Tortures, arrestations, violences répétées sur des émeutiers… Sidi Ifni ne compte plus les brutalités perpétrées sur ses habitants. Les images des débordements policiers ont déferlé sur le web depuis une semaine. On y voit les forces de l’ordre frappées des protestataires, les photos d’ecchymoses des victimes causés par les matraques… Depuis le début des échauffourées du 30 mai dernier qui ont opposé des émeutiers à la police, cette ville marocaine stigmatise les problèmes sociaux et économiques qui secouent le pays.
Les vidéos ne sont pas toujours de bonne qualité. Mais entre deux mouvements brusques de caméra, on peut entrevoir les actes de violences que la police inflige aux habitants de Sidi Ifni, une ville du sud-ouest marocain. Sur ces images diffusées sur le net, il est question de pillages, de viols, d’assassinats, de tortures… les témoignages défilent, des femmes, des hommes, tous se racontent.
Depuis plusieurs années, Sidi Ifni se bat pour obtenir des aides de l’Etat. Bien que cette ville dispose d’un port très riche, la région reste sous développée et compte un taux de chômage supérieur à la moyenne nationale qui s’établit à 9,7 % en 2007. Mais le 30 mai dernier, la situation prend un nouveau tournant. Des émeutiers bloquent le port pour manifester contre leurs conditions de vie. S’en suivront une longue série d’affrontements musclés entre protestataires et forces de police comme en témoignent ces deux vidéos du 20 août 2008, date à laquelle les manifestants avaient une nouvelle fois pris en otage le port de la ville, bloquant ainsi l’activité économique.
Une altercation musclée
Au début, cela ressemble à une simple altercation. Mais au fur à mesure que progresse le film, les images témoignent d’une autre réalité. Des policiers frappent violemment à coups de pied et à coups de matraques un homme en casquette blanche qui ne semble pas répondre à ces assauts. Il ne s’agit pas ici de cas de légitime défense. Il est question ici de bavures policières. Et l’histoire ne s’arrête pas là. Dans une seconde vidéo, il est question d’un homme assommé par les coups répétés des policiers en casque blanc.
Un homme à terre
Les images d’ecchymoses dues aux violences policières viennent appuyer les films amateurs précédents. Les blessures aux bras, aux jambes, au dos témoignent de la brutalité des coups.
Les marques des violences policières
Au vu des coups infligés aux émeutiers et aux habitants qui sont venir les soutenir, plusieurs associations des droits de l’homme comme l’Association marocaine des Droits de l’Homme (AMDH) et le Centre marocain des droits de l’homme (CMDH) dénoncent les agissements des forces de l’ordre. La réponse ne se fait pas attendre. Au CMDH par exemple, un membre du bureau national, Brahim Sbaalil, est condamné à une peine de six mois d’emprisonnement pour « outrage aux autorités publiques en faisant état de crimes fictifs » et à une amende de 1000 dirhams. Un jugement, confirmé le 26 août par la Cour d’appel de Salé, mais que conteste le président du CMDH Khaled Cherkaoui. Interrogé par afrik, il a déclaré que « le magistrat n’a pas pris en considération les avocats de Sbaalil, le jugement a été bâclé ».
Outre les violences policières, les habitants relatent dans un film propagandiste certaines scènes de pillages et de viols qui ont eu lieu le 7 juin dernier après le blocage du port. Aux témoignages de la population se mêlent les histoires des arrestations des deux membres d’ATTAC Maroc, Fatima Kiddad et Khalil Rifi, engagés dans le blocage. Tous reprochent aux autorités marocaines leur laxisme face aux difficultés de vie des habitants de Sidi Ifni.
Les témoignages de la population
Malgré un retour au calme, il semblerait, au vu de la succession de vidéos sur les émeutes que les habitants de Sidi Ifni n’ont pas dit leur dernier mot. Des images qui serviront peut-être de preuves à la commission parlementaire formée le 18 juin pour faire la lumière sur les événements du 7 juin 2008.
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