Le roi Mohammed VI a réitéré ce mercredi « la nécessité de procéder à la régularisation » des sans-papiers au Maroc. Une annonce faite au lendemain de la publication du rapport du CNDH.
Au lendemain de la publication du rapport du Conseil national des droits de l’Homme au Maroc (CNDH), le roi Mohammed VI a tenu, ce mercredi, au palais de Casablanca, une réunion de travail avec, entre autres, son Premier ministre, Abdelilah Benkirane, ainsi que les ministres de l’Intérieur, des Affaires étrangères, de la Justice. Selon une dépêche de la MAP, le souverain a souligné au cours de cette réunion que « le Maroc est devenu une terre d’accueil pour les migrants. Ainsi, à titre d’illustration, le nombre d’immigrés issus des pays d’Afrique Subsaharienne a quadruplé ». Mohammed VI a en ce sens « réitéré la nécessité de procéder à la régularisation de la situation de ces personnes en matière de résidence et d’activités qu’elles exercent, au même titre que les immigrés réguliers des autres nationalités, dont les immigrés subsahariens ».
Mohammed VI affiche donc son ambition de suivre les recommandations du CNDH de « reconnaître (…) le statut de réfugiés délivré par le HCR, en délivrant aux réfugiés statutaires un titre de séjour », ou bien de régulariser à titre « exceptionnel » certains migrants en situation irrégulière. Mais cette volonté, comme l’a souligné le roi, ne peut changer le fait que le pays « ne saurait accueillir tous les migrants qui souhaitent s’y installer ».
Maroc : « une grande terre d’émigration »
Dans son rapport, le CNDH indique que « le Maroc est à la fois une grande terre d’émigration depuis la première vague de la Première guerre mondiale et une terre d’immigration et d’accueil, même si la conscience collective n’a pas intégré cette donnée historique ». En effet, les ONG dénoncent des cas de maltraitance de migrants subsahariens au Maroc. Dernier drame en date, l’assassinat du jeune Sénégalais Ismaila Faye, poignardé à la gare routière de Kamra, à Rabat, pour une histoire de place dans un bus. Cet acte, qui peut s’apparenter à une action raciste, a été sévèrement condamné dans le royaume par les militants des droits de l’Homme.
Quelques jours auparavant, c’est Alain Toussaint, 40 ans, enseignant à Rabat, qui perdait la vie. Ce dernier qui rendait une visite à des amis à Tanger a été interpellé lors d’une opération « nettoyage » qui aurait visé à arrêter et à conduire des sans-papiers à la frontière algérienne, en plein désert. Alors qu’Alain Toussaint tentait de prouver la validité de sa carte de séjour, il aurait été poussé du bus en pleine route par un policier. Il décédera cinq jours plus tard à l’hôpital Mohammed VI de Tanger. Pour freiner ce phénomène, le Parti Authenticité et Modernité (PAM) a déposé à la Chambre des représentants un texte visant à sanctionner le racisme anti-Noir.
Aucunes dérives ?
Dans son communiqué, le palais reconnaît que la lutte contre l’immigration illégale « connaît parfois certains excès », des cas « isolés », ajoute le communiqué. Cela dit, « le Maroc refuse catégoriquement toutes les allégations fallacieuses qui tentent de porter atteinte à sa réputation ». Pourtant, de nombreuses associations, dont l’Association marocaine des droits humains (AMDH), dénoncent depuis plusieurs années les actes de racisme contre les migrants subsahariens commis notamment par les forces de l’ordre. De nombreux témoignages indiquent que les dérives sont fréquentes et que lors des opérations de ratissage, les migrants sont systématiquement reconduits aux zones frontalières, en plein désert…
Le Maroc prend un nouveau tournant et à en croire le palais, le pays semble vouloir redorer son blason en reconsidérant sa politique d’immigration. Les conseils du CNDH ont, en apparence, déclenché une certaine prise de conscience. Reste à savoir si dans la pratique, les engagements pris seront réellement respectés.