Les troupes sont prêtes à intervenir dans le nord-Mali, a annoncé la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao), qui n’attend plus que l’aval de l’ONU. De son côté, l’Union européenne multiplie les réunions pour se préparer à apporter sa contribution à la force africaine.
Le plan militaire pour reconquérir le nord-Mali se concrétise. La Cedeao a décidé de déployer 3.300 hommes pour déloger les islamistes. Le Niger, le Sénégal, le Togo, et le Nigeria sont les principaux pays qui participeront à l’opération. Le Burkina-Faso et Ghana apporteront une contribution moins importante, selon RFI.
Le Tchad s’est aussi dit prêt à mobiliser des troupes pour prêter main forte à la Cedeao. Le général Sékouba Konaté, commandant de la force africaine en attente, a rencontré le président tchadien Idriss Deby mercredi. Selon ce dernier, « les forces tchadiennes sont à la disposition de l’Union africaine et de la Cedeao pour une intervention au nord-mali, si elles en font la demande ».
Le Tchad, un allié de taille
Le Tchad représente un allié de taille pour les troupes africaines. L’armée tchadienne est bien formée pour ce type de bataille et a une bonne expérience dans le désert. Elle est aussi très efficace pour la guerre mobile. Le pays dispose de 30.000 hommes équipés de matériels modernes. La Tchad ne fait pas partie des pays de la Cedeao. Mais il est tout aussi concerné par la crise malienne qui risque de déstabiliser tous les pays du Sahel, dont fait partie le Tchad. Depuis le début du conflit, plus aucun pays de la sous-région ne dort sur ses deux oreilles, craignant une propagation sur son sol. Et chacun sait que l’armée malienne défaite n’est pas en mesure de mener cette opération militaire dans le nord sans un véritable soutien de ses voisins.
La Mauritanie et l’Algérie ont eux indiqué qu’ils allaient fermer leurs frontières pour éviter que des islamistes se replient sur leurs territoires. Le porte-parole algérien du ministère des Affaires étrangères Amar Belani a déclaré mardi à l’APS que l’Algérie prendra « les mesures appropriées » pour assurer la défense de ses intérêts et la protection « maximale » de ses frontières. Depuis le début du conflit, l’Algérie a toujours boudé l’intervention militaire, privilégiant la solution diplomatique. Alger craint un retour de bâtons des islamistes sur son sol. Mais de nombreux experts estiment que l’Algérie est incontournable pour reconquérir le nord-Mali. Son armée, ses services de renseignements, et son expérience dans la lutte contre le terrorisme sont des atouts non négligeables. La Cedeao et la France ont pourtant tenté mainte fois de convaincre Alger de rejoindre les rangs des pays prêts à s’engager pour déloger les islamistes de la région, en vain. Or, l’Algérie dispose de 1400 km frontière commune avec le Mali.
Tout comme les pays de la Cedeao, l’Europe se prépare aussi à prêter main forte au Mali. La France s’est engagée à apporter un soutien logistique aux troupes africaines. Mais elle voudrait aussi que les autres pays européens apportent leur contribution. Les ministres de la Défense de cinq pays de l’Union européenne (UE) se sont d’ailleurs réunis ce jeudi à Bruxelles pour discuter du soutien qu’ils pourraient apporter au Mali. Lundi prochain, ce sera au tour des 27 ministres des Affaires étrangères de l’UE de se rencontrer pour définir un plan d’entrainement des troupes africaines. Au moins 200 à 400 formateurs devraient être déployés sur le terrain début 2013. Les Etats-Unis devraient aussi apporter une aide logistique aux troupes de la Cedeao et envoyer des drones dans le nord. La bataille pourrait donc aussi se jouer dans les airs.
AQMI, une menace imminente
Toutefois, l’intervention dans le nord n’est pas imminente. Elle ne devrait pas avoir lieu avant six mois selon les experts africains qui travaillent sur le dossier. Il faudrait attendre jusqu’en avril 2013, le temps que les troupes se préparent. La Communauté internationale devrait prendre en charge le coût de l’opération. La France, qui est le pays le plus actif sur le dossier malien, estime qu’il faudra débloquer 200 à 300 millions de dollars par an.
En attendant l’intervention militaire, la communauté internationale ne ferme pas la porte du dialogue. Ansar Dine, l’un des groupes islamiques contrôlant le nord, s’est dit prêt à négocier pour la paix dans le nord-Mali. Il est même allé plus loin mercredi en déclarant avoir renoncé à appliquer la charia dans tout le Mali et s’est dit prêt à débarrasser le nord « du terrorisme et des mouvements étrangers ». Le groupe tente de se démarquer d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et du Mujao qui contrôlent aussi la région. C’est précisément ce que la communauté internationale attend d’Ansar Dine. Elle souhaite que le groupe rompt ses liens avec AQMI et le Mujao. L’objectif est de mener une action militaire uniquement contre les terroristes qui refusent le dialogue. Les rebelles touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) sont aussi invités à renoncer à leurs revendications.
Même si le Mali a l’appui de ses pays voisins et de la communauté internationale, déloger les islamistes du nord ne sera pas une mince affaire. Selon le général américain Carter Ham, commandant des forces américaines pour l’Afrique, AQMI a un « très fort potentiel pour frapper l’Europe et les Etats-Unis ». Il a rappelé mercredi que « ce réseau a tué quatre Américains », faisant allusion à l’attaque du 11 septembre contre le consulat américain à Benghazi, en Libye, où l’ambassadeur Christopher Stevens et trois autres Américains ont péri. « Cela veut dire, pour moi, qu’il y a une menace imminente », a-t-il ajouté. Selon lui, la communauté internationale doit aider l’Afrique à lutter contre cette menace avant que le groupe terroriste devienne « plus fort ».
AQMI qui compte en effet faire du nord-Mali son sanctuaire pour mener à bien ses projets est la principale menace que les Africains et occidentaux craignent. L’organisation terroriste campe sur ses positions en attendant l’intervention militaire. Prête à en découdre avec les troupes qui fouleront la région.