
Le Mali entame un nouveau chapitre dans la gestion de son secteur minier avec la levée partielle de la suspension des permis d’exploitation minière, prévue pour le 15 mars 2025. Cette décision, annoncée par le ministère malien des Mines et relayée par la presse locale, est une nouvelle étape dans la gestion des ressources naturelles du pays.
À partir du 15 mars, l’administration minière du Mali commencera à traiter les demandes de renouvellement des permis de recherche et d’exploitation, ainsi que les demandes de transition de la phase de recherche vers l’exploitation. Toutefois, il est important de noter que l’attribution de nouveaux titres miniers reste suspendue pour le moment. Cette mesure s’inscrit dans le cadre des efforts du gouvernement pour rationaliser et renforcer la gestion des titres miniers, en particulier dans un secteur stratégique pour l’économie malienne.
La suspension des permis miniers avait été imposée fin novembre 2022, dans un contexte où le gouvernement malien souhaitait améliorer le processus de délivrance et de suivi des titres miniers afin de mieux répondre aux attentes des acteurs du secteur. Cette suspension avait également permis de préparer un cadre législatif plus adapté aux enjeux économiques et sociaux du pays.
Renforcement des exigences vis-à-vis des entreprises minières
En août 2023, une avancée significative a eu lieu avec l’adoption d’un nouveau code minier, conçu pour mieux structurer le secteur. Ce code renforce les exigences vis-à-vis des entreprises minières et vise à favoriser une meilleure participation de l’État malien dans les projets miniers. Désormais, le gouvernement peut prendre une participation de 10% dans les projets miniers, avec la possibilité d’acheter 20% supplémentaires durant les deux premières années de production commerciale.
Par ailleurs, une participation supplémentaire de 5% peut être octroyée au secteur privé malien, portant ainsi la part des intérêts publics et privés nationaux à 35% dans les nouveaux projets, contre 20% auparavant. Cette réforme s’inscrit dans la volonté de renforcer la souveraineté économique du pays et de garantir que les ressources naturelles profitent davantage à la population malienne.
Mesures audacieuses pour générer les ressources minières
Le Mali, l’un des plus grands producteurs d’or en Afrique, dispose également de nombreuses ressources minérales inexplorées, telles que le fer, le manganèse et le lithium. Cependant, la majeure partie de l’exploitation minière est dominée par des entreprises étrangères. Parmi les acteurs majeurs du secteur, on trouve les géants miniers canadiens Barrick Gold et B2Gold, l’australien Resolute Mining et le britannique Hummingbird Resources, entre autres.
Cette présence étrangère soulève des questions sur la gestion des ressources naturelles du pays et sur la manière dont les bénéfices issus de l’exploitation minière sont redistribués au sein de la société malienne. Dans ce contexte, le gouvernement malien a récemment pris des mesures audacieuses pour récupérer une part plus importante des retombées économiques générées par les mines. En novembre 2024, une action de grande envergure a eu lieu contre Barrick Gold, qui a été sommée de verser la somme de 512 millions de dollars, soit environ 300 milliards de francs CFA, pour des arriérés fiscaux et des dividendes impayés.
Pression sur les entreprises étrangères opérant au Mali
Bien que Barrick Gold ait contesté ces accusations et qu’un audit ait révélé des irrégularités fiscales significatives, la société a versé 17 millions de dollars pour suspendre temporairement la procédure. Cette confrontation avec Barrick Gold a marqué un tournant dans la manière dont le gouvernement malien aborde les relations avec les grandes compagnies minières. Quelques semaines après cet incident, le 8 novembre 2024, c’est au tour de Resolute Mining d’être mis sous pression. Le directeur général de l’entreprise australienne, Terry Holohan, a été interpellé à Bamako, accompagné de plusieurs cadres de la société.
Resolute Mining, qui détient 80% de la mine d’or de Syama, est accusée de faux et d’atteinte aux biens publics. Bien que les détails de l’enquête ne soient pas encore clairs, cette action a envoyé un message fort : le gouvernement malien ne tolérera plus les pratiques jugées illégales ou injustes de la part des entreprises étrangères opérant dans le pays. Dans ce contexte de réformes ambitieuses, le ministre malien des Mines, Alousseni Sanou, a annoncé que la révision des contrats miniers, notamment avec B2Gold, Allied Gold et Robex, devrait permettre de générer des recettes supplémentaires de l’ordre de 245 milliards de francs CFA par an.
Reprise en main des ressources naturelles
L’objectif est de porter la participation de l’État malien de 20% à 35% dans les projets miniers et de réduire les avantages fiscaux accordés aux entreprises étrangères. Cette révision des contrats vise aussi à favoriser l’emploi local dans les secteurs de direction et à maximiser les retombées économiques pour la population malienne, particulièrement dans les zones rurales. L’un des enjeux importants de cette politique de reprise en main des ressources naturelles est la question des relations internationales.
Le Mali, sous l’autorité du gouvernement militaire de transition, a renforcé ses liens avec la Russie depuis le départ des forces françaises. Bien qu’aucune attribution officielle de permis miniers à des entreprises russes n’ait été confirmée, des spéculations circulent sur l’entrée possible de sociétés russes dans le secteur minier malien.