
L’ancien Premier ministre malien, Moussa Mara, se retrouve au cœur d’une affaire judiciaire sensible. Ce mercredi 5 mars 2025, la Cour suprême du Mali l’a convoqué pour l’entendre sur l’acquisition controversée d’un avion présidentiel en 2014.
Une audience qui pourrait marquer un point clé dans l’un des dossiers financiers les plus scrutés de ces dernières années.
Une transaction sous haute surveillance
En 2014, sous la présidence d’Ibrahim Boubacar Keïta, le gouvernement malien a acheté un Boeing 737-700 BBJ pour environ 20 milliards de FCFA. Cette acquisition, réalisée sans appel d’offres, a rapidement suscité des critiques. Des institutions financières internationales comme le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale ont dénoncé un manque de transparence. Elles ont également soulevé des soupçons de surfacturation.
Parallèlement, des irrégularités ont entaché des contrats d’équipements militaires d’une valeur de 69 milliards de FCFA. Ce qui semblait n’être qu’un débat sur la gestion publique s’est progressivement transformé en affaire judiciaire. Celle-ci implique plusieurs hauts responsables de l’État.
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Une instruction laborieuse et des figures clés impliquées
Après plusieurs années d’enquête, la Cour d’assises spéciale pour les crimes économiques et financiers a ouvert le procès en septembre 2024. Pourtant, le 9 octobre 2024, les juges ont décidé de renvoyer l’affaire à l’instruction pour complément d’enquête. Cette décision répondait à une requête du parquet, qui jugeait nécessaire d’entendre des témoins clés. Le but était d’éclaircir certaines zones d’ombre.
Moussa Mara figure parmi les personnalités convoquées, aux côtés d’Oumar Tatam Ly, un autre ancien Premier ministre, et de Madani Touré, ex-ministre délégué chargé du Budget. Leur témoignage doit permettre de déterminer les responsabilités dans la prise de décision ayant conduit à ces acquisitions controversées.
Des précédents judiciaires et un climat tendu
Cette affaire a déjà conduit plusieurs figures politiques maliennes derrière les barreaux. En 2021, les autorités ont incarcéré Soumeylou Boubèye Maïga, ancien ministre de la Défense et Premier ministre, qui est décédé en détention en mars 2022. Bouaré Fily Sissoko, ex-ministre de l’Économie et des Finances, purge elle aussi une peine de prison depuis 2021 pour atteinte aux biens publics, escroquerie et favoritisme. Le colonel Nouhoum Dabitao, ancien chef d’État-major général des armées, a également été arrêté en août 2021.
L’audition de Moussa Mara pourrait relancer l’affaire et mener à de nouvelles poursuites. Mais aussi, elle pourrait, au contraire, apporter des éléments d’exonération pour certains responsables. Pour l’instant, l’ancien Premier ministre a simplement appelé ses partisans « au calme et à la sérénité » en attendant les conclusions de la justice.
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Un dénouement attendu
L’interrogatoire de Moussa Mara devant la Cour suprême pourrait enfin lever le voile sur cette affaire de corruption présumée. Reste à savoir si cette audience contribuera à la lutte contre les crimes économiques au Mali ou si elle s’ajoutera à la longue liste des procès sans issue. De leur côté, les Maliens attendent des réponses concrètes sur l’utilisation des deniers publics et la responsabilisation des dirigeants.