Aboubakr Jamaï, directeur de publication du Journal Hebdomadaire, influent journaliste, critique envers le roi du Maroc Mohamed VI, a annoncé jeudi qu’il démissionnait en raison des pressions du gouvernement. Il envisage de s’exiler à l’étranger avec sa famille.
Le journaliste, sous le coup de nombreuses amendes et poursuites inspirées par le gouvernement, a déclaré à l’agence Associated Press qu’il quittait immédiatement ses fonctions afin de libérer « Le Journal » du poids de ses dettes qui mettent en danger l’existence même du titre.
Le mois dernier, le ministère de la Justice a condamné M. Jamaï et l’ancien journaliste du « Journal Hebdomadaire » Fahd Iraqi à payer 3 millions de dirhams (€270.000; US$349.000), ce qui représente la plus lourde amende de l’histoire du Maroc. Le gouvernement a assuré que les poursuites visant Aboubakr Jamaï n’étaient pas destinées à couler l’hebdomadaire.
M. Jamaï, qui sera remplacé par le co-fondateur du Journal Ali Amar, n’a pas l’intention de continuer d’écrire dans la publication depuis l’étranger car il estime que cela reviendrait à aider le gouvernement « à faire croire aux gens qu’il y a une vraie liberté de la presse dans ce pays ».
Les poursuites en diffamation et la condamnation lundi de deux journalistes trois ans de prison avec sursis pour des plaisanteries liées à l’islam suggèrent un durcissement du régime alors que ces dernières années le royaume avait assoupli le contrôle des médias.
Pour l’organisation de défense des médias Reporters sans frontières (RSF), qui a fait part sur son site Web de sa « consternation », la démission d’Aboubakr Jamaï vient « confirmer une détérioration notable de la liberté de la presse au Maroc ». Cela « marque la fin d’une époque où, malgré les difficultés, il semblait possible de faire progresser la liberté d’expression. Aujourd’hui cet espoir, s’il n’a pas totalement disparu, est de plus en plus ténu. »