Le Maroc est aujourd’hui sur une poudrière avec ses vagues de contestation. En un peu plus d’un mois, au moins trois mouvements ont été enregistrés et chacun d’eux est quasiment un coup de massue porté sur la personne-même de Mohammed VI qui est visé. Tout en retrait, le roi expose cependant son Premier ministre qui, si nécessaire, devra servir d’agneau de sacrifice.
En juillet dernier, le Maroc avait été secoué par l’affaire du pédophile espagnol, Daniel Galvan. Condamné à 30 ans de prison pour le viol de 11 mineurs, ce sexagénaire avait été gracié ainsi que 47 autres prisonniers espagnols. Cette grâce avait provoqué une vague d’indignation au Maroc, où plusieurs centaines de manifestants étaient descendus dans la rue pour protester contre la décision de Mohammed VI. Un soulèvement populaire qui avait poussé le monarque à faire machine arrière, arguant qu’il « n’a jamais été informé de la gravité des crimes abjects pour lesquels l’intéressé a été condamné. L’enquête a conclu que ladite administration, lorsqu’elle a été sollicitée par le Cabinet royal, a transmis par inadvertance des informations erronées de la situation pénale de l’intéressé », avait indiqué un communiqué du Palais royal. Une méprise à laquelle le directeur de l’administration pénitentiaire n’avait pas survécu, puisqu’il avait été limogé par le souverain. L’hémorragie était vite stoppée.
Le 20 août dernier, lors du discours à la nation prononcé à l’occasion du 60e anniversaire de la révolution du roi et du peuple, Mohammed VI n’avait pas hésité une seconde à imputer à son Premier ministre Benkirane les nombreux problèmes qui handicapent la mise en place d’un enseignement efficace. Un dossier sensible au Maroc où 30% de la population ne sait ni lire, ni écrire. Ce jour, Mohammed VI avait dénoncé les « calculs politiciens et la polémique stérile » qui ne font que retarder la mise en œuvre d’une réforme profonde et l’élaboration d’une feuille de route solide pour l’éducation. Il avait accusé Benkirane et son ministre de l’Education, Mohamed el-Ouafa, d’avoir marginalisé le Plan d’urgence pour l’enseignement. Ayant reçu la patate chaude, le monarque avait vite fait de la remettre à son Premier ministre. Et ce n’était pas la première fois. Aujourd’hui, la tension enfle au Maroc avec des séries de contestation. Outre l’arrestation récente du journaliste Ali Anouzla qui a occasionné une marche de protestation, les Marocains ne décolèrent pas face à la hausse des prix des denrées, notamment le lait et le carburant.
Pour le moment, Mohammed VI reste aux aguets et tâte avec la plus grande vigilance le pouls de son peuple qui ne décolère toujours pas. Pour sûr, si jamais son fauteuil est menacé par une contestation qui peut enfler davantage à tout moment, il fera comme d’habitude : trouver un cobaye et si nécessaire, dégommer son Premier ministre Benkirane qui a bon dos pour accuser toutes les failles d’un système dont il n’est forcément pas le principal décideur.