Mali : retour sur la disparition de Souleymane Cissé, pionnier du cinéma africain


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Souleymane Cissé
Souleymane Cissé

Souleymane Cissé, l’un des plus grands réalisateurs africains, s’est éteint à 84 ans. Visionnaire et engagé, il a marqué le cinéma par des œuvres qui dénoncent les injustices et valorisent la culture africaine. De La Jeune Fille à Yeelen, son héritage restera un repère incontournable pour les cinéastes du continent et du monde entier.

Le cinéma africain perd l’un de ses plus grands maîtres. Souleymane Cissé, figure emblématique du septième art, s’est éteint à 84 ans le 19 février 2025. Son engagement, son talent et sa vision ont marqué des générations. À travers ses œuvres, il dénonçait les injustices et mettait en lumière les réalités sociales et politiques de son époque.

Un cinéaste visionnaire et engagé

Né en 1940 à Bamako, Souleymane Cissé a grandi dans une Afrique en pleine mutation. Son intérêt pour le cinéma s’est révélé très tôt, mais c’est en Union soviétique, à l’Institut des hautes études cinématographiques de Moscou, qu’il a perfectionné son art. Beaucoup rapportent que sa vocation de cinéaste aurait véritablement pris naissance après avoir visionné un documentaire sur l’arrestation de Lumumba. Porté par ce rêve, il obtient une bourse d’État qui lui permet d’étudier le cinéma à Moscou.

À son retour au pays, il est recruté en 1970 par le ministère de l’Information en tant que réalisateur. Il se consacre alors à la mise en images des discours officiels ainsi qu’à la production de films d’actualité et de documentaires. Deux ans plus tard, il franchit un nouveau cap en réalisant son premier moyen métrage de fiction, Cinq jours d’une vie, abordant le thème de la jeunesse et du vagabondage. Ce premier essai s’avère prometteur puisqu’il est récompensé au Festival international de Carthage, l’un des plus prestigieux événements cinématographiques du monde arabe et africain. Ainsi débute une longue et prolifique carrière.

Des œuvres inoubliables qui résonnent encore

Son premier long-métrage, La Jeune Fille (1975), évoque la condition des filles-mères et les violences faites aux femmes. Censuré à sa sortie, ce film courageux révèle un cinéaste audacieux. En 1987, Yeelen (La Lumière) lui apporte une reconnaissance internationale en remportant le Prix du jury à Cannes, une première pour un réalisateur noir africain.

Tout au long de sa carrière, il a su mêler traditions africaines et esthétique cinématographique exigeante. Représentant régulier du cinéma africain à Cannes, en 2023, il reçoit le prestigieux Carrosse d’or pour Finye (Le Vent), une œuvre qui explore les tensions entre générations et les aspirations de la jeunesse africaine. Une récompense aussi pour ses 50 ans de carrière.

Un héritage cinématographique intemporel

Son œuvre témoignant de son époque, a raconté une Afrique en pleine transformation et contribué à préserver sa mémoire. Son engagement ne s’est pas limité à ses films. En tant que président de l’Union des créateurs et entrepreneurs du cinéma et de l’audiovisuel de l’Afrique de l’Ouest, il a œuvré pour le développement du septième art sur le continent.

Le Mali et l’Afrique perdent l’un de leurs plus grands artistes, mais son héritage continuera d’inspirer les générations futures. Pionnier et visionnaire, Souleymane Cissé laisse derrière lui une lumière qui ne s’éteindra jamais.

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