La situation pour les couples israélo-égyptiens est de plus en plus difficile en Egypte. Une frange politique se penche même sur un projet de loi interdisant le mariage entre Egyptiens et Israéliennes. L’amour s’arrêterait aux frontières géopolitiques.
Avec la montée des tensions au Proche-Orient, les couples mixtes égypto-israéliens vivent une situation de plus en plus difficile. Certaines campagnes de presse jettent, en effet, le doute sur ces unions en diffusant une rumeur selon laquelle l’Etat juif a recruté des espions dans ces couples mixtes. » Les mariages entre Egyptiens et Israéliennes dans la trahison et l’espionnage » titrait récemment le magazine d’opposition Osbou alors que l’hebdomadaire Akidati, de tendance islamiste, expliquait lui que » les Israéliennes qui se marient avec des Egyptiens sont des agents du Mossad « .
Impossible amour ?
Ces accusations et rumeurs rendent la vie des couples mixtes presque impossible. Mohsen Fawzi, 53 ans, a épousé Hoda Ahmed, une Arabe Israélienne, lorsqu’il travaillait en Israël en 1994. Lors d’un congé l’an dernier en Egypte, il a été frappé d’une interdiction judiciaire de se rendre à l’étranger. Depuis, l’interdiction a été levée par le tribunal administratif mais les services de sécurité l’empêchent de sortir d’Egypte. Sa femme et ses enfants ne sont pas autorisés à séjourner en Egypte plus de trois mois. L’exemple n’est pas unique. Il a même tendance à devenir banal dans une Egypte de plus en plus marquée par la situation politique.
» Il est déplorable que les jeunes Egyptiens n’osent pas révéler leur mariage avec des Israéliennes pour éviter la persécution politique et sociale. D’autant plus que c’est l’Etat lui-même qui a commencé la normalisation. Aucune implication d’espionnage n’a jamais eu lieu parmi ces couples « , indique Saïd Sadek, un sociologue égyptien qui a récemment réalisé une étude autour de ce sujet.
La vie de ces couples n’a rien d’un long fleuve tranquille. D’autant plus que la presse relaie sans cesse les rumeurs d’espionnage. Elle a d’ailleurs parlé de 11 000 mariages entre Egyptiens et Israéliens. Ce que réfute totalement Saïd Sadek, : » les mariages mixtes représentent tout au plus 3 000 couples » dit-il. Il s’agit principalement d’hommes qui ont fui le chômage en Egypte et sont partis en Israël après la signature du traité de paix en 1979. » Certains ont épousé des Israéliennes, mais seuls une quinzaine d’entre eux ont épousé des Israéliennes juives. La plupart ont épousé des Arabes musulmanes ou des chrétiennes de nationalité israélienne « , ajoute Saïd Sadek dans Al Ahram. Mais il semblerait que cela ne soit pas pris en compte.
Des cas parlementaires
Cela pose un tel problème qu’il y a quelques semaines, les mariages mixtes entre Egyptiens et Israéliennes se sont trouvés au centre d’un débat parlementaire houleux. Tout est parti d’une interdiction qu’a formulée Habib el Adeli, le ministre de l’intérieur égyptien. Il a refusé l’entrée sur le sol égyptien d’une femme israélienne d’origine arabe mariée à un Egyptien. Mais la Haute Cour Administrative a annulé cette décision, estimant qu’elle était contraire à la Constitution. Or, cela n’a pas plu à certains députés de gauche et encore moins aux islamistes qui estiment qu’ » autoriser des citoyens israéliens à pénétrer sur le sol national peut nuire dans le contexte actuel de sécurité « .
Depuis, plusieurs députés de diverses tendances préparent un projet de loi pour limiter les mariages mixtes et interdire ceux entre Egyptiens et Israéliennes. » La permission de ce genre de mariages risque de donner naissance à un nouveau type de colonisation plus dangereuse que la colonisation militaire « , estime très sérieusement Al Badri Farghali, du parti du rassemblement unioniste progressiste. Gamal Hachmat, des Frères Musulmans, rappelle aussi que » la loi israélienne accorde aux enfants de l’Israélienne la nationalité et permet la judaïsation des enfants. D’où notre initiative de retirer la nationalité à tout Egyptien se mariant avec une Israélienne « .
Cependant comme le précise Saïd Sadeq, ces lois ont peu de chances d’être retenues. En effet, la religion musulmane tolère l’union d’un musulman avec une non-musulmane qu’elle soit chrétienne ou juive. De plus, la nationalité est un droit que le citoyen ne perd pas, qu’il soit criminel ou espion.
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