La crise malienne a franchi un nouveau cap depuis le début de la semaine. L’armée malienne a repoussé mardi une offensive jihadiste près de Mopti, à 600 km de Bamako, la capitale du Mali.
Lundi, celle-ci a procédé à des tirs de sommation contre les islamistes dans le département de Douentza. Ces hostilités tombent au plus mal et risquent de nuire aux négociations de Ouagadougou, au Burkina Faso. Contacté par Afrik.com, Philippe Hugon, chercheur à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS), met en garde contre le regroupement des jihadistes sur le long de la frontière du Nord-Mali, et prévient qu’en cas d’accentuation de ces affrontements, l’agenda de l’intervention militaire pourrait être accéléré. Interview.
Afrik.com : Comment interpréter ce regain de tensions entre l’armée malienne et les islamistes ?
Philippe Hugon : Il y a effectivement une montée de tentions. Ce qui entrave les négociations entamées entre le MNLA et Ansar Dine d’une part, et les autorités maliennes d’autre part. Il s’agit cependant des escarmouches et d’affrontements pas très violents. Cette montée des hostilités signifie, néanmoins, que les jihadistes refusent les négociations de Ouagadougou et font savoir que c’est la force des armes qui l’emporte sur les pourparlers. Ansar Dine a changé de position avec son arrêt de cessation des hostilités.
Afrik.com : Que doivent craindre les autorités de Bamako ?
Philippe Hugon : L’inquiétude principale c’est le regroupement des troupes (islamistes) le long de la frontière du Nord-Mali. Et, l’armée malienne n’est pas structurée pour lutter contre les jihadistes.
Afrik.com : Doit-on s’attendre à une guerre avant l’heure ?
Philippe Hugon : A priori, non. Les forces de la Cedeao (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) ne sont pas présentes. Ni l’armée malienne. Le pire des scénario c’est que les islamistes quittent le Nord pour envahir le Sud. Ils n’ont pas intérêt à faire cela, sinon c’est l’intervention immédiate de la force internationale.
Afrik.com : L’Union africaine a appelé l’Otan à déployer des forces au côté des troupes africaines qui doivent intervenir dans le Nord-Mali. Est-ce que ce regain de tensions peut modifier le calendrier de l’intervention militaire ?
Philippe Hugon : Oui, si jamais il y a une accentuation des affrontements. Les troupes de la Cedeao seront complétées. Les Casques bleus ne sont pas prévues, mais des soldats africains or de l’organisation ouest-africaine, peut-être des Tchadiens, Mauritaniens et probablement ceux de l’Afrique du Sud.