Le Maroc connaît sa première grève générale depuis dix ans, lancée par cinq syndicats importants pour protester contre une nouvelle loi encadrant le droit de grève et dénoncer la précarité des travailleurs. Avec des revendications sur le pouvoir d’achat, le chômage et le respect des droits syndicaux, ce mouvement incarne une inquiétude croissante face à la situation économique et sociale du pays.
Le Maroc a connu, ce 5 février 2025, une grève générale de deux jours, marquée par une mobilisation d’envergure des cinq principaux syndicats du pays. Il s’agit de la première grève générale depuis dix ans. La grève a vu l’arrêt des activités dans divers secteurs, notamment dans l’enseignement, l’administration publique, certaines usines comme celles de Renault à Casablanca et Tanger, ainsi que dans les mines. Les syndicats ont exprimé de vives inquiétudes concernant plusieurs problématiques, parmi lesquelles le pouvoir d’achat, le chômage élevé, et surtout la récente loi qui encadre le droit de grève, jugée liberticide par les syndicats.
L’une des principales raisons de cette grève est l’adoption par le Parlement marocain d’une loi encadrant le droit de grève. Les syndicats considèrent cette législation comme une restriction inacceptable de leurs droits. Bien qu’il existe quelques concessions du gouvernement, telles que l’interdiction du recours à des salariés de remplacement en cas de grève, la loi est jugée trop contraignante. Younes Firachine, membre du bureau exécutif de la Confédération Démocratique du Travail, a dénoncé ce qu’il appelle « une loi liberticide ».
Important outil de défense pour les travailleurs
Le syndicaliste a souligné que la nouvelle législation donne au chef du gouvernement un pouvoir excessif pour arrêter une grève. Cette situation, selon Firachine, instaure une « double punition » pour les travailleurs grévistes, renforçant la pression sur un mouvement syndical déjà fragilisé. La crainte des syndicats est que cette loi permette au gouvernement de réduire le droit de grève à une simple formalité administrative, limitant ainsi l’impact de ce moyen de pression légitime. Cette décision a provoqué une réaction unanime des syndicats, qui estiment que le droit de grève doit rester un important outil de défense pour les travailleurs.
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La grève générale, bien qu’organisée dans un climat tendu, a connu un certain succès, notamment dans le secteur de l’éducation et de l’administration publique. Dans des usines comme celles de Renault à Casablanca et Tanger, ainsi que dans les mines, des travailleurs ont également rejoint la mobilisation. Le mouvement a été particulièrement marqué dans les grandes villes du royaume, où des piquets de grève ont été installés pour revendiquer une meilleure reconnaissance des droits des travailleurs.
Le pouvoir d’achat des Marocains durement frappé
L’une des principales préoccupations des syndicats concerne le pouvoir d’achat des Marocains. Le coût de la vie a considérablement augmenté ces dernières années, en particulier avec la flambée des prix des produits alimentaires de base, comme la viande et le poulet, ainsi que d’autres matières premières indispensables. Dans un contexte d’inflation galopante, la situation devient de plus en plus intenable pour les travailleurs marocains. De plus, bien que des augmentations salariales aient été promises, notamment avec une hausse du salaire minimum de 10%, la majorité des employeurs ne respectent pas ces engagements, selon les syndicats. Cette situation alimente un sentiment de frustration et d’injustice parmi les travailleurs.
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Le taux de chômage au Maroc a atteint des niveaux alarmants, en particulier parmi les jeunes. Avec un taux global de chômage supérieur à 13%, la situation est encore plus grave pour les moins de 30 ans, qui représentent près de 37% des demandeurs d’emploi. Cette situation est une source de mécontentement, d’autant plus qu’elle empêche une partie significative de la population d’accéder à des emplois stables et rémunérés.
Des luttes similaires à travers le Maghreb et l’Afrique
Dans plusieurs pays d’Afrique, les travailleurs sont confrontés à des défis similaires, notamment en ce qui concerne les salaires insuffisants, le chômage et les conditions de travail précaires. En Algérie, par exemple, les syndicats ont régulièrement organisé des grèves pour protester contre les bas salaires et l’absence de réformes sociales. Le pays a également vu des mouvements de grève dans le secteur public, où les employés réclament de meilleures conditions de travail et des augmentations salariales.
En Tunisie, la question du droit de grève a également été un sujet de discorde, notamment après la promulgation de lois restrictives qui ont limité les actions syndicales. Les grèves dans le pays sont souvent liées à des revendications sociales, et les syndicats jouent un rôle clé dans la défense des droits des travailleurs. Au niveau continental, des mouvements similaires peuvent être observés dans des pays comme l’Afrique du Sud et le Nigeria, où les syndicats se battent pour de meilleures conditions de travail et un accès équitable aux opportunités économiques.