Champion de France de boxe française en 2006, finaliste européen, Mario Do Souto Semedo est un champion au parcours singulier. Afrik l’a rencontré lors du Gala du 21 octobre 2006 à Nice Acropolis…
Afrik : Vous êtes Champion de France de boxe française en 2006, finaliste européen, et vous venez de combattre lors du Gala du 21 octobre 2006 à Nice Acropolis… C’est un peu la reprise, comment s’est passé ce gala pour vous ?
Mario Do Souto Semedo : Pour un combat de préparation, pour une entrée en matière, ce gala m’a rappelé que tous ceux que je vais rencontrer aujourd’hui, ce pour quoi ils s’entraînent, c’est pour me vaincre. En tant que champion de France, finaliste européen, je suis celui qu’on veut déloger de sa première place. Ceux que je rencontre désormais veulent ma place, ils ont l’état d’esprit qui était le mien jusqu’à l’an dernier, ils ont les dents longues. Et les combats qui vont suivre vont être tous des combats décisifs.
Afrik : Quelles sont pour vous les qualités qui distinguent un grand boxeur en boxe française ?
MDSS : Il y en a tellement que je ne saurais toutes vous les dire, mais celles que je souhaite un jour avoir, en un mot, ce sont les qualités « Franck May »… C’est un grand monsieur de la boxe française avec un palmarès exceptionnel, mais c’est encore plus pour moi une référence en tant qu’homme, et en tant qu’entraîneur. Avec un savoir faire, une maîtrise de la discipline, et des qualités humaines qui lui permettent de révéler chez autrui ce qu’il y a de meilleur. J’ai la chance d’appartenir, grâce à lui, avec lui, à un club très solidaire. Tout le monde tourne ensemble, nous nous déplaçons avec les jeunes et ils viennent avec nous. Et parmi les jeunes, qui poussent, derrière, il y a une forte relève qui promet, animée par les mêmes valeurs, celles qui m’ont permis à moi-même d’émerger…
Afrik : Quel a été le combat qui vous a le plus marqué dans votre carrière ?
MDSS : Le combat de tour de poule 2004 contre Frédéric Bellonie, qui régnait sur la catégorie des moins de 85 kilos, où j’ai pris conscience que le travail paye, même si la vie vous pose des petits problèmes. On peut avoir une vie en forme de parcours du combattant… Et arriver à stabiliser sa psychologie et son existence dans l’effort de la boxe. Ma drogue, mon alcool et ma foi, ce fut la Boxe Française, et ça m’a permis de ne pas tomber du côté obscur… Dans les errances où sombrent parfois les jeunes qui n’ont pas de perspectives et le sentiment de ne pas avoir d’avenir.
Afrik : Quelle est votre feuille de route pour l’année qui vient ?
MDSS : Elle est simple : prendre tous les combats comme des finales France et donner le meilleur de ma boxe sur le ring, mais avant tout me faire plaisir…
Afrik : Quel temps consacrez-vous à la boxe dans votre emploi du temps ?
MDSS : Je consacre 4 heures tous les jours, pour mes entraînements propres, et le reste du temps sert pour les cours et les déplacements sur les compétitions avec les jeunes recrues et surtout les futurs compétiteurs, garçons ou filles… Car même si nous ne combattons pas dans la même section, les entraînements et le parcours de formation sont identiques pour les deux sexes. On a parallèlement les mêmes objectifs, et on s’épaule mutuellement. C’est un sport individuel qu’on pratique en équipe.
Afrik : Depuis quand boxez-vous ?
MDSS : Cela fait 5 ans que je fais de la boxe française.
Afrik : Seulement ? Quels sports avez-vous pratiqué avant ?
MDSS : J’ai fait du foot, du basket-ball et à l’âge de 20 ans je suis tombé dans la soupe, comme on dit… J’ai un parcours un peu atypique, ça a été un coup de foudre, je suis entré dans une salle et je me suis senti bien, j’ai trouvé une convivialité, une mentalité, une façon de faire… Je n’ai plus raccroché. Je suis tombé sur des gens qui aimaient le sport, des vrais sportifs qui font ça par passion…
Afrik : Qu’avez-vous trouvé dans la boxe qui vous épanouit davantage ?
MDSS : La paix et la maitrise de soi, un équilibre entre force et mouvement, le parfait compromis entre vivre et survivre… Il est vrai que dans le monde actuel, il faut survivre… Et j’ai trouvé des hommes autour de moi, qui m’ont fait prendre conscience que dans la lutte pour la survie, il faut aussi trouver des moments pour vivre pleinement, en profitant des moments forts, des moments d’émotion où l’on se sent vraiment exister.
Afrik : Avez-vous peur, avant le combat ? Pendant le combat ?
MDSS : Oui, la peur est indispensable, car elle permet d’être en éveil, d’être réactif et à l’affût de son adversaire, mais surtout elle nous garde lucide et concentré. La peur est un acte réflexe chez tout être humain, au début ça nous fait fuir devant le feu, mais ensuite on l’apprivoise et on le cultive… De la peur du froid et de la faim vient aussi la victoire de l’homme préhistorique contre le mammouth… Sans peur il n’y a pas de courage, car la peur nourrit le courage, qui permet de la dépasser, et nous pousse à aller au-delà.
Afrik : Quel rapport entretenez-vous avec le danger : fascination, mise à distance, self-control ?
MDSS : Le danger est un ami de longue date, avec lequel bien souvent j’ai eu à faire, et bien des fois, je l’avoue, je m’en serais bien passé… Mais aujourd’hui c’est un ami que le self control permet de dépasser, et la mise à distance du danger est un besoin vital. Pour construire il faut bâtir solidement et pour bien bâtir il faut de la bonne terre, le danger est une terre aride. Je ne suis pas du tout fasciné par le danger, je le tiens à distance. L’ivresse du danger est mortelle en boxe française. La conscience du danger permet de ne pas se faire surprendre.
Afrik : La boxe française n’est qu’une face de votre vie : vous travaillez aussi pour une Régie Publicitaire ?
MDSS : Oui, la boxe française est encore un sport amateur, c’est sa noblesse mais c’est aussi pour beaucoup d’entre nous une difficulté ! Mon travail pour la régie est un besoin essentiel au niveau alimentaire…Il faut payer son loyer ! Parallèlement je prépare aussi un brevet d’éducateur sportif, qui va me permettre d’allier plaisir et loisir, et là je serai au début de mon objectif… Dans une construction à plus long terme, je voudrais devenir entraîneur et apporter ce bien être, ce plaisir, cette idée de faire et de parfaire… Devenir un bon éducateur pour aider des jeunes comme j’ai pu être aidé moi-même à travers ma vision de cette discipline.
Afrik : Croyez-vous que votre expérience de sportif vous ait aidé à vous affirmer dans votre carrière professionnelle ?
MDSS : Oui, mais pas uniquement dans ma vie professionnelle, mais dans ma vie tout court, dans ma vie de tous les jours, au niveau de l’organisation, de la rigueur, de la persévérance et de ne rien lâcher tant que le but n’est pas atteint… Quand tu n’es pas fils d’archevêque… Si tu veux une cuillère en or dans la bouche, il faut que tu trouves l’or, que tu le fondes, que tu le moules, que tu lui donnes forme… Il faut du temps, de l’énergie, et donc de la constance et de l’optimisme.