L’Egypte a pour sa part appelé à « une intervention internationale pour empêcher une nouvelle détérioration de la situation. Le Maroc souhaite quant à lui que « les pays et les organisations influentes agissent en vue de mettre fin à la guerre » et opte pour « le dialogue et la négociation ». L’île Maurice a annoncé son soutien à toute initiative de l’Onu. Tripoli a décidé l’organisation immédiate d’un pont aérien en vue d’apporter au peuple libanais toutes les aides médicales, alimentaires et autres. De plus, l’Etat libyen envisage de collecter à partir de dimanche des dons pour le Liban.
Le Comité international de la Croix Rouge (CICR) s’est déclaré, lundi, « très inquiet » du grand nombre de victimes civiles à la suite du bombardement de Cana et « du manque de respect pour le droit humanitaire international dont font preuve les parties en conflit », rapporte Radio Chine internationale. L’aide arrive petit à petit au Sud-Liban. Deux avions égyptiens ont apporté lundi du matériel pour un hôpital de campagne. Deux avions des Emirats arabes unis, un appareil venu de France et un avion jordanien ont également acheminé de l’aide pour la population civile, rapporte Reuters. Les initiatives de solidarité foisonnent, mais cela sera-t-il suffisant ?