Les manifestations contre la vie chère et la mauvaise gouvernance qui secouent le Nigeria, depuis quelques jours, ont obligé le Président Bola Tinubu à sortir de son mutisme. Ce dimanche, le dirigeant s’est adressé à ses compatriotes, appelant à la fin des manifestations.
« Je vous ai entendus clairement. Je comprends la douleur et la frustration qui motivent ces manifestations ». C’est en ces termes que Bola Tinubu s’est adressé, ce dimanche, à ses concitoyens, dans un discours télévisé. Le dirigeant nigérian a invité les manifestants à « suspendre toute nouvelle protestation et à créer un espace de dialogue ». Pour Bola Tinubu, les effusions de sang, la violence et la destruction doivent cesser. Puisque le gouvernement s’engage à « écouter et à répondre aux préoccupations » des citoyens nigérians.
Des réformes difficiles à supporter
En réalité, les Nigérians s’insurgent contre une paupérisation grandissante dans le pays, depuis l’accession au pouvoir de Bola Tinubu. En effet, alors que le pays continuait de se débattre avec les conséquences du Covid-19 aggravées par celles de la guerre russo-ukrainienne, source d’une forte inflation sur le continent en général, le Président Tinubu a, contre toute attente, décidé de suspendre les subventions du carburant, entre autres réformes. Une mesure qui a naturellement entraîné une hausse des prix du carburant et dans une relation à la chaîne, la hausse généralisée des prix.
En juin, le taux d’inflation avait atteint le niveau record de 34.19% dans le pays. L’inflation des denrées alimentaires, elle, a dépassé 40.87%. Tout ceci dans un pays où le salaire minimum est très bas. C’est le 23 juillet que le Parlement nigérian a adopté une loi faisant passer le salaire minimum de 30 000 à 70 000 nairas, soit environ 40 euros, après plusieurs mois d’âpres négociations. En prenant cet acte, le gouvernement entendait désamorcer les appels à manifestations lancés pour le mois d’août. Mais, il n’a pas pu atteindre cet objectif, puisque les manifestations ont bel et bien eu lieu. La violente répression des forces de l’ordre a occasionné la mort de 13 personnes, jeudi dernier.
Faut-il craindre le pire ?
Avec déjà 13 morts dénombrés par Amnesty International, les manifestations de ces derniers jours sont les plus violentes qui aient eu lieu au Nigeria, depuis le mouvement EndSARS organisé pour protester contre les violences policières notamment celles perpétrées par l’unité Special Anti-Robbery Squad (SARS). Et il faut craindre un risque d’escalade, puisqu’en dépit de son appel au calme, le Président Tinubu ne semble pas vouloir revenir sur ses réformes, en l’occurrence la plus querellée qui est la suppression des subventions étatiques sur le carburant. Dans son discours, le dirigeant se satisfait de son bilan indiquant même que les réformes allaient à terme se révéler bénéfiques non seulement pour la jeunesse, mais également à l’économie du pays d’une façon globale.
En face, les responsables du mouvement #EndbadGovernanceinNigeria (Mettre fin à la mauvaise gouvernance au Nigeria) ne semblent pas vouloir démordre. De leur avis, le Président Tinubu doit « mettre fin à la souffrance et à la faim ». Et ceci passe, entre autres, par le retour des subventions sur le carburant. « Nous avons été dispersés sans ménagement, mais je pense que cela n’a fait que renforcer notre détermination », a confié à la presse Damilare Adenola, un des manifestants.