Maroc : le journaliste Ali Anouzla de nouveau face aux juges


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Le journaliste indépendant du journal en ligne Lakome sera présenté ce mardi pour la seconde fois devant un juge d’instruction pour apologie du terrorisme.

Les chefs d’accusations qui pèsent contre lui sont graves. Le directeur du site d’information arabophone Lakome, Ali Anouzla, arrêté puis incarcéré le 17 septembre dernier pour « assistance matérielle », « apologie et incitation à l’exécution d’actes terroristes », sera présenté, pour la seconde fois, devant un juge, ce mardi. Sa détention provisoire et son procès font suite à l’édition d’un article qui renvoie sur une information du site espagnol El Pais dans laquelle une vidéo d’AQMI, intitulée : « Maroc : le royaume de la corruption et du despotisme », a été publiée. Le film qui vise directement le roi, appelle au Djihad au Maroc et à la fin du « despotisme ». Une enquête avait été ouverte dans le cadre de la loi antiterroriste avant une éventuelle mise en examen.

Les pressions contre les autorités marocaines, qui cumulent les polémiques notamment après l’affaire du pédophile Daniel Galvan et celle d’un couple d’ado arrêté après s’être embrassé, sont vives. Une importante mobilisation a vu le jour dès les premiers instants de son incarcération. Un collectif de 60 organisations internationales des droits humains, dont Human Rights Watch et Amnesty International, demandent la libération immédiate du journaliste Ali Anouzla. Elles expliquent, arguments à l’appui, que les charges liées au terrorisme retenues contre lui n’ont aucun fondement dans le droit international. Elles estiment que la liberté d’expression du journaliste a été entravée et pointent du doigt une détention arbitraire.

Une situation embarrassante

C’est également l’avis d’Aboubakr Jamaï, cofondateur et directeur de la version francophone de Lakome. Indigné, il pense que « les accusations de terrorisme ne tiendront pas » et que les autorités trouveront autre chose pour emprisonner le journaliste. Ali Anouzla est depuis de nombreuses années dans le collimateur des autorités marocaines en raison de sa position critique à l’égard de l’institution et de la monarchie.

Des députés européens ont été saisis du dossier et des comités de soutien se sont créés en France. Quelques jours plus tôt en outre-Atlantique, le 2 octobre, c’est l’administration Obama, par la voix du secrétaire d’Etat John Kerry, qui exprimait les « préoccupations » des Etats-Unis suite à la « décision du gouvernement marocain de poursuivre Ali Anouzla ». « Nous soutenons la liberté d’expression, la liberté de la presse et les droits universels », avait déclaré John Kerry. Le signal envoyé par la diplomatie américaine est on ne peut plus clair. « Sur ce dossier, nous invitons les autorités marocaines à agir avec transparence et justice, conformément à la loi marocaine et les engagements marocains », a-t-elle indiqué avant d’annoncer que « des négociations franches avec le gouvernement marocain » sont menées.

Voilà plusieurs semaines que le chef de l’Etat marocain, le roi Mohammed VI, et son gouvernement s’attirent les foudres des ONG, de la presse et même de ses alliés à l’international. Cette affaire a désormais pris une toute autre tournure. Ali Anouzla est-il devenu un prisonnier politique ? Lui qui pensait accomplir son travail de journaliste, a finalement été emporté par une incroyable spirale judiciaire.

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